• Batailles

    La vie est loin d'être une promenade tranquille. Chaque jour nous devons nous battre. Mais quels sens ont ces batailles? Contre qui et contre quoi nous battons-nous? Ou bien peut-être pour qui et pour quoi?

  • [En réaction à l’article publié le 24 mars 2022 dans « L’Orient Le Jour » par Médéa Azouri avec le titre « Le Liban deuxième pays le plus triste du monde ».]

    Non, cette fois, je ne peux pas me taire. Merci tout de même à Mme Azouri de nous partager ce qu’elle vit et ressent en ce moment. Mais je ne peux pas et ne veux pas tomber encore une fois dans ce piège de la tristesse. Oui, je suis en un sens triste pour Mme Azouri elle-même, qui est pourtant une remarquable journaliste, mais trop c’est trop !

    Qu’est-ce qui ne me va pas dans cet article ? Le contenu ? Non, notre journaliste a bien raison lorsqu’elle cite une longue liste de toutes les circonstances dramatiques que traverse le Liban et qui sont assez évidentes pour tout le monde. Elle a raison de dénoncer le déni dans lequel se réfugient encore certaines parties de la population libanaise qui se sentent peut-être encore à l’écart de tout cela. Mais là n’est pas la question.

    Ce ne sont pas les faits qui sonnent faux, mais leur interprétation, la conclusion qu’on en tire et qui va finir justement dans ces comédies de statistiques qui vous font dire n’importe quoi sur n’importe qui. Le Liban se trouverait maintenant en deuxième position sur la liste des pays les plus tristes ou les plus malheureux au monde, juste après l’Afghanistan ! Pourquoi ne pas aller chercher par exemple les dernières estimations de l’OMS en 2019 sur les pourcentages de suicides dans le monde ? Savez-vous que la Jordanie et la Syrie sont parmi les pays qui ont le moins de suicides par an, avec 2 cas sur 100.000 habitants et que le Liban n’est pas loin, avec 3 cas seulement ? Alors que la France en a déjà 10 par an, la Finlande (qui est pourtant classée en tête des pays les plus heureux au monde !) en a 13, les Etats-Unis 14 et la Russie 21 !

    Mais je laisse de côté les statistiques pour aller au cœur de notre question. Quelqu’un me dira qu’en tant qu’étranger je ne peux pas comprendre ce que vivent les Libanais. Et c’est vrai que je suis étranger. Le Liban que j’aime tant ne m’a pas encore donné sa nationalité, même si je suis arrivé ici pour la première fois en 1971, à l’âge de 22ans, même si j’ai passé au Liban deux fois plus d’années qu’en France, mon pays d’origine. Mais mes amis savent bien que j’ai tout de même le droit de parler, justement parce que le Liban est de loin le pays qui m’a donné le plus d’amis vrais et sincères qui m’empêchent précisément en ce moment de me laisser aller à la tristesse.

    Je crois que le problème n’est pas un problème de statistiques, mais du sens qu’on donne à la vie. Le fait de confondre par exemple la souffrance et le malheur. Qui aurait l’aveuglement de dire en ce moment que les Libanais ne souffrent pas, et tous leurs amis comme moi avec eux ? Mais la souffrance fait partie de la vie. C’est la règle du jeu, le menu de toute une vie. Et le bonheur, en particulier celui qui s’harmonise avec une véritable paix intérieure, n’est pas de fuir la souffrance, mais de l’intégrer dans notre bataille de chaque jour pour tout transformer en énergies positives qui puissent changer les relations de notre monde.

