• Marc 1

    L’EVANGILE  SELON SAINT MARC

     

    Avant propos

    Chacun des quatre Evangiles est tellement riche qu’on pourrait tourner en rond à écrire à leur sujet  des milliers de pages sans nécessairement avoir véritablement compris l’essence de leur message.

     Il fallait donc choisir et se limiter à quelques aspects particulièrement marquants, sans vouloir tout dire.

    Je propose de reprendre ici l’Evangile de Marc, à la lumière de ce que j’appelle la vision des quatre verbes.

    C’est une clé de lecture, c’est ma clé de lecture, évidemment bien personnelle. Je ne suis pas un spécialiste de l’exégèse, mais cela fait des années que je suis tombé amoureux de ces Evangiles et que j’y ai trouvé mes clés de lecture : lecture de l’Evangile, mais surtout, à travers elle, lecture de ma vie, lecture de la vie de l’homme et de la vie de Dieu en nous.

     Je ne demande donc pas à mon ami lecteur d’approuver tout ce que je vais lui dire ; on pourrait certainement discuter et approfondir à l’infini. Je lui propose simplement de partager avec moi un moment de mon cheminement : c’est toujours plus beau de cheminer ensemble.

     Et en même temps j’aimerais que cette clé de lecture que j’ai trouvée ou inventée soit pour mon lecteur une provocation : qu’elle le pousse à chercher à son tour sa propre clé de lecture qu’il pourra partager lui aussi avec ses compagnons de route.

    C’est ainsi que la « Bonne Nouvelle » continuera en nous à illuminer l’humanité dans son « Saint Voyage » sur cette terre.

    Et cette « vision des quatre verbes » que veut-elle dire au juste ? Nous le découvrirons au fur et à mesure. C’est une tentative de résumer toute notre vie en quatre petits mots : être, accueillir, donner et refuser. C’est comme un jeu qui m’a rendu depuis quelque temps la vie plus simple et plus lumineuse. Mais...il est peut-être temps de commencer !

     

    CHAPITRE 1

     

    Mais qui sont d’abord les personnages de ce premier chapitre ? Jésus-Christ, bien sûr (il s’agit du  « commencement de la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ, le Fils de Dieu », appelé aussi le Seigneur, mais toute la Trinité est déjà présente (l’Esprit et la voix de Dieu le Père) avec les anges, Satan et les esprits mauvais. On fait connaissance avec Jean-Baptiste et les premiers disciples, Simon, André, Jacques et Jean avec leur entourage : le père de Jacques et Jean avec ses ouvriers, et la belle-mère de Simon. Et puis il y a la foule des anonymes, « toute la Judée, tout Jérusalem », « la ville entière de Capharnaüm », « toute la Galilée », « tous », et parmi la foule ceux qui ont le plus besoin d’aide, « un homme tourmenté par un esprit mauvais », des « malades », « ceux qui étaient possédés » et enfin un « lépreux ». Et puis il ne faut pas oublier le lecteur, chacun d’entre nous, à qui l’Evangile s’adresse, directement ou indirectement.

    Dès les premières lignes de Marc, nous entrons déjà dans l’ «être », ou plutôt nous voyons l’être entrer dans l’histoire. Mais cet être n’est pas impersonnel, anonyme, monolithique. Il est fait de trois personnes tout de suite bien distinctes et qui ont entre elles un rapport absolument dynamique. Timidement nous allons entrer dans ce rapport et c’est une révolution totale pour l’humanité. Quand on pense que, quelques lignes plus haut, Jean le Baptiste disait encore : « Je ne suis pas digne de me courber à ses pieds pour défaire la courroie de ses sandales. » Il ne se sentait même pas digne de l’attitude la plus humble qu’on puisse imaginer. Dieu, l’Etre dont l’Ancien Testament n’osait pas même prononcer le nom, était trop inaccessible, le rapport avec lui était pratiquement impossible, au moins directement. Et voici que le ciel  se déchire et on voit « l’Esprit descendre sur Jésus comme une colombe ». Mais c’est Jésus seul qui le voit dans un premier moment et pourtant « du ciel une voix se fit entendre : ‘C’est toi mon Fils bien-aimé ; en toi j’ai mis tout mon amour’. » Et cette fois-ci Marc ne nous dit pas que seul Jésus a entendu la voix, non, elle s’adresse directement à nous. Dieu, l’Etre, dévoile son secret pour la première fois dans l’histoire de l’homme. Et son secret c’est qu’au cœur de l’Etre se trouve une relation d’amour entre trois personnes. Si la dignité de l’homme est justement de pouvoir accueillir cet « être » et même de pouvoir le donner à son tour, il comprend pour la première fois qu’en Dieu lui-même se trouvent des personnes qui se donnent et qui s’accueillent à tour de rôle, avant même de se donner à nous et de nous faire partager leur « être » étonnamment vivant.  

