• Aujourd’hui nous fêtons au Liban, avec nos amis, l’arrivée au ciel il y a deux ans de Mgr Armando. Mgr Armando Bortolaso, religieux salésien italien qui a servi toute sa vie les peuples du Moyen Orient, où il est arrivé à l’âge de 18 ans pour finir comme évêque latin de Syrie, puis évêque émérite retiré dans sa communauté salésienne du Liban, avait 92 ans. Les deux dernières années de sa vie, il était entre la vie et la mort et il n’a cessé de donner sa lumière, sa paix, sa sagesse et son amour concret à une foule de gens qui accouraient chez lui pour le réconforter et qui sortaient de sa chambre bouleversés jusqu’aux larmes et désireux de commencer comme lui à vivre le paradis sur la terre.

    C’est cela que faisait simplement Mgr Armando depuis déjà de nombreuses années, de toutes ses forces et de toute son âme : il essayait de vivre le paradis sur terre, ou plus exactement de laisser le paradis vivre en lui et à travers lui. Il n’avait plus d’autre but dans la vie. Il ne se souciait même plus s’il allait mourir dans une semaine, un mois, un an. Ce qui l’importait c’était de donner sa vie et son amour jusqu’au dernier souffle à ceux que Dieu lui envoyait.

    Je ne sais pas si j’ai rencontré dans ma vie beaucoup d’autres personnes comme lui qui avaient compris l’essentiel et qui étaient surtout capables de mettre cet essentiel en pratique. Et cet essentiel pour lui n’était pas si compliqué. C’était simplement la vie de la Trinité que Jésus est venu nous apporter sur la terre et dont est rempli l’Evangile, quand on sait lire ce qui y est écrit et, plus encore, lire entre les lignes.

    Pour Mgr Armando, la vie c’était accueillir et se donner dans la pleine réciprocité, comme le Père et le Fils le font de toute éternité au ciel dans l’Esprit. Accueillir ceux qui venaient à lui et leur donner sa vie, son âme, son attention, son écoute, son expérience, son affection au-delà de la fatigue, au-delà de ses limites, comme s’il n’avait rien d’autre à faire. Les gens sortaient de chez lui remplis de lumière comme Moïse descendant de la montagne après avoir rencontré Dieu et souvent bouleversés pour toujours.

    Et ce qui était le plus extraordinaire, c’est que ce géant de l’amour et de la spiritualité était capable de se faire si petit devant chacun qu’il était tour à tour pour nous un père, un frère et même un fils. Il nous faisait exister, il faisait sentir à chacun qu’il avait un trésor caché au fond du cœur. Et il continuait à répéter à chacun sans se lasser sa phrase magique : « L’important, c’est de ne jamais plus descendre du train. » Et le train, c’était ce paradis que chacun de nous a pu connaître au cours de sa vie en essayant de mettre en pratique l’Evangile, mais que souvent les circonstances de la vie nous font oublier.

    Non, nous disait-il avec une extraordinaire force de conviction, ne te laisse jamais impressionner par tout ce qui peut t’arriver dans la vie de difficile, de douloureux, d’incompréhensible. Tu n’as pas la force d’aller de l’avant, tu es pauvre et faible, et découragé ? Ne te regarde pas. Pense à Jésus qui t’attend dans chaque prochain. Tu es tombé et tu n’arrives plus à avancer ? Jésus t’aime comme tu es, il ne se scandalise jamais d’aucun de nous. C’est lui qui nous a créés et qui nous aime. Il te demande seulement de ne plus jamais descendre du train et de te laisser porter. Et si jamais tu es quand même descendu du train en route, même cela n’est pas bien grave, Jésus dans sa miséricorde est toujours là à t’attendre…

     


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  • On n’en finirait pas de parler de la réciprocité. Nous allons tout de même essayer de conclure, au moins provisoirement, notre petite recherche. Nous avons donc découvert que le secret pour une belle et vraie réciprocité, c’est d’essayer d’abord d’être moi-même, pour l’autre, cette réciprocité qui peut lui donner tellement de joie et de bonheur… et de laisser l’autre totalement libre de répondre quand il voudra et comme il voudra, car l’amour ou l’amitié véritables ne peuvent jamais s’enfermer ou se posséder.