    Le bonheur se construit dans une foule de dimensions ou de niveaux de vie qui échappent à la pauvre et superficielle mentalité de la société de consommation qui confond la réalisation d’une personne avec la somme d’argent qu’elle a déposée en banque (et qu’elle peut retirer bien sûr quand elle en a envie !!). Pourquoi ne pas partir par exemple de la dimension culturelle et artistique d’une nation ? L’article lui-même de notre journaliste, qui rend triste, mais qui nous fait nous extasier sur son génie littéraire, n’est-il pas un signe de cette âme libanaise qui ne mourra jamais ? Et la dimension spirituelle de notre pays ? Avez-vous vraiment rencontré beaucoup de visages tristes à Annaya, au sanctuaire de Saint Charbel ? Des gens préoccupés ou angoissés qui y sortent de leur voiture, certainement, mais qui y retournent une ou deux heures plus tard avec une nouvelle lumière dans les yeux. Et la nature du Liban ? Avez-vous vu tellement de familles tristes d’avoir marché pendant des heures sur ces sentiers de montagnes parsemés de cèdres et de toutes sortes de belles plantes aromatiques ? Avec la difficulté bien sûr qu’en ce moment on n’a plus beaucoup d’argent pour acheter l’essence qui va nous permettre de partir en randonnée.

    Mais toutes ces circonstances, même les plus difficiles, n’empêcheront jamais les Libanais d’être d’abord des spécialistes de la relation, de l’hospitalité et de l’amitié fidèle. Et pour dire vrai, cette amitié fidèle me semble avoir encore grandi avec toutes ces souffrances que nous vivons en les partageant. Quand une personne entre dans ton cœur et toi dans le sien, comment peut-elle vraiment se sentir triste ? Inquiète, peut-être, pour le lendemain, fatiguée, malade, tout ce que vous voudrez. Mais cela ce sont les conditions de notre vie et non pas l’âme de cette vie. Sinon comment expliquez-vous comment notre amie Janine a réussi jusqu’à son dernier souffle, à 90 ans passés, à donner de la lumière, de l’espérance et du bonheur à tous ceux qui venaient la visiter sur son lit de malade ?

    Alors, réveillons-nous ! Le Liban ne va pas rester dans cette situation pour l’éternité. Nous mourrons peut-être avant d’avoir vu sa résurrection, comme beaucoup d’Allemands sont morts avant d’avoir vu la chute du mur de Berlin. Mais c’est notre bataille d’aujourd’hui pour construire un nouveau Liban, basé sur des relations humaines dignes de ce nom, qui va déjà être notre premier remède contre la tristesse. Ce sera une bataille longue, dure et difficile, mais l’essentiel est de ne pas trop se regarder soi-même pour continuer à se plaindre le long du chemin, mais de se laisser guider par tous ces regards à qui nous avons mille occasions chaque jour de redonner un peu plus de paix et d’espoir…


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  • Je vais essayer d’être bref aujourd’hui, plus bref que d’habitude. Le 11 janvier, je viens de fêter le 51e anniversaire de mon arrivée au Liban et au Moyen-Orient. En 1971, j’avais 22 ans et toute la vie devant moi. Jamais je n’aurais pu imaginer que le Liban, l’Egypte, la Syrie, l’Irak, la Jordanie, la Terre Sainte allaient devenir plus que ma patrie d’adoption, ma vraie famille.

    Pendant 51 ans j’ai vécu d’espoir, un espoir immense, un espoir fou pour encourager tous ces amis que je rencontrais au fil des ans. Avec des raisonnements souvent cohérents mais de plus en plus compliqués, et auxquels j’avais parfois du mal à croire moi-même. « Une guerre ne dure pas éternellement ! » « Le monde entier ne va pas nous abandonner. » « Les Libanais, les Egyptiens… s’en tirent toujours. » « Le bon sens finit toujours par avoir le dessus. »

    Eh bien, j’ai dû me rendre à la raison. La guerre du Liban n’est pas encore finie, depuis bientôt 50 ans. Le monde entier nous a abandonnés, au moins les gouvernements les plus puissants de notre planète. Les Libanais, les Egyptiens n’arrivent plus à s’en tirer. Le bon sens semble perdu la plupart du temps. A cela il faut ajouter que les corrompus se mettent d’accord avec leurs adversaires politiques pour garder leurs privilèges plutôt que d’être fidèles à leur conscience, et on ne peut plus compter sur personne. Au Liban tous les rouages de l’Etat sont plus ou moins en faillite définitive ou progressive. Et on ne parle pas du cauchemar du covid qui s’ajoute à ce terrible tableau.

