• Peur du vide

    (Encore sur la miséricorde) 

    Oui, la nature a peur du vide. C’est une loi que nous rencontrons à chacun de nos pas, depuis l’eau de pluie qui se glisse dans toutes les fentes de nos maisons ou de nos habits, jusqu’à la lumière qui emplit tous les recoins de ma chambre dès le lever du soleil, jusqu’à la circulation chaotique des voitures dans une grande ville…

    Que ce soit positif ou négatif, c’est un fait indéniable, parfois heureux, parfois gênant, mais on ne peut pas y changer grand-chose. Il faut tout de même dire qu’en général nous sommes bien contents que la nature ait horreur du vide car sinon il y aurait des manques et des trous et des oublis partout et la continuité est souvent la garantie de la stabilité et de la paix.

    Là où cela pose problème, c’est au niveau de l’esprit et du cœur de l’homme. On aimerait parfois s’arrêter de penser un moment pour oublier ses soucis ou les problèmes du lendemain, mais notre cerveau n’est pas capable de se reposer un instant. Comme une radio éternellement allumée, il fonctionne jour et nuit, nous poursuit même durant le sommeil avec des aventures dont on se serait parfois bien passé.

    Notre cœur aussi a besoin de ressentir et de se passionner. S’il n’est pas content, c’est qu’il est triste ou mélancolique. S’il n’aime plus, c’est peut-être qu’il passe par une crise de jalousie, ou qu’il est déçu, qu’il se remplit de rancœur, d’amertume ou même de haine ou de colère, mais notre cœur doit s’occuper. Il ne sait pas ce que voudrait dire rester neutre ou indifférent pour quelque temps.

    Tout cela va nous servir maintenant de leçon pour reprendre encore notre sujet de la miséricorde. Lorsqu’éclate un conflit avec quelqu’un qu’on aime, notre cœur doit vite décider et choisir s’il veut pardonner ou pas. Car le cœur a besoin de savoir ce qu’il doit faire, il ne peut pas rester impassible devant le problème qui vient d’éclater.

    Nous avons donc deux solutions devant nous (même si l’on sait bien que la réalité de chaque jour n‘est jamais complètement ou blanc ou noir). La première solution, c’est de vite pardonner, mettre tout son esprit et son cœur à trouver au mal subi le plus possible de circonstances atténuantes. Probablement notre ami, notre frère, notre sœur, qui que ce soit, n’a pas dû se rendre compte de ce qu’il faisait. Ou bien il avait un gros problème qui l’a perturbé tout à coup et lui a fait faire n’importe quoi. Et toute cette vie de relation si belle pendant des années se bloquerait maintenant pour une bêtise ? Et d’ailleurs moi aussi j’en ai fait des bêtises et j’ai été bien content quand l’autre a continué à m’aimer comme avant, malgré tout. Alors, ce n’était qu’un accident de parcours. La blessure va être vite refermée et cicatrisée. Une belle conversation pour s’expliquer en tête à tête ou même en présence d’autres amis si cela peut aider, et tout va recommencer comme avant. Nous allons nous revoir avec des yeux neufs comme si rien ne s’était passé. L'esprit et le cœur sont intacts.  On a frisé la catastrophe. Mais rien de grave. Au contraire le souvenir de cet accident évité de justesse va être l’occasion de rire ensemble de nos bêtises et l’humour sur soi-même consolide encore l’amitié…

    La deuxième solution, guidée peut-être par la panique, va être de m’arrêter sur le tort subi parce qu’il est inadmissible. Je me sens trahi. Je n’arrive pas à comprendre pourquoi mon ami m’a traité de cette façon. Mais au fond cela fait quelque temps qu’il ne me regarde plus comme avant, comme si notre relation ne l’intéressait plus. Et les raisonnements s’enchaînent alors l’un après l’autre à une vitesse vertigineuse, faisant d’un incident isolé une véritable « guerre mondiale » où tout s’écroule. L’esprit déborde alors rapidement sur le cœur. L’amitié ou l’amour ressenti auparavant en pensant à cette personne chère devient un refus terrible, d’autant plus qu’un tel acte de la part d’une personne chère fait encore bien plus mal que si cela venait d’un inconnu. Le cœur est pris alors dans une véritable tempête ou l’amour est vite remplacé par la déception, la rancœur ou même le désir de se venger. Pauvre cœur qui se laisse emporter, car il a besoin de vivre, de ressentir des passions et peu lui importe si ces passions sont positives ou détruisent tout sur leur passage, ce n’est pas son problème.

    Tout cela est bien sûr une caricature. La réalité est toujours beaucoup plus complexe. Mais ce qui est sûr c’est que notre vie sera beaucoup plus belle lorsque nous aurons réussi à vivre vraiment la miséricorde avec tout le monde. Un grain de poussière dans l’œil peut gâcher toute une journée. Une seule personne avec laquelle nous ne sommes pas en paix et voilà toute notre vie qui devient triste. Notre esprit et notre cœur ont eux aussi besoin d’unité. On ne peut pas se contenter de vivre la miséricorde avec certains et avec d’autres non. Si je crois aimer ma famille et déverser ma rancœur sur mes collègues de travail, un jour ou l’autre je finirai par faire déborder mes sentiments négatifs sur ma famille elle-même. C’est cela le problème de la miséricorde et en même temps sa beauté. Avec elle, c’est ou tout ou rien. Je sais que c’est difficile, mais si on n’y arrive pas, il faut se faire aider, car on doit être convaincu qu’un jour ou l’autre la miséricorde gagnera la bataille au fond de notre cœur. Sinon c’est nous qui allons y perdre et y perdre gros…

     

     


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  • Commentaires

    1
    Hayat
    Mardi 5 Avril 2016 à 10:38
    Je suis contente de lire : si on n'y arrive pas , il faut se faire aider!Et j'ajouteraisavoir par qui se faire aider...
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