• J’ai une grande amie, qui vit désormais dans un pays lointain, et qui m’écrivait récemment qu’avec le choix de vie qu’elle avait fait, il ne lui restait plus qu’à se résigner, jusqu’à la fin de ses jours.

    Si encore ce choix était un mauvais choix, un choix bête ou égoïste dont on doit supporter les conséquences, mais bien au contraire, c’était le choix admirable de se sacrifier en quelque sorte pour des êtres qu’on aime, mais comme si tout cela allait nous condamner pour toujours à une vie médiocre et repliée sur soi !

    Non, je ne suis pas d’accord, et je voudrais crier de tout mon cœur à ces amis si nombreux qui se sentent eux aussi condamnés à ne plus jamais voler, à ne plus jamais rêver, à ne plus jamais réaliser leurs passions, qu’il y a toujours une solution, une porte entrouverte vers le ciel. Et qu’il y a une différence énorme entre « accepter » certains conditionnements extérieurs qu’on ne peut plus changer et « se résigner » à être les victimes passives de ces conditionnements injustes.

    Non, il y a toujours une vie en nous qui est plus grande que nos conditionnements, que les injustices qui nous tiennent enfermés comme dans une grande prison. Il y a toujours une porte de sortie, mais cette porte de sortie est en nous et en même temps dans le cœur de ceux qui ont décidé comme nous de s’en sortir.

    La première chose à faire, pour ne pas se résigner, est de se convaincre que nous ne sommes pas seuls. Nous sommes entourés de milliers et de milliers de personnes qui sont tentées comme nous de tout abandonner, parce que le combat est trop dur, mais chacun tout seul dans son coin, sans voir que le voisin de la pièce d’à côté tourne lui aussi en rond sur lui-même sans espoir.

    Puis il faut rencontrer ces gens qui cherchent comme nous, il faut s’encourager mutuellement à libérer en nous ces énergies cachées sous la cendre et qui ne demandent au fond qu’à brûler, brûler intensément. La première lueur d’espoir va être le jour où, moi qui suis presque entièrement dans le noir, j’aurai réussi à faire briller les yeux de quelqu’un qui était dans un noir encore plus terrible que le mien. Alors je vais y prendre goût peu à peu, je vais essayer encore, je vais échouer un certain nombre de fois, mais le souvenir de ma première victoire va bientôt en appeler d’autres.

     

    Je vais alors commencer à rêver de nouveau, et le rêve pousse à être attentif, et quand on est attentif, on se met à découvrir des occasions par milliers, et sur des milliers d’occasions on ne peut pas tout rater, c’est impossible, alors on relève la tête. On se sent tout à coup envahi par un courant bénéfique et contagieux qui nous emporte et qui emporte avec nous d’autres compagnons de voyage. Je sais que tout cela ce sont des mots. Mais c’est aussi le fruit d’années et d’années d’expériences où j’ai vu des handicapés redonner le bonheur aux autres, des moribonds consoler ceux qui pleuraient au pied de leur lit, des pauvres qui partageaient avec d’autres pauvres tout ce qu’ils possédaient, des gens sourire au milieu des larmes, et je n’en finirai pas de vous citer des exemples eux aussi par milliers… et je sens que cet article n’est que le début d’une longue série… jusqu’à ce que mon amie me dise que maintenant elle est vraiment convaincue. J’y consacrerai le temps qu’il faudra, mais je suis têtu, je ne suis pas du genre à baisser les bras à la première réponse négative !


    votre commentaire
  • Comme une page de blog est souvent trop courte pour bien se faire comprendre, j’ai eu envie de revenir sur mon dernier article où je m’élève contre cette peur au cœur du monde chrétien qui continue à éloigner de l’Eglise et du christianisme le peu de gens qui pourraient encore y trouver une certaine lumière.