    Ce qui a provoqué cet évènement grandiose, c’est le fait que Jésus soit venu se faire baptiser par Jean-Baptiste. Baptiser cela veut dire plonger, faire entrer, immerger (aspect extérieur et symbolique) et cela veut dire surtout transformer, laisser pénétrer dans une vie nouvelle (aspect intérieur à la fois humain et divin). Alors que Jean ne se sentait même pas digne de servir le « Seigneur » (« Voici venir derrière moi celui qui est plus puissant que moi ») il a dû se laisser faire, il a dû participer à cet abaissement scandaleux d’un Dieu qui s’offre comme pour être transformé, alors que c’est Lui qui est venu pour nous transformer.

    A partir de là commence vraiment l’histoire de l’humanité. « Les temps sont accomplis : le  règne de Dieu est tout proche. Convertissez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle. » C’est Jésus qui le dit. Et Jésus va se donner maintenant sans répit pendant toute sa vie publique. Trois ans (où un an si l’on s’en tient à Marc) d’un mouvement étonnant qui a de quoi donner le vertige. En quelques lignes on voit Jésus « sortir », « partir », « passer », « arriver », «  se rendre », « quitter », « aller », « s’approcher », « se lever », « parcourir »... On le voit aussi « enseigner », « proclamer », « dire », « appeler », « interpeller », « répondre » et en même temps agir avec force et puissance, « étendre la main », « prendre », « toucher », « guérir », « chasser » les esprits mauvais.

    Nous voici déjà en plein dans la dynamique des quatre verbes. L’  « être » (qu’on pourrait aussi appeler « l’amour », mais n’anticipons pas trop vite ce qui sera surtout le message de l’Evangile de Jean), cet être se dévoile comme contenant en lui-même les deux mouvements d’ « accueillir » et de « donner » ou de « se donner » qui vont maintenant se répondre à l’infini dans la réciprocité. Réciprocité avec l’autre, car pour pouvoir donner, il faut que quelqu’un accueille le don et pour pouvoir accueillir il est besoin de quelqu’un qui donne ou qui se donne. Et réciprocité en moi-même, ou complémentarité, entre un moment davantage passif, celui de l’accueil, et un autre davantage actif, celui du don. Mais attention que l’accueil demande toujours d’être extrêmement attentif, voire actif quand on reçoit, alors que celui qui donne doit toujours délicatement laisser à l’autre le temps de l’accueillir s’il ne veut pas l’écraser de son don.

    Et Jésus est ici d’une délicatesse extraordinaire. Lui qui pourrait si facilement résoudre tous nos problèmes, guérir toutes nos maladies, veut d’abord respecter notre liberté, s’adapter à notre rythme, nous laisser nous préparer. Il y a une préparation intense et active à l’accueil : « Préparez le chemin du Seigneur, aplanissez sa route. » Pour guérir les malades Jésus, même s’il se déplace beaucoup, au contraire du Baptiste, attend à la fin qu’on les lui amène, il attend qu’on lui dise que la belle-mère de Simon est « au lit avec de la fièvre ». Et l’épisode le plus frappant à ce sujet est celui du lépreux qui « vient trouver Jésus » (il fait l’effort lui aussi de se déplacer), qui « tombe à ses genoux et le supplie : ‘Si tu le veux, tu peux me purifier.’ » Jésus le sait bien qu’il porte en lui la force capable de purifier ce lépreux, mais il désire que celui-ci le demande expressément. « Pris de pitié devant cet homme, Jésus étendit la main, le toucha et lui dit :’ Je le veux, sois purifié’ ». La réciprocité est déjà à l’œuvre dans la relation nouvelle qui commence à s’établir entre Dieu et l’humanité.