    Facile à dire, mais toute notre éducation, ce que nous lisons ou entendons à longueur de journée sur les réseaux sociaux, semble nous pousser au contraire. Voyez par exemple ce qu’affirme Dominique Blondeau, artiste contemporaine : « Dans l’offrande de soi-même ne peut naître le réciprocité : on donne pour recevoir. » Mais n’a-t-elle donc jamais eu la joie de donner pour donner ? Et voyez encore ce proverbe : « Une relation, c’est la réciprocité entre deux personnes. L’une ne doit pas tout donner et l’autre tout prendre. » Ce pauvre monde qui se base sur une réalité et son contraire pour équilibrer la vie !

    Bien sûr qu’on ne peut pas passer son temps à donner, on finirait par ne plus avoir de force ou d’énergie, on doit bien se reposer en chemin. Et c’est là que la réciprocité va encore nous offrir la solution. Je ne me repose pas du don en prenant quelque chose à l’autre. Je me repose du don en accueillant l’autre de tout mon cœur. Prendre est le « contraire » de donner, tandis qu’accueillir est le « réciproque » de donner. La différence est là. Dans la Trinité, le Père et le Fils ne s’amusent pas à prendre quelque chose de l’autre tour à tour, ils passent leur temps, si l’on peut ainsi parler de Dieu, à s’accueillir et à se donner l’un à l’autre totalement dans l’Esprit.

    Quand je passe ma journée et ma vie à me donner à l’autre de tout mon cœur, puis à accueillir le don de l’autre quand c’est son tour à lui de donner ou de se donner dans la réciprocité, tout change, tout devient plus limpide, passionnant, surprenant. Chaque relation est alors comme une aventure qui se renouvelle sans fin, avec tous les problèmes et les souffrances que nous rencontrons évidemment chaque jour, mais ces problèmes et ces souffrances sont illuminés, sublimés, transformés par cette réciprocité qui va et qui vient et qui empêche la vie de se bloquer à chaque pas sur le premier obstacle venu !


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  • Vous savez que nous avons une chance extraordinaire, cette année ? C’est celle de plonger vraiment dans le cœur du mystère de Noël qui est en même temps le cœur du mystère de l’Amour de Dieu. Et cela justement grâce aux difficultés que nous sommes en train de vivre.

    C’est le moment ou jamais de nous rappeler que Dieu est tellement rempli d’amour en lui-même que cet amour déborde de partout. Il ne peut pas le garder pour lui, il a voulu le distribuer à toute la création qu’il a inventée. Il a voulu donner son amour à tout l’univers et il s’est créé l’humanité comme la perle de cet univers à qui il pouvait transmettre toute la flamme de sa vie divine.

    C’est cela la vie de Dieu : donner la vie et la faire naître et renaître sans relâche autour de lui. Et c’est cela le sens de Noël : Noël c’est la naissance ou la renaissance de la vie. Noël, c’est l’espoir que toute épreuve, toute souffrance aura un jour une fin. Car Noël, c’est déjà le printemps après l’hiver, c’est le calme retrouvé après la tempête, c’est le ciel bleu après les nuages. Noël, c’est le feu qui renaît toujours sous la cendre…

    Alors, si cette année notre Noël voulait dire tout simplement essayer de participer à cette vie divine que Dieu a mise en nous et distribuer autour de nous, plus que jamais, l’amour que Dieu a mis dans notre cœur. Si nous passions les jours qui entourent Noël à chercher auprès de nous tous ceux qui ont perdu l’espoir et qui ont besoin d’une nouvelle naissance.

    Si Noël n’était pas tellement un beau cadeau qui fait toujours plaisir, mais une lumière d’amour, une consolation pour ceux qui pleurent, un sourire, un peu plus de tendresse, de pardon, de compassion que nous pourrions partager avec ceux que nous rencontrons. En y mettant l’intention de privilégier d’abord ceux qui en ce moment n’ont même plus Noël dans le cœur, pour les aider à y croire encore.

    Alors ce sera sans doute le plus beau Noël de notre vie. Car les cadeaux finiront un jour ou l’autre par s’abîmer ou se casser, mais l’amour de Dieu versé dans les cœurs est une semence qui ne mourra plus jamais si nous continuons ensuite à vivre en plus entre nous cet amour du ciel que Jésus est venu il y a 2000 ans nous apporter sur la terre !