    Mais reprenons la phrase clé de l’article qui m’a fait réagir : « La pratique du yoga est incompatible avec la spiritualité chrétienne. »

    Lorsque deux réalités sont incompatibles l’une avec l’autre, elles le sont toujours dans la réciprocité. Et si je retourne la phrase, on pourra lui faire dire que le christianisme, ou au moins la spiritualité chrétienne, est incompatible avec la pratique du yoga. Mais vous ne sentez pas qu’il y a là une affirmation terriblement grave qui risque de déformer tout le message du Christ ?

    On va finir par dire que le Christ est incompatible avec les trois quarts de l’humanité ! Mais une personne responsable de l’Eglise qui se permet des mots pareils, en mesure-t-elle la portée terrible ?

    Non, il y a là un immense malentendu, qui part peut-être d’une bonne intention au départ, mais qui dénature complètement l’esprit de l’Evangile ! Le Christ que je suis (du verbe suivre) est compatible avec tout homme quel qu’il soit, avec même le plus misérable des pécheurs que Jésus est venu sauver. Le Christ est même compatible avec le péché puisqu’il a assumé le péché sur la croix, alors qu’il aurait pu s’en désolidariser complètement.

    Le Christ est solidaire de tout homme. Le seul péché qu’il a récusé de manière absolue est celui qui va contre l’Esprit, et encore faudrait-il être sûr d’avoir compris ce qu’il a voulu dire par là.

    Et lorsqu’une religion, que l’on est en droit de considérer de bonne foi, développe une recherche qui semble différente des idées du christianisme, l’Eglise d’aujourd’hui (qui revient à la source de l’Evangile) est en train de nous apprendre à y chercher les semences du Verbe, c’est-à-dire du Christ. Le Christ est là, au cœur même du yoga et de toute spiritualité qui pourrait sembler diverse de notre propre foi. Le Christ voit bien plus loin que les apparences, son regard d’amour plonge au cœur de chaque homme pour lequel il a donné sa vie.

    Ce n’est pas en pratiquant le yoga que je cours des risques, mais en cessant de vivre en moi et avec mes compagnons de route l’esprit de l’Evangile qui s’intéresse à tout homme, surtout celui qui est différent et qui m’attire : « Allez dans le monde entier proclamer la Bonne Nouvelle à toute la création. » Et dans le monde entier se trouvent les pratiquants de yoga, les non-violents comme Gandhi, tous ceux qui se battent pour un monde meilleur, mais qui ont d’autres idées que nous et que le Christ aime comme il nous aime. Si c’est cet esprit-là qui se perd, alors je veux bien croire que le christianisme court à sa perte, mais ce ne sera pas à cause des autres, ce sera à cause d’une maladie qu’il se sera créée lui-même de l’intérieur, par peur, par paresse, par égoïsme, ou même par hypocrisie : Dieu seul pourra en juger ! 

     

     


    1 commentaire
  • Je ne sais pas pourquoi, mais je vois trop de peur un peu partout ces jours-ci. Je suis peut-être en train de tomber dans le piège d’avoir peur de la peur ? Il y aurait de quoi être préoccupé. Quand trop de chrétiens sont sur la défensive et continuent à se préoccuper de l’avenir du christianisme, cela pourrait en effet être un signe précurseur que le christianisme est bien malade.

    Heureusement tous les chrétiens n’ont pas peur, car je pense qu’un véritable chrétien est surtout occupé à aimer Dieu et son prochain, il n’a même pas le temps de trop se regarder.

    Mais dites-moi ce que vous pensez de ces quelques lignes tirées d’un article publié hier dans l’Orient Le Jour, le quotidien libanais en langue française :

    « La pratique du yoga est incompatible avec la spiritualité chrétienne, a estimé vendredi le Centre catholique d'information (CCI).

