« Votre Père qui est aux cieux ne veut pas qu’un seul de ces petits soit perdu. » (Mt 18,14)

Encore une phrase qui peut changer complètement notre vie, si on la comprend vraiment. Mais je vais prendre un risque avec vous. Jésus ne vient-il pas de dire que nous devons devenir comme des petits enfants si nous voulons entrer dans son Royaume ? Et cela ne vous rappelle pas ce passage extraordinaire du chapitre 11 de Matthieu que nous avons déjà médité, il y a quelques temps : « Père, Seigneur du ciel et de la terre, je proclame ta louange : ce que tu as caché aux sages et aux savants, tu l’as révélé aux tout-petits. Oui, Père, tu l’as voulu ainsi dans ta bonté. » (Mt 11, 25-26)

Alors je vais vous proposer de prendre cette nouvelle phrase d’aujourd’hui comme une clé de lecture qui va nous illuminer tout l’Evangile de Matthieu et toute la mission de Jésus sur la terre. Le nom de Jésus ne veut-il pas dire justement : « le Seigneur sauve » ? Jésus n’a-t-il pas dit lui-même qu’il est venu pour les malades et les pécheurs ? Et quand on voit que cette nouvelle phrase se place juste à la fin de la parabole du berger qui quitte tout son troupeau pour chercher une brebis égarée « Et s’il parvient à la retrouver, amen, je vous le dis : il se réjouit pour elle plus que pour les quatre-vingt-dix-neuf qui ne se sont pas égarées. » Vous voyez maintenant ce que je vois ?

On va me dire que dans l’Evangile de Matthieu, il y a aussi beaucoup d’autres phrases terribles qui peuvent nous faire peur, sur le jugement, sur le risque de finir dans la géhenne, etc… Eh bien, comme un petit enfant, nous allons oublier tout le reste et nous dire que Jésus et le Père ne peuvent pas nous tromper et dire une chose pour se contredire la minute d’après. Si leur amour est vrai, l’amour d’un Dieu qui nous aime tellement qu’il est en train de donner sa vie pour nous, c’est que désormais nous devons être sûrs que Dieu va utiliser toute la puissance de son amour pour qu’aucun de nous ne se perde.

Le reste, on va le laisser maintenant aux « sages et aux savants », à ceux qui voudraient comprendre tous les raisonnements théologiques, moraux ou spirituels de la religion. Nous, nous allons pour un instant nous plonger dans cette vérité inouïe qui nous dit que Dieu, le Seigneur de l’univers, notre créateur, celui qui nous a donné la vie, est prêt à tout pour que nous entrions avec lui dans la béatitude de l’amour éternel entre le Père et le Fils dans l’Esprit. Nous pourrons être exposés à tous les dangers du monde, nous pourrons faire toutes les bêtises de l’univers, le Père avec le Fils et l’Esprit seront toujours là à veiller à ce qu’aucun de nous ne se perde en route.

C’est une vérité tellement évidente quand on la contemple tout à coup comme la lumière de la transfiguration sur le Thabor, qu’elle ne devrait plus nous quitter. Comme nous sommes convaincus que le sang coule dans nos veines, même si nous ne le sentons pas toujours, nous pouvons être convaincus maintenant jusqu’à la fin de nos jours que nous sommes pour Dieu une priorité, la priorité absolue qui donne en fait pour lui un sens à tout le projet de la création de l’univers. Cela donne le vertige, mais c’est une conviction définitive qu’un « tout-petit » comme chacun d’entre nous pourrait laisser entrer au fond de son esprit et de son cœur jusqu’à la fin de son voyage sur cette terre…