• Vous saviez que la paix est contagieuse?

    Il m’est arrivé une petite aventure, il y a quelques jours, au supermarché près de notre maison, qui m’a beaucoup fait réfléchir. Chaque fois que je la revis en esprit, comme une pièce de théâtre, mais réelle, j’en suis encore émerveillé.

    C’était dans l’atmosphère du nouvel an, ces jours bénis où l’on continue à souhaiter à tout le monde une année de paix et d’espoir. Imaginez quatre personnages. Moi, Français arrivé au Liban il y a maintenant 47 ans, et qui ai adopté le Liban et tout le Moyen Orient comme ma seconde patrie. Une jeune libanaise, à la caisse. Une jeune africaine, employée de maison, avec sa blouse rose qui montre bien qu’elle est là au service de quelqu’un d’autre. Et un employé du supermarché, du Bangladesh. Quatre personnes de quatre peuples différents et de trois continents… A une époque où les relations entre beaucoup de peuples sont tellement difficiles, c’est presque symbolique.

    Ce matin-là, je suis allé très tôt au supermarché pour éviter les heures de grande affluence. Après avoir rempli mon chariot, je me dirige vers une caisse qui est presque libre : il y a juste cette jeune africaine avant moi. Mais au moment où je m’approche de la caisse, voilà qu’elle repart en courant vers les étagères. Elle a sans doute oublié de prendre encore une ou deux choses pour son patron. Rien de grave : la caissière commence déjà à faire passer tous les objets à la caisse et l’employé du Bangladesh les met dans les sacs en plastique ; on ne perd pas de temps.

    Mais c’est là que commence le drame. Non, il ne fallait pas mettre tout ça ensemble dans les mêmes sacs, et de toute façon notre jeune africaine doit demander quatre factures au lieu d’une, car elle travaille pour quatre patrons à la fois qui lui ont fait des commandes. Il faut tout recommencer à zéro, effacer ce que l’ordinateur a enregistré et faire de nouvelles listes et remplir les sacs autrement. Agitation de la caissière, panique de la jeune africaine. Rien ne va plus. Il faudra tout recommencer une deuxième fois encore… et le temps passe.

    Vraiment je n’ai pas eu le temps de penser à moi et au temps qu’on me fait perdre. Je suis surtout préoccupé par l’explosion qui va se produire. La caissière va éclater, va traiter la jeune africaine de tous les noms, l’employé du Bangladesh sera lui aussi gêné. Et ce sont encore ces pauvres employés de l’étranger qui vont en subir les conséquences. Comment mettre un peu de paix dans tout ça ? Alors une idée me passe par la tête : la caissière ou la jeune africaine vont sûrement se rendre compte qu’elles me font perdre du temps, se tourner vers moi et s’excuser. Je pourrai dire gentiment avec le sourire : « Mais bonne année ! Rien de grave. Si on s’énerve déjà dès les premiers jours de l’année nouvelle, où va-t-on finir ? »

    Mais personne ne se tourne vers moi. Le seul qui s’aperçoit de ma situation, c’est l’employé du Bangladesh, le seul d’ailleurs que je connaisse, qui me regarde, interloqué, en se demandant sans doute comment je reste aussi calme dans cette agitation générale : je lui fais au moins un sourire pour le rassurer que pour moi tout va bien.

    Et c’est là que se produit une sorte de petit miracle. En un instant, la caissière change complètement d’attitude, elle devient extrêmement gentille avec la jeune africaine. Celle-ci reprend ses esprits, tout se remet en place harmonieusement en un clin d’œil, et cela finit même par une plaisanterie et un sourire. L’orage s’est éloigné. Personne ne s’est tourné vers moi. Quand vient mon tour, les « bonjour » et « bonne année » échangés avec la caissière témoignent de la paix qui règne. La caissière ne me dit pas un mot de ces pauvres africaines qui ne savent pas ce qu’elles veulent, comme cela arrive souvent dans de tels cas. La paix a régné entre les peuples, simplement parce que je l’avais en moi et qu’elle s’est transmise, presque par télépathie, sans avoir besoin de dire un seul mot…

     

     


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  • Commentaires

    1
    Hayat Fallah
    Vendredi 12 Janvier 2018 à 10:50
    C'est vrai , il a suffit d'une personne qui est en paix !!!! C'est formidable ! Et formidablement simple et extraordinaire à la fois ....
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