    Que s’agit-il de faire alors pour entrer pleinement dans cette relation ? « Convertissez-vous et croyez à la Bonne nouvelle. » C’est aussi simple que cela, mais comment faire concrètement ? Se convertir veut dire étymologiquement se retourner, changer de direction, donner un nouvel élan à notre vie, se donner pour être prêt à accueillir. Mais croire, qu’est-ce que croire ? Simplement être convaincu intellectuellement de telle ou telle vérité, comme la foi a été trop souvent réduite? Non, croire c’est d’abord recevoir un don, une vérité, l’accepter pleinement (mouvement d’accueil au départ essentiellement passif) puis aussitôt adhérer à ce don, à cette vérité, se fondre en elle, s’y donner corps et âme, prêt à toutes les conséquences qui en découleront. Le verbe croire, dans les langues sémitiques, est de la racine qui a donné notre « amen » : oui, je suis d’accord, j’ai pleinement confiance, je me jette sans arrière pensée dans les bras de celui qui est venu se donner à moi : l’aventure va pouvoir commencer.

    Et comment ne pas être frappé ici par le contraste étonnant entre ce lépreux qui « croit » à la force de Jésus et l’esprit mauvais qui « sait » qui est Jésus mais qui « refuse » de se laisser transformer par lui. Oui l’esprit mauvais est le premier à savoir qui est Jésus, bien avant Simon Pierre qui le découvrira un peu plus tard (8,29). « Que nous veux-tu, Jésus de Nazareth ? Es-tu venu pour nous perdre ? Je sais fort bien qui tu es : le Saint, le Saint de Dieu. » Mais cela ne sert à rien de savoir. Le savoir peut rester une froide attitude extérieure bien abstraite qui ne change rien à notre vie. Il s’agit ici de s’impliquer à fond de tout son être, probablement avant même d’avoir vraiment compris, car en fait on a confusément l’intuition qu’il faut d’abord se jeter à l’eau et on comprendra peu à peu le reste en cours de route.

    Tout est déjà dit dans ce premier chapitre : le drame et en même temps l’espérance de cette humanité qui est toujours libre de refuser le don de Dieu, mais qui a toutes les possibilités d’accueillir ce don, de se donner à son tour à l’être qui nous a donné la vie et qui continue à nous soutenir, et de partager avec les autres cette nouvelle découverte.

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    PERLES DE LA PAROLE

     

    Nous allons entrer ici dans une nouvelle phase de notre recherche que nous répéterons ensuite à chaque chapitre : choisir simplement quelques phrases parmi tous les trésors qui se sont dévoilés à nous et les prendre comme des perles à retenir, à faire briller plus encore que le reste, comme une lumière qui pourra continuer à nous illuminer sur notre chemin. Ces perles ce sont les quelques phrases qui m’ont personnellement le plus frappé, mais je le dis encore une fois, elles ne sont qu’une incitation, une provocation qui invitent le lecteur à chercher à son tour les perles que Jésus a préparées pour lui et dont il a sans doute besoin plus que d’autres (et qui seront peut-être, mais pas nécessairement, bien différentes). Rien donc à discuter, simplement la joie de partager et de se réjouir ensemble, de continuer à s’ouvrir à l’infini.

     

     

              « Saisis de frayeur, tous s’interrogeaient : ‘Qu’est-ce que cela veut dire ?’ » (1,27)

    C’est la foule qui s’interroge. Elle le fait parce qu’elle a peur, elle est surprise par cette intervention divine qui ne correspond à rien de ce qu’elle avait connu jusque là. Mais peu importe la raison, on peut s’interroger parce qu’on est surpris, parce qu’on ne comprend pas, parce qu’on a peur, mais aussi parce qu’on a ressenti une grande joie, on a eu une bonne surprise, ou parce qu’on ne sait pas comment continuer le travail entrepris, parce qu’un nouveau problème se présente. Ce sont toutes là des raisons valables de se poser des questions, mais l’important c’est justement qu’on a commencé à s’interroger. Il arrivera un moment, à la fin de la vie publique de Jésus, où la foule cessera de s’interroger, elle se laissera reprendre par ses démons et elle refusera de suivre Jésus. Tant qu’on s’interroge, c’est qu’on désire sincèrement  comprendre, en savoir un peu plus, se laisser illuminer.

    C’est pour cela que cette phrase a attiré soudain mon attention au départ de notre recherche : notre première démarche, au cours de notre lecture, sera de continuer à nous laisser interroger, à nous ouvrir sans cesse, à chaque pas, à une compréhension nouvelle qui vienne enrichir et compléter les découvertes précédentes. Accepter humblement d’avoir encore beaucoup à apprendre, accepter de se laisser surprendre et émerveiller, comme un enfant, comme ces enfants de l’Evangile que Jésus nous propose comme modèle et qui ne cessent sans doute de poser des questions : pourquoi ? comment ? combien ? où et quand ? avec qui ? pour qui ? ...