    Je crois que vous devez être étonnés de me voir m’exprimer de cette manière apparemment si négative. Eh bien c’est là que vous allez en fait me retrouver : au fond du trou, là où tout semble s’écrouler. Là où on ne peut plus s’appuyer sur personne de sûr. Je suis en train de faire l’expérience ces jours-ci que nos relations d’amitié, de solidarité, d’amour vraiment réciproque n’ont jamais été aussi belles. Alors, quand on ne trouve plus aucune raison concrète de croire à un avenir meilleur, car toutes ces raisons concrètes sont tombées l’une après l’autre, il reste encore la vie et l’espoir. Il reste ce proverbe populaire merveilleux qui dit justement : « Tant qu’il y de la vie, il y a de l’espoir ! »

    Et voilà qu’aujourd’hui, je me sens tellement plus libre, parce que je n’ai plus peur de devoir être déçu demain de tout ce qui m’a donné du courage pendant toutes ces années. L’espoir, c’est bien sûr que de nouvelles raisons d’espérer, inattendues, surprenantes finiront toujours par arriver. Mais l’espoir c’est que moi et mes amis nous sommes encore bien vivants, pleins d’énergie, capables d’inventer l’avenir. Alors pourquoi nous résigner, pourquoi nous désespérer ? Vivons au jour le jour dans notre tunnel provisoire, serrons-nous les coudes et nous verrons bien si ce n’est pas la vie qui court encore dans nos cœurs qui finira par nous amener la lumière…

    Avant, je savais pourquoi j’avais encore de l’espoir. Maintenant je ne sais plus pourquoi, mais je sens que l’espoir en moi et en nous est plus vivant que jamais. Car c’est l’espoir lui-même qui est devenu mon espoir, et lui ne nous trahira jamais, car au fond il ne dépend pas des circonstances plus ou moins bonnes ou mauvaises avec lesquelles nous nous battons…


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  • Il est bien clair que toute notre vie est une longue bataille de chaque jour et de chaque instant entre le positif et le négatif, qui nous tourmente continuellement. Et pourtant je suis de plus en plus persuadé que le positif à la fin l’emportera toujours. J’avais publié il y a quelque temps sur Facebook une de mes phrases qui disait : « Le positif est comme une semence et le négatif comme un cancer : qui devrait gagner à votre avis ? » Et j’aimerais revenir aujourd’hui sur ces quelques mots qui ont été pour moi un tournant dans ma vie, et que je voudrais essayer de bien expliquer. 

    Quand on regarde souvent les circonstances et les évènements de la vie, de notre vie à nous, de celle de nos êtres chers, mais aussi de notre pays et du monde entier, on dirait justement que cette bataille entre le positif et le négatif n’en finit pas d’être incertaine et nous fait donc beaucoup souffrir. Et l’on tombe souvent dans le piège, que j’ai déjà tenté de dénoncer à plusieurs reprises, de ces fameuses statistiques qui nous disent tantôt que le négatif va nous submerger et tantôt que le positif peut tout de même nous permettre d’espérer encore. Mais combien de crises et parfois même de moments de dépression devons-nous traverser devant cette situation !

    Je crois qu’il faut définitivement déjouer ce piège en nous et autour de nous. Car si le négatif nous fait toujours immensément souffrir, on oublie que le négatif est seulement un instrument de mort, ou plutôt de néant (car la mort véritable est en fait une étape de la vie), et qu’il ne mène nulle part. Le négatif est justement comme un cancer qui sait seulement détruire l’une après l’autre les cellules de la vie, mais qui à la fin, quand tout autour de lui est devenu néant, disparaît comme il était arrivé. Tandis que le positif est véritablement comme une semence qui n’arrête pas de porter la vie, même lorsqu’elle semble mourir sous terre, comme nous le dit la parabole bien connue. On pourrait aussi comparer le positif à un courant d’eau bienfaisante qui n’en finit pas de donner la vie sur son passage, qui semble disparaître quelque part dans la nature, mais qui en fait réapparaît toujours un peu plus loin avec une nouvelle vie et de nouveaux fruits.