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  • Quelques phrases recueillies au cours de ma recherche, qui peuvent nous aider à mieux comprendre encore : « Le secret d’un amour réussi, c’est la réciprocité. »  « Le secret de l’amour ne tient qu’à un mot : réciprocité. » De Michel Tournier : « La grande différence entre l’amour et l’amitié, c’est qu’il ne peut y avoir d’amitié sans réciprocité. » De Francesco Alberoni : « L’amour n’est pas forcément un sentiment réciproque. L’amitié au contraire, me semble-t-il, requiert toujours de la réciprocité. Je ne puis être l’ami de quelqu’un qui n’est pas mon ami. » Et enfin d’Elfriede Jelinek : « En amour la réciprocité est finalement exceptionnelle : la plupart du temps on est seul à aimer, et l’autre ne songe qu’à fuir aussi loin que ses pieds le portent. »

    Le sujet est ici surtout l’amour et l’amitié. Il faudrait des livres et des livres pour en parler en profondeur. Je vais donc me contenter de donner seulement une ou deux pistes de réflexion. La première, c’est que la réciprocité est vraiment le sel qui donne du goût à toutes nos relations. C’est finalement la réciprocité ou son absence qui nous font dire si l’amour ou l’amitié sont réussis ou non. On ne peut pas imaginer une relation de véritable confiance sans la réciprocité.

    Je ne suis pas d’accord personnellement avec cette distinction entre l’amour et l’amitié. Si nous revenons à notre principe du début, où nous disions que nous avons été créés à l’image de ce Dieu Amour qui vit en Lui-même la réciprocité la plus totale entre le Père et le Fils dans l’Esprit, tout amour qui n’est pas réciproque est au fond un amour tronqué, incomplet, blessé, malade. Nous sommes faits pour aimer et être aimés en retour, et c’est là sans doute la beauté merveilleuse de l’humanité.

    Bien sûr que l’expérience de chaque jour est souvent difficile, comme celle de notre auteure qui semble bien pessimiste en disant que la réciprocité en amour est exceptionnelle. Mais c’est ce que j’appelle ici un amour malade. Je continue à aimer quelqu’un qui ne m’aime pas ou qui ne m’aime plus. Le monde est rempli de situations de ce genre, parce que justement, c’est un monde blessé, malade ou en convalescence.

    Et c’est là que la réciprocité va être le remède pour guérir. Mais à condition de la prendre dans la bonne direction. Et la bonne direction c’est celle d’un amour qui fait de l’autre le centre de sa vie. Quand je vis pour l’autre, quand je « vis l’autre », quand le centre de ma journée, de mon attention c’est me demander quelle réciprocité concrète, active, bienveillante, je peux être pour l’autre, alors toutes les portes de l’amour s’ouvrent devant moi. Car l’amour qui pense d’abord à l’autre finit presque toujours par toucher le cœur de cet autre. Et si certains sont tellement blessés qu’ils ne se laissent pas faire, ce ne sera finalement que quelques cas parmi toutes les personnes que nous connaissons et que nous côtoyons chaque jour.

    Quand l’amour ne trouve pas de réciprocité, c’est le plus souvent parce qu’il exige d’abord de l’autre cette réciprocité avant d’être le premier à la lui donner. Cela veut dire que le centre de mon amour, c’est moi, dans le plus parfait sens de l’égoïsme, alors bien sûr que la réciprocité et l’amour ne vont pas aller bien loin. Tout est là : dans la bonne direction ou son contraire, dans l’amour qui se donne ou celui qui veut posséder l’autre. Et quand on se donne sans rien attendre de précis, en laissant l’autre totalement libre, on peut s’attendre à tellement de belles surprises… (Encore à suivre)


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  • J’imagine que mes derniers articles de recherche sur la réciprocité ont créé un peu de confusion dans mes lecteurs. Puisqu’il est si facile de détourner la réciprocité de son but, comment être sûr que la réciprocité que je vis avec quelqu’un d’autre est une vraie réciprocité ?

