• Les dangers de la miséricorde (2)

    J’avoue que je suis un peu déçu de ne pas avoir reçu plus d’objections à mon article sur les « dangers de la miséricorde ». Car moi-même je n’étais pas satisfait. On ne peut pas parler en profondeur d’un tel sujet en une seule page de blog.

    Alors je vais essayer moi-même d’imaginer les objections, les problèmes que cause la miséricorde. Beaucoup de gens sont méfiants avec la miséricorde. Souvent c’est parce qu’ils ont essayé, cela a eu un effet négatif et ils se sont bloqués. Ou bien on parle de la miséricorde de façon théorique : « Moi jamais je ne pourrais pardonner à l’assassin d’un être cher ! » Ou bien : « J’aimerais bien, mais pardonner à celui-ci après tout le mal qu’il m’a fait, je n’y arriverai jamais. » Ou bien on cherche des excuses, en disant que la miséricorde empêche d’appliquer la justice et que cela peut avoir des conséquences terribles pour l’avenir. Et si on pardonne à quelqu’un qui a fait du mal, il ne va jamais plus se rendre compte de sa faute et il va recommencer… On pourrait trouver des objections, réelles et cohérentes, à l’infini.

    Toutes ces réflexions ont du vrai, ne serait-ce que par l’expérience ressentie. Mais ce sont souvent de faux problèmes qui nous empêchent de voir la beauté et la force de la miséricorde. Je pourrais dire que jamais je n’achèterai une voiture parce que j’ai des amis qui se sont tués dans des accidents de la circulation et que moi-même j’ai peur de conduire. Un peu de bon sens me fera comprendre que toutes mes peurs n’enlèvent rien au fait que l’automobile est une des plus belles inventions de l’homme.

    Alors reprenons les choses par le début. La vie est belle, elle est un don extraordinaire dont je peux profiter et pourtant beaucoup n’en profitent pas. L’amour est magnifique, beaucoup en font l’essentiel de leur vie, mais d’autres passent complètement à côté ou même ils n’arrivent plus à voir cet amour que comme un immense cauchemar. Il en ira de même pour la miséricorde. Alors question de chance ou de fatalité ? Je crois que tout de même l’homme est en général libre de choisir comment il va s’en sortir.

    Il faut d’abord se convaincre que la miséricorde est une réponse merveilleuse à tous les conflits de notre vie et que c’est elle qui a transformé bien des cauchemars en une oasis de paix où les blessures pardonnées sont devenues le motif et la cause d’un supplément d’humanité.

    Mais on oublie que la miséricorde s’apprend, s’expérimente et s’exerce en grandissant. Un des grands dangers de la miséricorde est de vouloir la vivre tout seul et d’un seul coup. Il faut être ensemble, unis, pour avoir la force de vivre la miséricorde dans la réciprocité. Et dans ce groupe uni, on peut déjà commencer à pratiquer la miséricorde dans les petits problèmes ou malentendus ou incompréhensions de chaque jour.

    Je vous assure que je suis content quand un de mes amis me cause un petit tort, parce qu’il oublie un rendez-vous, ou bien il ne se souvient plus de ses promesses, ou bien il me déçoit pour une raison ou pour une autre. J’ai pris l’habitude de me réjouir lorsque se produit un petit incident de ce genre, parce que je me dis : voilà une belle occasion de pardonner, en imaginant que mon ami a certainement des circonstances atténuantes indépendantes de sa volonté et qu’il n’a sûrement pas voulu me causer du tort. Et en me disant surtout : comme ça, la prochaine fois que moi je lui ferai de la peine pour une bêtise, il se souviendra que je lui ai pardonné de tout mon cœur la fois précédente et il en fera autant pour moi, avec un grand sourire du fond du cœur. Et c’est cela qui soude le plus l’amitié.

    A force de nous exercer à ce petit jeu, nous serons plus forts le jour où vraiment la miséricorde sera plus difficile à appliquer, mais nous nous en sortirons quand même et alors quelle libération qui transformera tout notre être en même temps que le cœur de celui à qui nous aurons pardonné !

    Mais encore une fois il faut se rappeler que la miséricorde est un acte que je fais sur moi-même avant de le faire sur celui qui m’a fait du mal. Vivre la miséricorde, c’est comme déraciner en moi l’arbre de la rancœur, de la vengeance et de la haine. A chacun de trouver sa méthode. Si je suis très fort et très bien entouré j’aurai peut-être la force de déraciner cet arbre malsain d’un seul effort, mais je peux aussi creuser peu à peu la terre autour des racines de l’arbre pour l’enlever ensuite plus facilement comme on détache un fruit mûr de sa branche.

     

    Et enfin, ou plutôt à la base de tout, il ne faut jamais se lasser de recevoir la miséricorde. Il faut savoir se pardonner à soi-même avant d’être capable de pardonner aux autres. M’accepter moi-même tel que je suis, pas parce que je suis parfait, mais parce que j’ai été créé pour aimer, pour rendre les autres heureux autour de moi et que, si je me décourage de moi-même, je vais interrompre ce courant bienfaisant qui m’a donné la vie et l’amour et qui peut continuer à le donner à travers moi…


    Tags Tags : , , , , , , , , , , , , , ,
  • Commentaires

    1
    Hayat
    Jeudi 31 Mars 2016 à 21:36
    Se pardonner soi-même ...c'est pas une mince affaire !j'ai compris un jour que ne pas se pardonner est un manque d'humilité !C'est peut-être pour ça que ce n'est pas simple !
    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :