• Vous aurez sans doute remarqué qu’on oppose souvent, dans la vie des tous les jours, les deux verbes prendre et donner. On vous dira que l’homme ne peut pas toujours donner, il doit bien aussi penser à prendre pour lui-même. On oppose en général ces deux actes apparemment incompatibles, ou, au mieux, on nous dit que la vie est faite d’équilibre entre prendre et donner. Sagesse populaire qui dit en partie la vérité, mais qui dérange un peu. C’est comme si on voulait nous dire que « donner » est un grand idéal très beau, mais qu’on peut l’appliquer seulement par moments, car il faut tout de même penser à soi avant de pouvoir donner, il faut être réaliste et ne pas trop se faire d’illusion. C’est pour une vie médiocre de cette sorte que nous serions venus au monde ?

    Il est bien évident que nous ne pouvons pas donner toute la journée, c’est bien normal. Et là n’est pas le problème. Alors que faire quand nous ne sommes pas en train de donner ? Eh bien simplement recevoir ou accueillir. C’est déjà tellement beau de recevoir : recevoir des amis, recevoir un message, un cadeau, une invitation, une bonne nouvelle… mais évidemment un peu moins agréable de recevoir de mauvaises nouvelles, de recevoir des coups.  Toute la journée nous avons mille occasions de recevoir. Mais là encore, il y a quelque chose qui me dérange, car on peut recevoir un cadeau et le mettre de côté sans même prendre le temps de s’y intéresser. On peut recevoir beaucoup de choses ou de personnes, sans se sentir trop impliqué, de manière superficielle.

    Alors ce qui est le véritable complément, à mon avis, du verbe « donner », c’est le verbe « accueillir ». Car accueillir, c’est recevoir de tout son cœur. Accueillir un pauvre ou un réfugié chez soi, cela peut lui changer la vie et changer la nôtre en même temps. Accueillir la souffrance des autres et même sa propre souffrance, c’est leur donner un sens qui restera encore toute notre vie, même quand cette souffrance aura disparu…

    C’est qu’en définitive, comme nous l’avons déjà écrit à plusieurs reprises dans ce blog, accueillir et donner sont tout simplement les deux visages de l’amour ou même de l’être, ce qui rend notre vie pleine, lumineuse, attirante, pour nous-mêmes et pour les autres.

    Car lorsque j’accueille un don, je n’ai qu’une envie, c’est celle de le partager avec les gens que j’aime et même avec toute l’humanité. Alors notre vie se passe dans ce mouvement de balancement perpétuel entre accueillir et donner, et il ne reste même plus de temps pour prendre, pour vouloir posséder égoïstement ce que nous venons de recevoir. Nous avons bien autre chose à faire, quand il nous reste seulement le temps de courir d’une personne à l’autre pour accueillir et pour donner et redonner, partager ou communiquer ce qui vient à peine de nous arriver. La vie ne peut plus être monotone, elle nous entraîne dans une dynamique contagieuse qui ne pourra plus s’arrêter. A essayer pour voir… si vous n’avez pas encore eu la chance de goûter à cette expérience.

     


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  • Quand j’étais jeune, c’était une insulte de dire à quelqu’un, en France : « Tu es raciste ! » Notre monde semblait avoir évolué. Aux Etats-Unis, le racisme contre les noirs semblait désormais dépassé. Je ne suis pas compétent pour dire ce qui se passait dans d’autres régions du monde, mais mon éducation est passée par ces valeurs d’acceptation de l’autre en commençant par la couleur de sa peau.

    Mais voilà qu’aujourd’hui, dans notre vieille Europe qui continue à se croire stupidement plus évoluée que les autres pays du monde, on dirait que le racisme est en train de devenir une idée courante, banale, dans l’indifférence presque générale. Parce que ce qui compte n’est plus la tolérance ou l’acceptation de l’autre, mais sa propre sécurité ou liberté. Et je crois que tout cela est dû à la peur. Mon papa avait peur de l’invasion des communistes, mais les communistes ne sont pas liés à une race. Tandis que maintenant on a peur des musulmans que l’on relie souvent au monde arabe, même s’il y a des musulmans dans toutes les races. Et on a peur de l’invasion des pauvres et des réfugiés sur notre vieux continent et les pauvres et les réfugiés sont souvent des noirs ou des jaunes. Alors, on essaye de se défendre, on élève des barrières et l’on oublie toutes les valeurs qu’on avait commencé à construire.

    Où va l’humanité dans tout cela ? Vers de nouvelles barrières ou frontières ? Vers de nouvelles haines ou discriminations ? C’est possible. Mais le problème, c’est que notre monde a changé, il y a eu ces dernières décennies un brassage tellement considérable de peuples et de races dans notre monde occidental que l’on ne pourra plus jamais revenir en arrière. Une grande partie des gens de nationalité française ne peuvent plus se considérer comme descendants des gaulois, c’est sûr, et pourtant ils sont fiers de leur nationalité française et la France toute entière est bien fière de ces nouveaux arrivants lorsqu’ils nous font gagner la Coupe du monde de football.

    On doit bien se rendre à l’évidence : le monde d’autrefois ne reviendra plus jamais, que cela nous semble positif ou négatif, car nous sommes tous devenus interdépendants. Aucun pays ne peut plus faire sa propre cuisine dans son coin sans tenir compte des autres. Et les relations qu’on refuse de tisser avec ses voisins en toute liberté aujourd’hui, on finira par les accepter de force dans quelques temps.

    Il y a dans la nature ce fameux phénomène des vases communicants dont on ne pourra jamais arrêter le processus. Alors que faire ? Regarder la réalité en face. Et la réalité est que nous sommes tous frères et sœurs en humanité. Et toute cette propagande qui veut nous faire croire que l’autre est menaçant parce qu’il est différent de nous par sa peau ou son origine, n’est qu’un mensonge pour nous empêcher de connaitre et de résoudre les vrais problèmes. Ne tombons pas dans ce piège tellement stupide et dangereux à la fois, si nous ne voulons pas arriver un jour à des guerres généralisées sur toute notre planète. Car, désormais, une guerre entre n’importe lesquelles des nations de notre monde sera une guerre fratricide, une guerre civile qui ne laissera que de nouvelles haines et de nouvelles blessures que l’on ferait mieux d’éviter avant qu’il ne soit trop tard !


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  • Nous arrivons à la fin de notre article, même si notre dialogue ne s’arrêtera sans doute pas là, si vous m’envoyez encore d’autres commentaires.

    Notre ami nous parle d’un amour « qui serait pratiquement impossible, car nous ne sommes pas des robots, des machines à aimer, des saints exceptionnels qu’on rencontre peut-être une fois dans la vie. »

    Excusez-moi, mais ici encore je ne peux que me révolter devant des affirmations pareilles. Il est bien évident que nous ne sommes ni des robots, ni des machines. Les machines à aimer n’existent pas, car l’amour est exactement le contraire d’une machine qui est programmée à l’avance et qui est au fond complètement stupide. C’est l’amour qui est la partie la plus intelligente de l’homme, car elle utilise tous les talents les plus beaux qui se trouvent en lui : la liberté, la générosité, la persévérance, l’oubli de soi, la patience, le courage, toutes les vertus que nous pouvons imaginer et que l’on doit chercher au fond de son cœur à chaque instant, devant chaque nouvelle situation, belle ou difficile…

    Alors dire que l’amour est impossible, parce que nous ne sommes pas des machines, j’avoue que je ne comprends pas. C’est justement parce que nous ne sommes pas des machines que l’amour est toujours possible. L’amour n’est pas un programme tout fait qu’on doit exécuter sans réfléchir, c’est au contraire une invention de chaque instant, la recherche pleine de joie du bien de l’autre et de son bonheur. L’amour est un voyage sans fin vers des horizons toujours nouveaux qui s’ouvre sans cesse sur l’avenir. Et c’est pour cela qu’il est toujours possible, car l’échec d’hier n’est que la raison de la réussite de demain. L’amour apprend chaque jour et sait se recréer après chaque obstacle, sinon il ne serait pas l’amour…

    Et c’est cela qui fait que les saints sont tellement exceptionnels et tellement simples en même temps. Un saint est exactement le contraire d’une machine à aimer. Un saint est quelqu’un de faible et de limité comme nous, mais qui a accepté ses limites en toute transparence, sans honte et sans trop se regarder. Car il a décidé un jour de s’oublier pour aimer les autres. Un saint, c’est celui qui croit justement que l’amour est et sera toujours possible, même quand toutes les apparences semblent dire le contraire. Un saint, c’est la preuve que notre vie a toujours un sens quelles que soient les circonstances…

    Alors continuons à croire en la vie et en l’amour et à leur faire confiance. Qu’avons-nous à perdre en le faisant ? Une vie de routine, de médiocrité et de tristesse ? Ce serait mieux de la perdre tout de suite, cette vie-là qui n’est même plus une vie !


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  • « Se contenter, disait notre ami, d’un simple amour gratuit, sans intérêt, sans rien attendre de l’autre… » Nous avons déjà expliqué que l’amour gratuit et sans intérêt engendre automatiquement la réponse de l’autre, au moins d’un autre, quel qu’il soit, car l’amour engendre toujours l’amour. Mais le grand malentendu ici est dans cette attente. J’ai déjà écrit dans un article qui s’intitulait : « S’attendre à tout… sans rien attendre » qu’il est normal et beau d’attendre. Si j’ai aimé, l’amour arrivera toujours en retour. Mais l’erreur c’est de l’attendre sous la forme que moi je voudrais lui imposer. L’amour de l’autre, sa réciprocité, va m’arriver à l’improviste sous la forme d’un beau cadeau vert, alors que moi je l’attendais rouge, ou en soirée, alors que je l’attendais le matin…

    Nous devons toujours laisser la vie, surtout la vie de l’autre suivre son cours librement. L’important est seulement de bien faire notre part de tout notre cœur et quelque chose va se passer. Où, quand, comment ? Cela n’a pas d’importance et c’est mieux que cela nous arrive comme une belle et bonne surprise inimaginable que comme la routine d’une réaction qui serait toujours la même, parce que l’autre sait à l’avance ce qui nous plaît et il va se plier à nos habitudes au lieu d’inventer son cadeau à lui de tout son cœur.

    Cela est déjà une bonne partie de ma réponse, mais nous n’avons pas encore fini. Notre ami confond tout, apparemment. Il parle de « se contenter, héroïquement, d’un simple amour gratuit… » Ce sont des mots qui ne vont pas ensemble. C’est vrai que l’amour gratuit est parfois héroïque, mais justement parce qu’il ne se contente jamais. C’est l’amour de routine, à moitié égoïste, qui se contente toujours de peu, qui se résigne à la médiocrité et qui n’attire plus personne sur son passage. Tandis que l’amour gratuit, sans intérêt particulier, sinon celui du bien de l’autre, est justement tellement héroïque qu’il va chaque jour au-delà de ses propres limites, il est capable de rebondir après chaque échec, de sauter par-dessus les obstacles, de répondre au mal par le bien, de pardonner et de toujours recommencer… cet amour-là ne se contente jamais, il invente toujours de nouveaux chemins, là où s’étaient dressées des barrières, et c’est cela qui nous permettra toujours d’espérer… (article à suivre)


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  • Continuons notre révolte contre la vie bien triste de la plus grande partie des hommes et des femmes d’aujourd’hui, ces frères et ces sœurs en humanité qui n’arrêtent pas de se plaindre, alors qu’en changeant leur regard ils pourraient eux aussi trouver le bonheur.

    Repartons du sens de notre vie qui est au fond comme une vague de la mer qu’on ne peut jamais posséder, ni dominer, ni même prévoir, mais qui nous fait un bien immense quand on se laisse porter par elle et pénétrer par son eau bienfaisante.

    Notre ami disait qu’on ne peut pas vivre l’amour réciproque puisque la réciprocité de l’autre m’échappe. Ce serait comme dire que la vague de la mer ne peut pas me faire du bien, puisqu’elle n’obéit pas à mes ordres, ce serait bien ridicule. Nous avons déjà dit souvent dans ce blog que la réciprocité est justement le seul amour qu’on ne peut pas posséder ou dompter, car elle dépend totalement de la liberté de l’autre. Et alors ? Nous préférerions que l’autre soit notre esclave, qu’il nous aime comme nous voulons et quand nous voulons, qu’il soit une photocopie de nos caprices, que nous puissions toujours être sûrs de comment les choses vont se passer avec lui ? Quelle tristesse ce serait alors véritablement !

    Mais non, la beauté et la grandeur de la réciprocité sont justement dans le fait qu’elle est imprévisible, qu’elle nous surprendra toujours, puisque l’autre est tellement différent de nous, il a un autre caractère, d’autres talents, un autre rythme de vie, il me répond quand lui le sent, pas quand moi je l’attends, at avec ses qualités à lui qui me font du bien car elles m’enrichissent de tout ce qui manque encore à mon humanité limitée.

    La réciprocité, c’est l’assurance que chaque jour mon cœur va s’élargir, faire de nouvelles découvertes, mais ce ne sera évidemment jamais comme je l’avais imaginé auparavant. Et c’est là qu’est le grand malentendu : croire que cette réciprocité n’existe pas parce que je ne peux pas en être le maître, parce que je peux seulement me laisser faire par elle et la laisser pénétrer en moi. N’est-ce pas cela que nous attendons de l’amour et de l’amitié ? Nous laisser pénétrer de tout notre être, ou bien vouloir que cet amour et cette amitié soient comme un objet entre nos mains infantiles ?

    Je sais que beaucoup disent avoir fait l’expérience terrible d’avoir essayé d’aimer et d’avoir été beaucoup déçus. Eh bien, excusez-moi, mais je pense qu’ils ont mal regardé en face la réalité. L’amour en nous est comme l’eau de la mer. S’il y a l’eau, il y aura toujours des vagues, même si nous ne savons pas comment et où elles vont se déverser sur notre rivage. L’amour, l’amour vrai, engendre toujours l’amour, c’est une loi de la nature. L’amour désintéressé, qui veut d’abord le bien de l’autre est tellement contagieux qu’il entraîne l’autre à sa suite. C’est vrai que parfois une personne que nous avons tant aimée se détourne de nous ou même nous fait du mal : une sur dix, une sur cent ? Et cela nous empêche de voir toutes les autres qui sont tellement touchées par notre attitude qu’elles recherchent notre compagnie et se mettent à aimer à leur tour les gens qu’elles rencontrent ?

    C’est donc comme cela que nous pourrons vivre l’amour réciproque, ou plutôt le laisser vivre au milieu de nous, à condition que nous fassions bien sûr toute notre part. Si l’eau de notre amour se multiplie, tout ira bien, mais si elle venait à se dessécher, alors évidemment il n’y aurait plus de vagues pour nous porter, tout deviendrait vide et désespérant, mais ce serait bien de notre faute !


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