    On pourrait en discuter pendant des heures. C’est pour cela que je vais revenir tout de suite à notre source, celle de la Trinité qui vit la réciprocité au paradis. Car c’est cela l’ADN de l’humanité. Quand nous disons que nous avons été créés à l’image de Dieu, ce n’est pas chacun de nous tout seul, isolé dans son coin, qui est une image où Dieu se reflète, mais c’est la relation d’amour réciproque entre deux ou trois ou plus, ouverte à l’infini, qui peut donner une idée du miracle d’amour qui brûle au cœur de la Trinité.

    Et le secret de tout cela c’est que le centre de la vie du Père est le Fils dans l’Esprit, et le centre de la vie du Fils est le Père dans l’Esprit. C’est aussi simple et aussi terriblement difficile à mettre en pratique. Tant que le centre de mon amour est moi-même, mon amour ne décollera jamais et il ne connaîtra jamais la réciprocité. Lorsque j’apprends à sortir de moi et à faire de l’autre que j’aime le centre de ma vie, c’est alors que la réciprocité commence à ouvrir timidement sa fleur et son parfum. Cela ne se fait pas du jour au lendemain. Mais quand on y a pris goût ne serait-ce qu’un peu, mais réellement, on ne peut bientôt plus s’en passer.

    Et je comprends alors que je ne n’ai plus à attendre la réciprocité de l’autre, mais à me préoccuper seulement d’être une belle réciprocité pour cet autre que j’ai commencé à aimer. Et laisser ainsi l’autre libre d’inventer à son tour pour moi sa réciprocité à lui qui sera toujours une belle surprise parce que l’autre a aussi en lui la beauté de la différence qui me manque et m’enrichit chaque fois.

    Quand on part ainsi dans la bonne direction, tous les pièges de la fausse réciprocité sont vite déjoués. Mais voyez plutôt ces quelques phrases trouvées sur les réseaux sociaux. « L’amour veut certitude et réciprocité, d’où sa difficulté à aimer. » (Angélique Planchette) L’amour véritable ne veut rien pour soi, ni certitude, ni réciprocité, il veut seulement donner à l’autre cette certitude et cette réciprocité sans attendre rien pour soi. Alors il est bien sûr toujours difficile d’aimer, mais cela devient tellement beau que la difficulté ne fait plus peur.

    Une autre citation : « Dans une relation, assurez-vous que les sentiments soient réciproques. Il est inutile de continuer de donner ce que vous ne recevez pas, l’amour est un chemin qui doit aller dans les deux sens. Si ce n’est pas le cas, réajustez-vous car vous n’allez pas dans la bonne direction. » Si on s’arrêtait là, on ne se lancerait jamais dans aucune relation d’amour et d’amitié et l’on resterait enfermé toute sa vie à la maison.

    « La réciprocité oblige celui qui agit sur autrui à subir cette même action, et celui qui subit à agir…. On peut assimiler la réciprocité à une sorte de justice humaine. » (Dans un site de commentaires à la Bible) Ici aussi tout est pris à l’envers. Si la réciprocité oblige, cela voudrait dire que nous ne sommes pas libres. Même la règle d’or dont nous parlions récemment serait une sorte de condamnation à vivre en pensant à l’autre en se résignant parce qu’on y est bien obligé : comme la vie serait triste !

    Je préfère terminer notre page d’aujourd’hui par la phrase sympathique d’une internaute anonyme : « Le véritable amour se moque de la réciprocité. » La personne qui parle avec cette enthousiasme (si je l’ai bien comprise) a trouvé le secret de la réciprocité. Elle s’en moque dans le sens qu’elle ne l’attend même plus, elle ne se préoccupe pas, elle ne s’agite pas quand la réciprocité tarde à venir, car elle pense seulement à aimer l’autre et à être pour cet autre la plus belle réciprocité qu’elle pourra inventer en ce moment. Car la réciprocité ne se répète jamais, elle est chaque jour nouvelle, fascinante, surprenante, elle est imprévisible justement parce qu’elle dépend totalement de la liberté de l’autre. Je ne pourrai donc jamais posséder la réciprocité de l’autre, mais je lui fais confiance à l’avance, même si sur cette terre, il peut y avoir des accidents de parcours. Mais mon amour est libre de croire que la réciprocité de l’autre est toujours prête à jaillir, si je lui laisse justement tout l’espace pour le faire…

     


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