• Besoin d'aimer ou d'être aimé?

    J’ai relu récemment un de mes articles, publié le 22 octobre 2017 dans la rubrique « Au bout de soi-même » et qui s’intitulait « J’ai seulement besoin de t’aimer ! » Ce n’est pas un mauvais article. De nombreuses personnes m’ont remercié de l’avoir écrit. J’ai essayé alors d’expliquer comment l’amour porte en lui-même sa force intérieure, sans devoir attendre nécessairement la réponse de l’autre. Car conditionner notre amour à cette réponse de l’autre risque de le rendre finalement faible et dépendant des caprices de cet autre et cela amène souvent à de grandes déceptions.

    Mais je me disais maintenant que cette affirmation un peu forte : « J’ai seulement besoin de t’aimer ! », pouvait être comprise par l’autre dans le sens qu’au fond je suis autosuffisant et que je n’ai pas besoin de son amour, et ce serait une bien vilaine conclusion. Alors comment résoudre ce problème ?

    Nous sommes ici dans la rubrique « Reflets du paradis » et nous allons partir du paradis. Car le seul véritable amour est celui qui se vit en Dieu, Père, Fils et Esprit de toute éternité. Un amour de réciprocité infinie, dans lequel chacun accueille l’autre et se donne à lui, pénètre dans le cœur de l’autre et se laisse à son tour pénétrer par lui, dans ce miracle de l’amour trinitaire où chacun se fait entièrement un avec l’autre et reste pourtant totalement lui-même…

    C’est cet amour-là que Dieu a semé dans le cœur de l’homme. Mais l’homme a perdu en route la clé de l’amour et il a transformé son paradis en enfer. Heureusement que Jésus est venu parmi nous sur la terre pour vivre cet amour comme un homme normal et nous montrer le chemin du ciel sur la terre, que nous ne savions plus trouver.

    Alors, de quoi ai-je besoin lorsque j’aime ? Ai-je besoin d’abord d’aimer ou d’être aimé ? Ai-je besoin d’être rempli d’amour en moi-même que je peux partager avec les autres, ou ai-je besoin de recevoir cet amour des autres ? En fait tout cela à la fois. Car, pour aimer, je dois d’abord être branché à la source divine de l’Amour. Et je trouve cet Amour en Dieu qui me le donne et qui le sème en moi. Mais où Dieu va-t-il me le donner et le semer en moi ? Là est la question véritable.

    Au cours des siècles de vie du christianisme et de la plupart des religions on a fait le plus souvent de ce ressourcement à la fontaine de Dieu une affaire personnelle, individuelle, où chacun se débrouille plus ou moins tout seul, même si c’est avec une certaine communion avec les autres.

    Nous cherchons cette source de l’Amour dans la prière au fond de notre cœur, dans la présence réelle de Dieu dans l’eucharistie ou la Parole, dans la vie de service auprès de nos frères et en particulier des plus pauvres et des plus souffrants. Mais nous avons encore très peu appris à nous brancher sur la source de l’Amour qui est présente aussi dans le cœur du frère et au milieu de ces frères et de ces sœurs qui s’aiment et qui sont unis avec Jésus au milieu d’eux.

    Quand on en arrive à se recueillir devant la présence de Jésus dans le cœur du frère et au milieu de nous, comme on se recueille devant le tabernacle où « vit » Jésus Eucharistie, comme Chiara Lubich nous l’a si souvent indiqué, tout change…

    A ce moment-là, j’ai bien sûr besoin d’aimer l’autre sans cesse, parce que l’amour divin que Dieu a semé en moi ne pourra jamais s’arrêter, s’il est un amour réel, à la fois humain et divin. Mais pour qu’il ait la force de ne jamais s’arrêter, il faudra qu’il ne se débranche jamais de la source divine de l’Amour.

    Alors, j’aurai toujours besoin de t’aimer, sinon cela voudrait dire que l’amour en moi est en train de faiblir ou de disparaître. Mais j’aurai aussi besoin que tu m’aimes dans la réciprocité, car toi que j’aime et qui m’aime en même temps, tu es aussi une des sources à laquelle je peux toujours puiser cet amour. Cela donne le vertige de voir comment Dieu nous a fait un tel cadeau, nous a donné une telle responsabilité. Lui qui aurait pu dire : « Aimez-moi ! », nous a dit pourtant : « Aimez-vous les uns les autres ! » Car il savait que nous avons désormais en nous la possibilité d’être une source de Dieu pour le frère. Alors bien sûr que j’aurai besoin de toi pour toujours. Mais ce sera un besoin qui me laissera, en Dieu, toujours libre. Car si tu t’arrêtes un jour de m’aimer, cela me poussera seulement à t’aimer encore plus pour que tu retournes, et si moi, j’ai aussi mes moments de faiblesse, tu trouveras en Dieu la force de m’aimer encore plus, car désormais nous ne pourrons plus jamais vivre sans cette réciprocité trinitaire qui nous ouvre déjà la porte du ciel sur la terre !


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