    Pour se convaincre de ce simple raisonnement, il suffit de se regarder soi-même aujourd’hui. Cela fait un certain nombre d’années que je suis né. J’ai eu à affronter mille épreuves de toutes sortes, j’ai été assailli bien des fois par la peur ou l’angoisse, et pourtant je suis toujours là bien vivant et debout, au moins spirituellement, prêt à continuer mon chemin. Je suis toujours libre d’aimer et de donner ma vie pour les autres, personne ne peut m’empêcher d’être moi-même et de faire du bien autour de moi. Le bien en moi, si je l’ai laissé faire, a pu chaque jour grandir dans mon cœur et dans mon esprit. Les épreuves sont passées, pour la plupart, et elles ont même été pour moi des occasions exceptionnelles de mieux connaître la vie et de me connaître moi-même. Et si le négatif continue à m’assaillir, je dois reconnaître qu’il a changé mille fois de visages, alors que le « bien » en moi est encore le même « bien » que la vie a semé en moi dès mon enfance et qui continue à se développer.

    Il reste bien sûr le problème de la mort. Et c’est là que l’on voit la vraie victoire du positif sur le négatif. Nous venons d’accompagner récemment à sa dernière demeure une grande amie qui s’est battue pendant 30 ans contre une maladie incurable qui a fini par l’emporter. Et cette personne était tellement pleine de lumière et d’amour en elle-même que tout parlait en elle de joie, de paix et de positif. Même ses funérailles, avec l’émotion bien sûr douloureuse du moment, étaient pour les présents, comme beaucoup l’ont dit « un moment de paradis ». Car elle avait su faire de sa maladie et de sa mort une occasion de donner la vie encore plus, comme cette semence justement qui meurt pour porter encore plus de fruits…

    Alors pourquoi perdre tout ce temps à se plaindre du négatif ? Alors que nous aurions tellement mieux à faire à nous brancher continuellement sur la vie. En sachant bien sûr qu’il y a négatif et négatif. La plupart du temps il suffit de se brancher simplement sur le positif en le faisant grandir en nous et autour de nous, et le négatif finit par disparaître tout seul. Mais il y a aussi certains aspects du négatif qu’il nous faut affronter de face si l’on ne veut pas rester ensuite paralysé. Alors faisons-le, en étant en même temps le plus possible unis entre nous. Car le négatif combattu tout seul peut faire encore plus de mal. Et l’on verra finalement le négatif disparaître une fois de plus, ou bien s’il reste, comme ces guerres qui n’en finissent pas, il devient en réalité l’occasion de vivre encore plus intensément la vie qui brûle au fond de notre cœur et de la partager…


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  • (Un an après l’explosion du port de Beyrouth)

    Comme j’étais heureux ce 2 août 2020 de rentrer finalement au Liban, après avoir été retenu prisonnier en France pendant des mois à cause du covid ! J’étais tellement heureux qu’à mon arrivée j’avais pris toute une série de photos à travers mon hublot sur la gauche de l’avion : la côte libanaise qui approchait, le port de Beyrouth !!, Achrafieh, Hamra, Raoucheh… Je ne pouvais évidemment pas imaginer que ces photos du port allaient devenir « historiques ».

    Eh bien, cette année, après un mois et demi passé de nouveau dans ma famille en France, j’étais encore plus ému de retourner au Liban pour continuer à lui donner ma vie, comme le Liban m’a donné la sienne, depuis plus de 50 ans maintenant. Alors je suis fatigué d’entendre toutes ces phrases terriblement négatives qui voudraient nous dire que le Liban est fini, que plus rien ne sera comme avant depuis le 4 août 2020, etc.

    Bien sûr que le Liban souffre comme il n’a peut-être jamais souffert. Bien sûr que plus rien ne sera comme avant. Mais qu’est-ce que cela veut dire ? Chaque vie est faite d’une série d’étapes qui se succèdent de manière plus ou moins belle ou douloureuse, mais le principe de la vie, c’est justement qu’elle évolue toujours et qu’elle invente toujours quelque chose de nouveau. Et même la mort fait partie de la vie, comme cette image du grain de blé qui meurt en terre pour porter du fruit…

    Le Liban peut même mourir, au moins provisoirement, mais il n’en finira jamais d’exister. Mais qu’est-ce que c’est qu’un pays, une nation, une patrie ? C’est certainement une terre, et la terre libanaise est bien toujours là. Et pourtant il existe des peuples de ce monde qui ont perdu leur terre, en partie ou totalement, et qui continuent d’exister. Combien le peuple arménien en est-il une démonstration merveilleuse.