    "Face à la campagne médiatique dont bénéficie le yoga, et la désinformation consistant à cantonner cette pratique à un exercice physique faisant appel à des techniques de respiration et de détente, le CCI tient à alerter les croyants sur les dangers de l'utilisation de ces techniques de méditation venues de l'Asie de l'Est et sur l'éventualité qu'elles pourraient être compatibles avec la méditation chrétienne", indique le communiqué publié vendredi par le CCI.

    "La spiritualité du yoga est contraire à la spiritualité chrétienne... »

    Moi, je ne comprends plus ce christianisme frileux et perdu d’avance qui se replie sur lui-même au lieu de conquérir le monde à l’amour du Christ, cet amour à la fois avec Dieu et entre les hommes qui fait respirer, qui libère. Lorsqu’on voit partout le négatif et des dangers menaçants, c’est qu’on a commencé à être vide au fond de soi-même. Et c’est cela le véritable danger. Excusez-moi, mais si les chrétiens s’aimaient entre eux et aimaient tous leurs frères et sœurs en humanité, ils seraient tellement pleins de vie débordante qu’ils transformeraient le monde.

    J’ai de grands amis qui pratiquent le yoga avec joie et enthousiasme et qui sont en même temps de véritables chrétiens dans tous les sens du terme. Et si quelque part dans le monde certains chrétiens sociologiques ont trouvé dans l’hindouisme une source d’épanouissement qu’ils n’avaient pas trouvé dans le christianisme, qui sommes-nous pour juger qu’ils sont en train de se perdre ?

    Le danger n’est donc pas le yoga, mais la peur du yoga, comme la peur de l’islam ou la peur du nouveau, ou la peur du réfugié, ou la peur de celui qui est différent. Et le christianisme n’est pas d’abord une spiritualité ou une méditation, c’est une vie bien concrète, une relation personnelle avec un Dieu qui s’est fait homme pour nous faire Dieu avec lui. Si je l’ai vraiment découvert, comment pourrais-je revenir en arrière à cause d’une méditation ou d’une spiritualité ? Pauvre christianisme qui se sent menacé : ce n’est pas ce christianisme-là qui risque d’attirer les jeunes d’aujourd’hui ! 

     

     


    votre commentaire
  • Je suis un peu surpris de temps en temps, lorsque j’entends mes amis libanais me dire : « Attention, vous faites une grande erreur en France d’accepter tous ces réfugiés musulmans sur votre terre : dans quelques années l’islam va dominer la France ! »

    Je pense que ces bons amis, certainement bien intentionnés, n’ont pas compris grand-chose aux Français, ni même d’ailleurs à l’islam lui-même.

    Une grande majorité de Français se dit maintenant areligieuse. C’est-à-dire qu’ils ne sont même plus contre la religion, ils considèrent que les religions sont désormais un phénomène historique dépassé en pleine extinction, comme certains animaux rares d’Afrique. Et je pense que ces bons amis français, eux non plus, ne comprennent pas grand-chose à cette réalité !

    Alors où serait la vérité, d’après moi ? Essayons de regarder les choses en face. Je ne crois pas que la religion soit finie. Ce qui est fini, c’est de se servir de la religion comme un pouvoir de peur qui asservit les peuples. Ce qui est dépassé maintenant et qui, je l’espère bien, ne se reproduira plus, c’est que des responsables religieux exercent un pouvoir terrible sur les gens par la peur. L’homme moderne est trop éveillé, trop intelligent maintenant pour se laisser tromper par ces fausses vérités qui ne sont qu’une vilaine caricature de la religion.

    La peur de l’enfer, la peur du péché, la peur de ce que les autres pensent de vous, la peur de la loi, tout cela est heureusement en train de disparaître dans le christianisme, car c’était une sorte d’hérésie chrétienne qui s’est développée avec les siècles, bien loin du message d’amour de Jésus Christ. Et vous pensez que les Français d’aujourd’hui, après s’être débarrassés de la peur de l’Eglise, vont se laisser prendre par la peur de l’islam ? Soyons un peu sérieux !

    C’est que l’islam est devenu malheureusement, lui aussi, en grande partie une religion de peur. Et ne voyez-vous pas que l’islam qui peut faire peur est lui-même au fond d’une crise noire. C’est celui qui se sent acculé, qui a peur de disparaître, qui devient dangereux, car il se fait agressif en pensant obliger les autres à l’accepter. Sans se rendre compte qu’ainsi il se fait de plus en plus haïr, au point qu’une grande partie des Européens d’aujourd’hui ne savent même plus distinguer les belles valeurs au cœur de l’islam de ses excès insupportables.

    Ne voyez-vous pas en même temps que ce sont les musulmans les premiers qui ont peur de l’islam tel qu’il se présente aujourd’hui dans un certain nombre de pays ? Et, avant de les juger, horrifiés, rappelons-nous qu’il y a seulement quelques siècles nos bons amis protestants ont dû fuir la France pour ne pas être exterminés par leurs bons « frères » catholiques !

     

    La vérité, c’est que l’islam tel qu’il se présente aujourd’hui n’a plus beaucoup de temps à vivre. Le jour où les musulmans devront se résigner à accepter le concept de liberté religieuse, de liberté dans le choix personnel d’une foi religieuse ou du refus de cette foi, en quelques années les trois quarts des musulmans quitteront l’islam, comme une grande partie des chrétiens a fui le christianisme. C’est là un phénomène irréversible et tellement positif pour l’avenir de l’humanité. Car viendra finalement le jour où les religions s’uniront pour la paix au lieu de se servir de leur « mauvaise foi » pour inventer de nouvelles guerres. Un peu de patience, et nous aurons bientôt de belles surprises !


    3 commentaires
  • « Quand ils entendirent qu’il était vivant et qu’elle l’avait vu, ils refusèrent de croire. » (Mc 16, 11)

    Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais moi je trouve extraordinaire cette petite phrase, apparemment sans grande importance. Elle me conforte d’abord dans ma « vision des quatre verbes » (être, accueillir, donner ou se donner et refuser), telle que vous pouvez la trouver dans mon blog.

    Oui, c’est important que les disciples de Jésus, ses amis les plus proches et les plus chers, aient d’abord refusé de croire que Jésus était ressuscité. Pourquoi cela ? Pour insister encore sur la faiblesse de l’homme, à commencer par celle des apôtres que l’on retrouve tout au long de notre Evangile ?

    Non, ce que je trouve d’extraordinaire, ici, c’est la délicatesse de Dieu. Ce Dieu qui est venu nous faire cadeau de l’amour de paradis qui règne de toute éternité entre le Père et le Fils dans l’Esprit Saint, a trop de respect pour notre liberté et notre personnalité, pour nous imposer quoi que ce soit comme à des marionnettes obligées de le suivre parce qu’elles n’auraient pas d’autres choix !

    Jésus veut nous prendre avec lui dans son amour immense, dans le mystère de réciprocité qui brûle au sein de la Trinité, mais il veut que nous y entrions librement, après y avoir mûrement réfléchi, après avoir fait un choix personnel à recommencer d’ailleurs chaque jour, car la foi d’hier ne sera jamais une garantie pour la foi d’aujourd’hui. Alors, lorsque nous décidons d’entrer dans le jeu, nous aussi, de tout notre cœur et de tout notre être, lorsque nous décidons d’accepter de devenir nous-mêmes Dieu par participation, c’est bien nous, notre moi profond, unique, irremplaçable qui a fait ce pas de la réciprocité.

    Sans cela, nous serions un simple jouet entre les mains de notre Seigneur. Tandis que si nous avons vraiment fait ce choix, si c’est bien nous qui avons accepté l’invitation, notre joie sera totale pour l’éternité, car Dieu, dans son immense bonté, aura réussi à faire de nous des partenaires presque d’égal à égal. Et c’est sans doute cela le miracle le plus grand !

     

     


    votre commentaire