• Quand la comparaison tue

    La comparaison est sans doute un des éléments les plus importants qui permettent à l’intelligence de se développer. Combien il a été absolument primordial pour nous de commencer à distinguer au départ, en les comparant, l’amour de notre père avec celui de notre mère, la différence entre nos parents et nos frères et sœurs, entre notre famille et les gens rencontrés dans la rue, entre les hommes et les animaux, entre les animaux et les plantes, entre les plantes et les objets inanimés. Tout cela est tellement simple et évident. Mais alors pourquoi ces comparaisons qui nous ont aidés à nous frayer un chemin dans la vie, qui nous ont permis de distinguer le vrai du faux, le naturel de l’artificiel ou le positif du négatif et toutes les catégories qui forment le cadre de notre univers, deviennent parfois si terriblement destructrices, causes de malentendus, de souffrance ou même de haine. Car il faut bien reconnaître qu’il existe des comparaisons qui blessent, qui offensent, qui attristent ou même qui tuent.

    Combien de comparaisons servent seulement à provoquer la jalousie ou la méfiance. Combien de comparaisons nous servent seulement à créer des barrières entre les gens. Et nous en entendons ainsi tous les jours de toutes les couleurs. A peine a-t-on vu pendant quelques jours la photo de ce petit garçon mort sur une plage de Turquie qui a fait le tour du monde, que l’on entend des gens en Europe qui disent : « Oui, tout le monde s’émeut pour la mort de ce petit kurde de Kobané, et pourquoi ne fait-on pas le même tapage pour ce qu’on fait subir aux petits chrétiens du Moyen Orient ? » On peut comprendre la douleur d’un père angoissé qui voit que personne ne s’occupe de son enfant maltraité, mais de là à vouloir comparer la souffrance de l’un avec celle de l’autre, pourquoi ? Quelle honte ! Quel manque de délicatesse et de respect en même temps. Si vous voyez une mère atterrée par la mort accidentelle de son enfant, vous n’allez tout de même pas lui dire que votre voisine souffre bien plus qu’elle parce que son fils est en train de mourir d’un cancer à petit feu ! On ne devrait jamais comparer des souffrances et des injustices entre elles. Il est des mots, des comparaisons qu’on doit garder pour soi, si on ne veut pas détruire en peu de mots de bonnes relations que nous avons mis peut-être des années à construire.

    Ou bien lorsqu’on essaye de se justifier et de se défendre. Comme lorsque j’essaye parfois de dire à des amis en France que nous, chrétiens, avons beaucoup de choses à nous reprocher et que je m’entends dire : « Mais tu ne vois pas ce que font les communistes, ou les musulmans, ou les Chinois ? » Comme si la faute des autres justifiait tout ce qui ne va pas chez nous… C’est sans doute aussi pour tout cela que beaucoup de gens disent qu’ils n’aiment pas les comparaisons.

    Alors taisons-nous, ne faisons plus de comparaisons ? Ce n’est pas du tout ce que je voulais dire. Il en va des comparaisons comme de tous les outils qui peuvent nous tomber sous la main. Avec un couteau, je peux préparer un repas exceptionnel, délier une corde qui nous empêchait d’être libres, mais aussi blesser et même tuer. Et que dire de l’eau, du feu ou des plus belles découvertes scientifiques ou technologiques de l’homme ? A moi d’avoir l’intelligence et la maturité de me servir de mes outils pour quelque chose de constructif et non pas de négatif.

     

    Les comparaisons servent à apprendre et à découvrir quelque chose de nouveau. Une comparaison peut ouvrir au lieu de fermer. Elle peut servir à unir et à harmoniser, comme elle peut servir à opposer ou à détruire. A moi de juger. Combien de comparaisons provoquent une saine émulation dans les mondes du sport, de la science, de la culture en général et font faire de grand pas à l’humanité. Tout le monde en voit chaque jour des milliers d’exemples. Comparons donc en toute liberté, mais en choisissant le bon moment et la comparaison qui libère, pas celle qui bloque, qui fâche ou qui provoque la colère, le mépris ou l’angoisse. On peut penser peut-être ce qu’on veut, mais on n’est pas libre de dire tout ce qui nous passe par la tête, sous prétexte que c’est la vérité et que la vérité doit toujours être dite. Nous parlerons encore de la vérité… mais restons-en là pour aujourd’hui.


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  • Commentaires

    1
    Clara
    Lundi 28 Septembre 2015 à 11:39

    Il ne faut pas aussi oublier les comparaisons faites pour justifier telle ou telle chose (souvent moyenne) qu'on a faite...:S

    Au Liban on est les rois des comparaisons malheureusement "Ca va...si tu savais ce que X a fait...", "tu dois voir en Arabie Saoudite, ils sont encore pire"...

    2
    Hayat
    Lundi 28 Septembre 2015 à 23:09
    " comme si la faute des autres justifiait ce qui ne va pas chez nous " C typique de ce qu'on entend très souvent ...
    Ce qui ne va pas chez nous, ou ailleurs ,ne va pas ,il ne peut être justifié...
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