    Car un pays, au-delà de sa terre, c’est surtout un peuple, une âme, une culture et des valeurs que personne ne pourra jamais lui voler. Je sais combien il est triste en ce moment de voir partir à l’étranger toute une partie de la jeunesse libanaise. Ce ne sont pas des traitres à leur patrie, ce sont au contraire des jeunes pleins de vie qui savent que pour l’instant c’est ailleurs qu’ils parviendront le mieux à exprimer tous leurs talents, et ces talents libanais ne mourront jamais.

    Vous ne savez peut-être pas que, dans ma famille bien française, nous avons découvert avec surprise, en effectuant des recherches dans notre arbre généalogique, que nous avions un ancêtre qui était un esclave noir libéré qui a épousé en Guyane française, il y a un peu plus de 200 ans, une de nos arrière-grand-mères, venue de la région de Toulouse et émigrée justement en Guyane. Quoi de plus triste pour un peuple que d’être déporté en esclavage loin de sa terre. Et je suis ému chaque fois que je pense maintenant que cet ancêtre africain continue en moi à faire du bien à l’humanité chaque fois que je donne ma vie pour quelqu’un, au Liban ou ailleurs.

    Et, à ce sujet, on pourrait reprendre cet exemple merveilleux de l’âme africaine qui continue à vivre par exemple dans le jazz ou le sport de l’Amérique du Nord, apportant toute une culture qui n’en finit pas d’illuminer l’humanité. Tous ces peuples des pays d’immigrations comme le Brésil, l’Argentine, le Canada ou l’Australie, sont faits d’un amalgame d’autres peuples qui continuent à vivre en eux…

    Alors, je vous en prie, ne me dites plus que le Liban ne se relèvera plus de ces dernières blessures. Tant qu’il y aura des Libanais pour vivre ici ou ailleurs les valeurs de l’âme libanaise, tant qu’il y aura des personnes comme moi qui sont devenues amoureuses du Liban et qui en vivent, elles aussi, les valeurs à leur façon, le Liban existera toujours. Il existera sans doute en gémissant, en pleurant, mais en se relevant de nouveau après chaque coup reçu. La maladie est toujours suivie d’une convalescence. La mort est toujours suivie d’une nouvelle vie. C’est tellement triste de voir mourir quelqu’un qu’on aime, mais on sait aussi que sa vie continuera en nous et dans ses descendants, sans compter bien sûr cette vie dans l’au-delà qui nous attend. Mais même sans la foi en Dieu, la foi en l’humanité est déjà une réponse si bouleversante au drame immense que nous sommes en train de vivre.

    Bien sûr que nous sommes en ce moment fatigués, déprimés, exténués. Nous ne voyons même plus la fin de notre tunnel. Mais cela ne veut absolument pas dire que la lumière a fini de briller pour toujours. Le tunnel est une étape de la vie. L’espoir et l’espérance ne mourront jamais, sinon nous devrions tous nous suicider sans attendre. Et chacun de nous porte en lui l’âme de l’humanité en passant par l’âme du peuple qui l’a fait naître et de tous les autres peuples qui l’ont accueilli au cours de sa vie. Et ce merveilleux voyage sur la terre, avec toutes ses épreuves, n’en finira jamais d’être un immense cadeau qui nous remplit d’émotion et de reconnaissance, chaque fois que nous y pensons profondément…

     


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  • J’ai publié récemment une phrase qui disait : « La confiance est contagieuse, elle se propage comme la flamme qui va d’une bougie à l’autre, illumine tout sur son passage et réchauffe les cœurs… » Une de mes meilleures lectrices commente : « Si seulement on pouvait toujours avoir confiance. » Comme c’est beau et difficile en même temps d’avoir confiance, notre amie a bien raison.

