• « Heureux les pauvres de cœur : le Royaume des cieux est à eux ! » (Mt 5,3)

    C’est la première béatitude, celle qui va donner le ton à tout le discours de Jésus. C’est le début de notre révolution totale. Jésus nous demande d’être pauvres de cœur, ou pauvres en esprit. Il ne s’agit pas d’une question matérielle et apparente, mais bien d’une attitude profonde de l’âme qui peut changer complètement notre vie.

    Dieu nous demande-t-il ici de faire de gros sacrifices sur cette terre pour mériter ensuite le Royaume quand nous serons morts ? Ce serait le pire des contresens, et c’est malheureusement cela que bien des gens continuent à comprendre…

    Dieu veut seulement nous libérer de ces richesses matérielles ou psychologiques qui nous encombrent, qui nous laissent le dos courbé et les yeux à terre au lieu de pouvoir regarder la lumière en train de descendre du ciel pour nous.

    Dieu veut que nous soyons pauvres comme Lui, et c’est là le début de cette révolution extrême. Dieu est pauvre, Dieu le tout puissant est incapable de posséder, il ne le désire même pas, il ne sait pas et ne veut pas être riche. Il est trop heureux d’être Dieu sans autre but dans sa vie que d’accueillir l’autre et de se donner à lui de tout son cœur. A l’intérieur de la Trinité d’abord entre le Père et le Fils dans l’Esprit Saint, et avec les hommes ensuite et toute la création.

    Dieu sait seulement donner la vie, donner sa vie qui est la Vie qui porte le monde entier et chacun de nous. Il n’est pas capable de s’arrêter un seul instant en chemin de cette donation immense et tellement généreuse, car il n’a pas le temps même de se regarder, il ne peut pas nous priver un seul instant de son amour immense et en même temps unique pour chacun.

    Alors, si nous voulons suivre Dieu, nous n’avons qu’à faire comme lui. Commencer par nous dire que rien ne nous appartient. Cette vie même qui nous porte et toutes les richesses matérielles ou spirituelles que nous avons reçues en cours de route, ne sont pas des biens que nous pouvons un seul instant mettre dans le dépôt d’une banque pour nous sentir importants. Non, ces richesses ne sont pas à nous, elles sont seulement là pour que nous en fassions profiter nos frères comme d’autres frères nous en ont fait profiter.

    Notre vie en Dieu et avec Dieu peut être déjà le paradis sur la terre, si nous nous levons le matin pour recevoir et accueillir simplement tous les dons que la vie et nos frères vont nous faire en cours de route, les accueillir avec joie, même si ces dons peuvent parfois nous faire mal, mais les accueillir de tout notre cœur, remercier Dieu de nous les avoir envoyés et nous mettre tout de suite en route pour les donner à notre tour à tous ces frères et ces sœurs à qui cela apporterait tellement de joie.

    Alors la vie est pleine, elle devient une belle aventure où l’amour est libre, complètement libre de se donner en nous et à travers nous, où plus rien ne peut nous attarder en route, car le Royaume des cieux est déjà parmi nous, le Royaume des cieux « est à nous », nous n’avons pas besoin d’attendre demain pour le recevoir ou le mériter, nous sommes déjà en Lui, dans la vie de la Trinité descendue sur la terre. Quand on s’est mis à goûter à ce paradis, ce serait tellement bête de le perdre pour nous attacher égoïstement à je ne sais quels biens passagers qui ne pourront jamais nous combler autant que cette vie divine qui a commencé à couler dans nos veines.

     


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  • Je viens de lire et de relire ce chapitre extraordinaire de l’Evangile de Matthieu que je connais pourtant presque par cœur, et j’en ai encore le souffle coupé. Il suffirait de mettre en pratique ces quelques lignes et l’humanité serait sauvée, elle retrouverait finalement la lumière. Il y a là une révolution totale par rapport à la mentalité courante dans laquelle nous sommes enveloppés du matin au soir à travers les réseaux sociaux.

    Mais comment a-t-on pu en arriver là ? Simplement parce que presque personne, en 20 siècles de christianisme, n’a eu l’intelligence ou la patience ou le courage de mettre en pratique ces simples vérités. Ou bien parce que nous n’avons pas essayé de comprendre vraiment ce message venu du ciel pour nous illuminer, mais qui était peut-être trop fort à digérer. Ou bien parce que certains chrétiens ont compris le message, mais ils ont essayé de le vivre seuls dans leur coin et cela n’a pas porté les fruits escomptés…

    Mais quand on relit l’histoire, quand on revient à la période de la révolution française qui a prétendu avoir découvert les valeurs de « liberté, égalité et fraternité », comme si c’était la première fois, et qu’on revient à l’Evangile, et qu’on y voit à chaque page cette « liberté », cette « égalité » et cette « fraternité » et bien plus encore, on se demande où se sont cachées ces valeurs en cours de route.

    Mais venons-en à notre texte. C’est un texte complètement original, par rapport à l’Evangile de Marc qui l’a précédé, à part les quelques phrases sur le « sel de la terre ». On retrouvera quelques lignes semblables en Luc, mais on sent chez Matthieu un souffle tellement original qu’on l’imagine directement branché à la source divine qu’il a pu connaître et contempler personnellement et dont il a apparemment vraiment profité.

    L’introduction de notre chapitre est toute simple : « Quand Jésus vit la foule, il gravit sur la montagne. Il s’assit, et ses disciples s’approchèrent. Alors, ouvrant la bouche, il se mit à les instruire. » Jésus qui passe son temps dans l’Evangile à courir de village en village, de Nazareth à Capharnaüm ou à Jérusalem, va s’arrêter ici pour un bon moment. La foule et les malades, les pharisiens et les pécheurs, tout le monde a disparu tout à coup. Il ne reste que les disciples qui s’approchent pour écouter la Parole qui descend du ciel… et nous avec eux, 2000 ans plus tard. On se demande avec étonnement pourquoi avoir dit que Jésus ouvre la bouche pour parler : mais ce n’est pas une lapalissade, c’est l’attention portée sur cette « bouche » divine, qui est la bouche du Verbe, de la Parole même de Dieu, une bouche qui est source de vie pour tout homme qui veut bien l’écouter. Alors, écoutons-la !

    Je ne ferai ici que quelques remarques rapides, pour m’arrêter ensuite sur les phrases les plus importantes que nous reprendrons comme « Perles de la Parole », car ce chapitre est si riche qu’il nous faudrait des centaines de pages pour y pénétrer en profondeur…

    Les premières lignes, ce sont les fameuses « béatitudes ». La traduction hésite entre « heureux » et « bienheureux » : « heureux les pauvres de cœur », « heureux les doux… les miséricordieux… les cœurs purs… », mais quelle différence au fond ? Bienheureux veut dire d’une joie béate, comme les béatitudes, c’est une sorte de bonheur divin, spirituel, qui prend toute l’âme et tout l’esprit en même temps, et heureux voudrait dire un bonheur plus humain, plus incarné. Mais vivre l’Evangile nous porte à tout cela à la fois, car nous marchons à la suite d’un maître qui est à la fois complètement Dieu et complètement homme, où l’on ne peut plus séparer ce qui est divin et terrestre. C’est nous qui inventons parfois certaines distinctions en nous compliquant la vie. Ce qui est sûr ici, c’est que suivre les « béatitudes » est une voie définitive de bonheur total, même au milieu de la souffrance, et c’est cela la première révolution !

    La deuxième révolution, c’est que chacun de nous, au-delà et même au plus profond de nos faiblesses et de nos limites, nous pouvons être le « sel de la terre » et la « lumière du monde ». « Vous êtes le sel de la terre. Si le sel se dénature, comment redeviendra-t-il du sel ? Il n’est plus bon à rien : on le jette dehors et les gens le piétinent. » « Vous êtes la lumière du monde. Une ville située sur une montagne ne peut être cachée. Et l’on n’allume pas une lampe pour la mettre sous le boisseau ; on la met sur le lampadaire, et elle brille pour tous ceux qui sont dans la maison. De même que votre lumière brille devant les hommes : alors, en voyant ce que vous faites de bien, ils rendront gloire à votre Père qui est aux cieux. »

    Et la troisième révolution c’est notre relation à la Loi et la liberté nouvelle apportée par Jésus par rapport à cette Loi même qu’il nous demande de suivre. Jusqu’à aujourd’hui les croyants et théologiens de tous bords continuent à se disputer sur la juste interprétation à donner à ces paroles. « Ne pensez pas que je suis venu abolir la Loi ou les Prophètes : je ne suis pas venu abolir mais accomplir. Amen, je vous le dis : Avant que le ciel et la terre disparaissent, pas une lettre, pas un seul petit trait ne disparaitra de la Loi jusqu’à ce que tout se réalise. Donc, celui qui rejettera un seul de ces plus petits commandements, et qui enseignera aux hommes à faire ainsi, sera déclaré le plus petit dans le Royaume des cieux. Mais celui qui les observera et les enseignera sera déclaré grand dans le Royaume des cieux. » A noter ici que personne n’est rejeté du Royaume parce qu’il a mal agi : tous restent dans le Royaume des cieux, mais seulement certains y sont « petits » et d’autres « grands ».

    Le problème, c’est que tout de suite après, Jésus va nous dire de dépasser complètement cette Loi et de nous en libérer pour respirer cet air des « béatitudes » qu’il vient à peine de nous donner. Il nous demande de respecter cette Loi, mais de ne pas y rester collés, comme les pharisiens qui ne sont pas capables d’aller plus loin vers le Royaume : « Je vous le dis en effet : si votre justice ne surpasse pas celle des scribes et des pharisiens, vous n’entrerez pas dans le Royaume des cieux. »

    A partir de là, Jésus va presque systématiquement bouleverser cette Loi qu’il nous a à peine demandé de suivre : « Vous avez appris qu’il a été dit aux anciens : ‘Tu ne commettras pas de meurtre’… Eh bien moi, je vous dis : Tout homme qui se met en colère contre son frère… » « Vous avez appris qu’il a été dit : ‘Tu ne commettras pas d’adultère’. Eh bien moi, je vous dis… » « Il a été dit encore : ‘Si quelqu’un renvoie sa femme…’ Eh bien moi, je vous dis… » « Vous avez encore appris qu’il a été dit aux anciens : ‘Tu ne feras pas de faux serments…’ Eh bien moi je vous dis de ne faire aucun serment… » « Vous avez appris qu’il a été dit : ‘Œil pour œil, dent pour dent’. Eh bien moi, je vous dis de ne pas riposter au méchant… » « Vous avez appris qu’il a été dit : ‘Tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi’. Eh bien moi, je vous dis : aimez vos ennemis… »

    Il faut avouer que la tête nous tourne un peu ou même beaucoup devant cette révolution en acte. Nous reviendrons sur les phrases les plus importantes. Mais il n’est en effet pas simple de comprendre où nous emmène Jésus qui nous dit au départ que si nous n’observons pas les commandements, nous restons quand même dans le Royaume des cieux et qui nous dit ensuite : « Si ton œil droit entraine ta chute, arrache-le et jette-le loin de toi : car c’est ton intérêt de perdre un de tes membres, et que ton corps tout entier ne soit pas jeté dans la géhenne. » « Et si ta main droite entraine ta chute, coupe-la et jette-la loin de toi : car c’est ton intérêt de perdre un de tes membres et que ton corps tout entier ne s’en aille pas dans la géhenne » Alors doit-on avoir peur de la Loi ou non ? C’est un dilemme qui n’a pas toujours été facile à résoudre.

    Mais s’arrêter à une Loi qui fait peur n’est sûrement pas le but de Jésus. Son but est en fait très clair : créer une véritable fraternité entre les hommes et vivre ainsi la loi divine de l’amour réciproque sur la terre comme au ciel. Mais reprenons encore les passages du chapitre qui peuvent nous éclairer en ce sens. « Donc, lorsque tu vas présenter ton offrande sur l’autel, si, là, tu te souviens que ton frère a quelque chose contre toi, laisse ton offrande là, devant l’autel, va d’abord te réconcilier avec ton frère, et ensuite viens présenter ton offrande. » L’amour du prochain est donc bien plus important que tous les autres commandements.

    Ensuite, quand on se perd dans des discussions morales sans fin sur la mise en pratique de la Loi, on devient comme les pharisiens qui ont oublié en chemin la simplicité du message de Dieu : « Quand vous dites ‘oui’, que ce soit un ‘oui’, quand vous dites ‘non’, que ce soit un ‘non’. Tout ce qui est en plus vient du Mauvais. »

    L’important n’est donc plus la Loi, mais cet amour du Père pour tous les hommes sans distinction, qui nous permet d’être « vraiment les fils de ‘notre’ Père qui est dans les cieux ». Et la conclusion du chapitre est tellement claire : « Si vous aimez ceux qui vous aiment, quelle récompense aurez-vous ? Les publicains eux-mêmes n’en font-ils pas autant ? Et si vous ne saluez que vos frères, que faites-vous d’extraordinaire ? Les païens eux-mêmes n’en font-ils pas autant ? Vous donc, soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait. »

    Alors à quoi sert encore la Loi dans tout cela ? Elle sert sans doute quand nous sommes perdus, quand nous avons égaré l’amour de Dieu et du prochain, elle permet de remettre des bases plus saines à notre vie pour avancer et ne pas faire trop de bêtises. Elle ne doit surtout pas devenir une morale qui sert surtout en fin de compte à juger les gens au lieu de les aimer. Mais quand on a connu, goûté et mis en pratique l’amour des béatitudes, sur lequel nous allons revenir très bientôt, on n’a plus trop besoin de la Loi, on baigne dans la béatitude céleste d’un amour infini qui nous porte et nous donne la force de ressembler à Dieu, au-delà de toute notre petitesse. L’aventure commence et ne s’arrêtera que si nous-mêmes l’oublions en route, et ce serait tellement dommage, quand on a enfin découvert le trésor.


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  • (Suite de l’article : « L’amour ne revient jamais en arrière »)

    Quand on commence à aimer, avec l’apprentissage de la vie, on aime d’abord bien sûr les personnes qui nous ont aimés en premier, nos parents, notre famille, puis nos amis. C’est ce qu’on pourrait appeler un amour « naturel ». Et le reste de l’humanité nous est souvent complètement indifférent.

    Mais peu à peu grandit en nous cette expérience que chaque personne est en fait potentiellement un frère ou une sœur en humanité que je peux aimer à son tour et qui m’enrichit immensément. Alors nos journées commencent à y gagner énormément en qualité, car bientôt personne ne nous est plus indifférent comme avant.

    Mais c’est qu’il s’agit de prendre conscience que cet amour que j’ai en moi est le plus grand trésor de ma vie et que ce trésor ne va cesser de grandir chaque fois que je vais le partager. Le partager, entendons-nous, avec les nuances nécessaires : je ne vais pas aimer une personne rencontrée dans la rue comme j’aime le préféré ou la préférée de mon cœur. Mais cela ne signifie absolument pas que je ne vais pas aimer chaque personne de tout mon cœur.

    Et je crois qu’il faut ici clarifier un grand malentendu dans lequel on tombe tellement souvent : c’est la peur de la jalousie des personnes qui nous sont les plus chères. L’homme qui aime sa bien-aimée à la folie, a peur de donner cet amour à d’autres personnes, comme s’il allait trahir justement sa bien-aimée. Mais il oublie une chose, c’est que son cœur est plein de l’amour de sa bien-aimée et aimer tout le monde avec ce cœur qui s’est élargi ne veut absolument pas dire trahir l’autre, mais au contraire être fidèle à l’autre. Garder dans chaque relation la même qualité d’accueil, d’écoute, de compassion, de compréhension profonde.

    Imaginons qu’un homme embrasse sa femme le matin avant d’aller au travail et lui promette un amour éternel, et qu’il passe sa journée au bureau à se disputer avec ses collègues ou son directeur, à haïr ses clients, à être impatient avec tout le monde, vous croyez qu’il sera capable d’aimer sa femme de tout son cœur en rentrant le soir à la maison ? C’est exactement le contraire. Car l’amour, le véritable amour qui grandit dans la réciprocité, est lorsque je pénètre en profondeur dans le ciel de l’autre et que je le laisse pénétrer dans le mien.

    Mais dans le ciel de l’autre, je découvre peu à peu le secret de toute l’humanité. Chaque personne devient sacrée pour moi, comme ma bien-aimée est sacrée. Et plus j’aime chaque personne que je rencontre avec cet amour sacré, dans les limites bien sûr d’une relation adaptée à chaque personne, mais pas en aimant moins, plus je reste fidèle à cet amour en moi qui ne pourra plus mourir. Et ma bien-aimée sera heureuse de me voir épanoui et libre dans mon travail et dans toutes mes relations sociales et je l’aimerai encore plus et elle m’aimera encore plus. Finie la jalousie. Les portes de l’amour vont s’ouvrir à l’infini et je vais vraiment aimer toute la journée, parce que sans cela je me renierais moi-même et je commencerais à me dessécher…


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  • Oui, je vais continuer à m’expliquer, car je vois que beaucoup de lecteurs ne sont encore pas convaincus. Le problème c’est qu’on a fait de l’amour un des produits de consommation du genre de ceux qu’on va acheter au supermarché. On choisit son amour en fonction de l’intérêt du moment, puis quand il ne nous intéresse plus, on le jette à la poubelle et on va en chercher un autre…

    Mais ce n’est pas cela l’amour. L’amour, c’est la vie qui commence à se donner, qui grandit en se donnant et en se partageant et qui brûle tout sur son passage en faisant tache d’huile. La difficulté, c’est que nous tombons souvent de l’amour, comme on tombe d’un cheval au galop, et nous nous faisons mal en tombant et nous avons envie de rester là à nous plaindre sans plus jamais nous relever.

    Mais l’amour n’est pas un cheval au galop qui va continuer à courir en oubliant que l’instant précédent nous étions tellement heureux avec lui. Non, l’amour, parce qu’il est amour, va nous attendre, nous aider à nous relever patiemment, panser nos plaies et nous aider à reprendre notre route, sans même nous juger, si nous n’avons pas eu la force de continuer à courir avec lui. Car l’amour sait bien que nous sommes faibles, mais que notre intention est bonne, et il va nous redonner du courage.

    Alors la vie commence à changer. On tombe de moins en moins de son cheval, on découvre des paysages étonnants, tout devient tellement plus passionnant. Mais surtout l’amour entraine bientôt la réponse de l’autre. Et quand l’autre a commencé à nous répondre dans la réciprocité, cela nous cause une joie si grande qu’on ne va plus s’arrêter pour n’importe quelle petite difficulté. (encore à suivre)

     


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  • Peut-être encore une de mes provocations ? Je vais essayer de m’expliquer. Cela fait longtemps que j’ai commencé à faire cette expérience que l’amour ne peut jamais revenir en arrière.

    Vous allez me dire que toute la vie est faite de ces conflits ou de ces blessures dus à l’amour qui s’est arrêté quelque part en route et qui a disparu après avoir fait de fausses promesses.

    Eh bien, ce n’est pas vrai, ce n’est pas l’amour qui s’est arrêté, c’est l’homme qui a fui, qui n’a pas donné suite à ses promesses, c’est chacun de nous dans notre faiblesse et dans notre inconstance qui sommes capables de trahir à chaque instant notre amour.

    Mais l’amour, le vrai amour, ne sait pas faire autre chose que de se donner, de donner la vie qu’il porte en lui pour toujours. Alors, quand on commence à comprendre au moins un peu cette immense vérité, on regarde l’amour autrement. C’est vrai que l’amour restera toujours un jeu magique, une fête, une aventure magnifique, mais combien de fois n’avons-nous pas vu cette fête ou cette magie se transformer en cauchemar qui détruit tout sur son passage ?

    C’est que le vrai amour est en fait une réalité si belle, mais en même temps tellement sérieuse qu’on ne peut pas jouer n’importe comment avec elle.

    L’amour qui commence à se donner, sait dès le départ qu’il ne pourra plus changer. L’amour ne se donne pas à n’importe qui, n’importe quand et n’importe comment, mais quand il le fait, il poursuit sa route jusqu’au bout, quelles qu’en soient les conséquences. Et je vais prendre ici quelques exemples bien concrets pour me faire comprendre.

    Si j’ai décidé de dire bonjour avec le sourire à une personne que je connais à peine mais que je rencontre souvent en allant au travail, je ne pourrai plus le lendemain faire comme si cette personne n’existait plus pour moi. Ça y est, c’est fini, je me suis engagé avec elle, au moins pour un bonjour.

    Si je serre la main à quelqu’un pour la première fois, je le la lui serrerai désormais chaque fois que l’occasion s’en présentera, sinon ce serait lui faire du mal. Si je donne amicalement une tape sur l’épaule à un collègue ou à une collègue, je devrai aussi recommencer quand les mêmes circonstances se représenteront.

    Car la voie de l’amour est une porte qui s’ouvre sur l’infini, sur un chemin qui commence aujourd’hui mais dont on ne connaîtra la fin qu’au dernier jour, car ce chemin est l’aventure passionnante de la vie et de toutes ses relations.

    Je ne parle pas ici des problèmes pratiques qui font que quelqu’un part en voyage, qu’on ne se retrouve plus toujours avec les mêmes personnes, que le temps et les activités changent : cela ce sont les conditionnements de la vie qui peuvent déranger l’expression de notre amour, c’est bien normal. Non, je veux parler de la qualité de l’amour que chacun porte en lui pour tout le reste de l’humanité et qui peut non seulement rester intact dans notre cœur, mais grandir sans cesse au fil du temps. (à suivre…)


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