     Une des pires déformations professionnelles ou culturelles de notre époque, c’est qu’on pense être capable désormais de tout savoir, d’apporter une réponse à tout. On ne sait même plus écouter les questions des autres, on a déjà une réponse toute prête avant même qu’ils aient fini de s’exprimer et on ne sait même plus se laisser interroger au fond de soi-même par les questions qui voudraient se poser tout au long de la journée. Combien nos journées seraient plus riches et moins monotones si chaque nouvelle rencontre, chaque nouvel évènement nous faisait nous demander tout à coup : « Mais qu’est-ce que cela veut dire ? »

     

              « Au moment où il sortait de l’eau, Jésus vit le ciel se déchirer et l’Esprit descendre sur lui comme une colombe. Du ciel une voix se fit entendre : ‘C’est toi mon Fils bien-aimé ; en toi j’ai mis tout mon amour.’ » (1,10-11)

    Ici nous pouvons déjà mettre en pratique la phrase précédente et nous demander : « mais qu’est-ce que cela veut dire ? » Et la réponse restera bien mystérieuse car cet amour divin des Trois Personnes de la Trinité est encore bien inaccessible tant que nous sommes encore sur cette terre. Qu’il nous pousse au moins à essayer de vivre cette réciprocité d’amour qui court entre le Père, le Fils et l’Esprit.

    Mais le mot qui m’a frappé ici, c’est au début de la première phrase : « au moment où il sortait de l’eau. » L’amour divin, trinitaire qui existe de toute éternité a eu besoin d’un geste, d’un évènement, pour être poussé à se manifester. Il a fallu que Jésus sorte de l’eau. Il a fallu bien sûr qu’il entre dans l’eau pour se laisser baptiser par Jean. Mais c’est quand il est sorti de l’eau que le ciel s’est déchiré, que l’Esprit est descendu sur Jésus et que la voix du Père s’est faite entendre.

    Bien souvent il ne se passe rien de nouveau dans notre vie, parce que nous ne savons pas « sortir », sortir de notre routine, de notre tiédeur, de notre monde clos. Nous tournons en rond dans les mêmes problèmes, nous faisons un peu de bien, nous ne faisons de mal à personne, nous prions de temps en temps, mais nous ne sortons pas de nous-mêmes ou de notre cercle de connaissances. Combien plus Dieu pourrait-il se manifester à nous chaque jour et de manière absolument surprenante si nous apprenions à sortir...

     

              « Voici que j’envoie mon messager devant toi pour préparer ta route. A travers le désert, une voix crie : préparez le chemin du Seigneur, aplanissez sa route.» (1,2-3)

    Ce qui est étonnant ici, c’est cette répétition par trois fois des mots « chemin » et « route ». Le Seigneur est en route, il est en mouvement, il est en train de se déplacer. Mais où va-t-il ? Il vient chez nous ! Dieu a décidé de visiter son peuple, il arrive. C’est lui qui fait toujours le premier pas. Nous n’avons pas grand chose à faire au fond, sinon à attendre, à « sortir » au moins sur le pas de la porte pour l’accueillir quand il arrivera.

     Mais il nous reste tout de même une chose importante à faire : c’est ce verbe qui se répète aussi par deux fois, nous préparer à sa venue. Préparer notre maison, préparer notre cœur.  

     Et c’est là qu’un autre petit mot vient nous aider : « aplanissez sa route ». Aplanir, c’est tout un programme, cela veut dire ôter tous les obstacles, toutes les pierres qui pourraient faire trébucher, toutes les barrières, les murs qui se sont construits au fil des jours entre Dieu et nous, ou entre nous et nos frères.

     Quand on souhaite la bienvenue à quelqu’un au Liban on lui dit : « Ahlan wa sahlan ! » Je n’ai jamais trouvé quelqu’un capable de me traduire de façon claire cette expression merveilleuse. « Ahl » veut dire famille, et « sahl » veut dire la plaine ; cela devrait vouloir dire à peu près à l’hôte qui franchit le pas de la porte : « Nous te souhaitons de te trouver ici chez toi, comme dans ta famille, et que tous tes problèmes se trouvent ici aplanis, résolus, pacifiés. » C’est au fond le seul travail que Jésus nous demande : enlever tout ce qui pourrait déranger sa venue, mais pour cela il faut être bien attentif, regarder dans tous les angles de la maison, ne laisser aucun coin d’ombre dans notre cœur, travail tout simple de chaque instant et à la fin Jésus fera le reste. Et c’est beau qu’il nous laisse tout le temps pour nous préparer, notre vie ici sur terre est elle-même la préparation pour le jour de la grande rencontre avec Lui, où ce serait tellement beau qu’il n’y ait plus alors aucun obstacle !

     

              « Jésus partit pour la Galilée proclamer la Bonne Nouvelle de Dieu ; il disait : ‘Les temps sont accomplis : le règne de Dieu est tout proche. Convertissez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle.’ » (1, 14-15)

    Oui, les temps sont accomplis ! Désormais la « Nouvelle » ne peut être que « Bonne », il ne peut plus y avoir de mauvaise Nouvelle. Mais « qu’est-ce que cela veut dire ? » puisque chaque jour nous sommes encore inondés de nouvelles plus ou moins tristes, parfois même tragiques ? Où se trouve le règne de Dieu dans tout cela ? Il « est tout proche. » Pourtant Dieu ne peut pas se moquer de nous, mais comment le comprendre ? Peut-être que nous ne pouvons pas encore tout comprendre. « Croyez à la Bonne Nouvelle ». 

    C’est ici que commence le véritable travail de la foi. Si nous voyions déjà le règne de Dieu face à face, nous serions déjà au paradis, il n’y aurait plus besoin de croire, ce serait simplement une évidence, une réalité définitivement palpable. Mais si nous sommes déjà si proches du royaume, nous n’y sommes pas encore complètement. Il y a toujours dans la foi une sorte de saut dans le vide, où l’on sent qu’il s’agit seulement de se jeter dans les bras de Dieu qui nous attend, peut-être dans l’obscurité.

    Alors croire à la Bonne Nouvelle, ce sera se dire chaque fois qu’arrive une mauvaise nouvelle : cette mauvaise nouvelle en cache une autre, elle cache la Bonne Nouvelle, elle nous empêche peut-être de la voir, ou peut-être mieux encore elle la contient en elle comme un trésor caché, mais nous devons faire confiance. Si nous sommes attentifs, nous découvrirons bien souvent cette Bonne Nouvelle qui était cachée au départ, ou parfois nous ne parviendrons même pas à la voir, mais nous serons sûrs, au fond du cœur, que la Bonne Nouvelle est bien là, toute proche !

     

              « Un lépreux vient trouver Jésus ; il tombe à ses genoux et le supplie : ‘Si tu le veux, tu peux me purifier.’ Pris de pitié devant cet homme, Jésus étendit la main, le toucha et lui dit : ‘Je le veux, sois purifié.’ » (1, 40-41)

    Ce qui est remarquable ici, c’est la formule utilisée par le lépreux qui s’adresse à Jésus : « Si tu le veux, tu peux.. » Il aurait pu dire tout simplement : « Jésus, je t’en prie, purifie-moi ! » Mais il a voulu s’adresser à ce qui fait la puissance de Dieu, son « pouvoir » et son « vouloir ». Car seul l’être, seul Dieu, est capable de pouvoir et de vouloir vraiment, il ne faut pas l’oublier. Certes nous aussi nous pouvons et nous voulons, mais comme participation à ce que Dieu, dans son dessein d’amour sur les hommes a bien voulu nous permettre de pouvoir et de vouloir avec Lui. Et combien souvent nous oublions cette vérité de base et nous commençons à vouloir et à pouvoir tout seuls, sans Lui. Combien de fois d’ailleurs nous voudrions et nous ne pouvons pas, ou bien nous pouvons et nous ne voulons pas, car nous ne vivons pas de cette unité en Dieu du « vouloir » et du « pouvoir » et nous les détournons pour nos propres intérêts.

    Remettons-nous alors bien simplement dans l’humble attitude du lépreux, en ayant  conscience que notre intérêt c’est de laisser Dieu justement vouloir et pouvoir en nous et pour nous. Et tout se fera ensuite comme par simple conséquence logique. Nous avons besoin d’être purifiés, ou peut-être consolés, encouragés, éclairés, guidés. Quel que soit notre besoin, Dieu pourra toujours y répondre, s’il pense bien sûr que c’est pour notre bien. Il suffit de mettre notre « volonté » et notre « pouvoir » à l’unisson avec sa volonté et son pouvoir à Lui et tout ira mieux. C’est bien sûr plus facile à dire qu’à faire, mais nous avons toute la vie pour nous exercer et chaque instant pour recommencer.


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