    Mais tâchons quand même d’y voir plus clair. J’ai essayé une fois de partager mon expérience qui m’a montré qu’il ne s’agit pas tellement d’ « avoir confiance », mais de « faire confiance » à quelqu’un. Quand « j’ai confiance » en quelqu’un, c’est en général parce que je le connais bien et qu’il m’a prouvé depuis longtemps par son amitié ou sa bienveillance qu’il sera toujours prêt à être à mes côtés, à m’aider, à me soutenir, à me rendre service, comme moi-même certainement je le ferais avec lui. « Avoir confiance » se base donc le plus souvent sur les beaux moments d’une relation qui dure peut-être depuis bien longtemps. Et l’on voudrait pouvoir être sûr d’avoir ainsi confiance en tout le monde et l’on voit que malheureusement c’est impossible. Alors que faire ? Se résigner à la présence chaleureuse de quelques amis bien rares et voir le reste du monde avec méfiance ou soupçon ? Comme la vie risque alors d’être bien triste et décourageante !

    La deuxième possibilité de vivre la confiance est alors de « faire confiance » à quelqu’un. C’est évidemment beaucoup plus difficile. Car c’est chaque fois une sorte de saut dans le vide, un acte de foi que l’on fait vis-à-vis de l’autre en prenant des risques, car on n’a encore très peu d’assurance que tout va bien se passer. Mais n’est-ce pas ce que nos parents ont dû faire avec nous quand nous avons grandi ? N’est-ce pas ce que le directeur d’une entreprise doit faire avec un nouvel employé ou simplement ce qu’un mari et une femme commencent à apprendre lorsque débute leur vie ensemble sous le même toit ?

    La confiance devient alors un choix de vie. On décide de s’y jeter en général, comme j’ai eu le courage de le faire moi-même, quand on a rencontré des personnes qui nous ont changé la vie parce qu’elles nous ont vraiment fait confiance au-delà peut-être des premières apparences un peu difficiles ou compliquées. C’est que chacun de nous est au départ comme une plante un peu desséchée qui a seulement besoin qu’on l’arrose de temps en temps, ou brûlée par le soleil et qui a besoin qu’on la mette plus souvent à l’ombre…

    Faire confiance à l’autre, c’est l’accueillir d’abord comme il est, sans essayer tout de suite de l’enfermer dans nos catégories, et voir avec délicatesse comment lui apporter justement « l’eau » ou « l’ombre » dont il aurait besoin. Puis attendre le bon moment pour lui confier une tâche déjà importante qui va lui montrer que nous croyons en lui, à sa bonne volonté et à ses capacités. Et s’il se trompe, lui montrer qu’il n’y a rien de grave, et lui raconter humblement combien de fois nous-mêmes avons fait des gaffes avant de savoir nous débrouiller dans tel ou tel travail ou tel type de relation.

    Le miracle est alors que la personne ainsi regardée et traitée avec respect et amour, qui sont souvent si rares dans les relations sociales ordinaires, va peu à peu se transformer et tout faire pour répondre à cette confiance nouvelle qui est pour elle une heureuse surprise. Quand on accepte de prendre de tels risques, l’expérience nous dit que sur cent fois, on aura peut-être quelques accidents, mais combien de nouveaux amis qui nous feront confiance à leur tour et la confiance sera vraiment contagieuse.

    C’est simple, ou bien la confiance reste une assurance intéressante basée sur le passé mais qui demeure dans un cercle clos qui ne va pas loin, ou bien elle devient un chemin qui se fraye un passage dans la bataille de la vie, où l’on s’écorche de temps en temps sur des obstacles imprévus, mais où les horizons et le cœur s’élargissent tellement qu’on ne peut plus revenir en arrière. Au point que si, au départ, c’est nous qui cherchions les gens pour créer des ponts avec eux, ce sont eux maintenant qui nous cherchent de tous les côtés comme un boomerang de réciprocité qui veut dire alors que la confiance a gagné sa bataille… même si chaque jour elle est encore à recommencer. Et le premier fruit de tout cela c’est que nous-mêmes nous nous sentons tellement plus libres avec tout le monde…


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