• [Pour nous préparer à la lecture du chapitre 14 de l’Evangile de Luc, nous reprenons ce commentaire publié dans ce blog en 2021] 

    S’élever en Dieu

    « Qui s’élève sera abaissé, qui s’abaissera sera élevé. » (Mt 23,12) (cf. Lc 14,11 : « Qui s’élève sera abaissé ; qui s’abaisse sera élevé. »)

    Quelle phrase extraordinaire que celle-ci ! Mais ici aussi il faut bien comprendre. Et pour cela nous devons partir du verset précédent en Mt 23,11 : « Le plus grand parmi vous sera votre serviteur. » Et nous nous souvenons ici des phrases de Mt 20,26-28 : « Celui qui veut devenir grand sera votre serviteur ; et celui qui veut être le premier sera votre esclave. Ainsi le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour la multitude. » Des phrases qui reprennent presque mot à mot le passage de Mc 10,43-45 que nous avions commenté en son temps.

    Jésus passe son temps à nous rappeler que nous sommes tous frères en humanité et que jamais quelqu’un de nous ne devrait se sentir plus grand, plus important que les autres, car ce serait comme se couper du reste de l’humanité. Le dessein d’amour de Dieu entre les hommes est possible seulement si tous les hommes s’aiment en se servant les uns les autres, à l’exemple du Christ lui-même qui est Dieu et qui pourtant est descendu parmi nous pour être un homme comme les autres.

    Tout est lié à notre Evangile des béatitudes. L’homme est grand en Dieu quand il est pauvre, quand il est humble, quand il se met au niveau de tous ses frères et sœurs en humanité. Pourquoi cela ? Parce que se séparer des autres en se croyant supérieur est comme casser le corps du Christ que représente l’humanité. Imaginons qu’un de nos membres ou une des parties importantes de notre corps se sente tout à coup supérieur aux autres et veuille les dominer, la main, le cerveau, le cœur, ce serait sa mort et en même temps la mort du corps tout entier. L’harmonie de l’humanité ne peut se faire que si tous les hommes restent liés entre eux au même niveau. On ne peut pas s’élever au-dessus des autres sans se faire du mal à soi-même et à tous ces autres.

    Mais alors pourquoi si quelqu’un s’abaisse, s’il se met au service de ses frères comme Jésus le demande, voilà qu’il va être tout à coup élevé ? C’est qu’il s’agit ici d’une élévation complètement différente. Quand nous avons découvert que Jésus et le Père sont attirés par deux ou trois hommes qui s’aiment selon la loi du ciel, cela veut dire que le ciel se déverse tout à coup sur la terre, et alors voilà que ces hommes sont soudain élevés au niveau du paradis, dans la dynamique de la réciprocité qui se vit au cœur de la Trinité et qu’ils vivent déjà « sur la terre comme au ciel ». Miracle du Royaume de Dieu qui commence déjà parmi nous sur la terre, même si ce n’est pas encore parfait comme quand nous serons en Dieu au ciel pour toujours.

    Mais c’est une élévation soudaine qui ne change rien à notre rapport avec les autres hommes. Les saints en sont un exemple merveilleux : ils ont déjà un pied au ciel, mais sur la terre ils sont envoyés à nouveau en mission pour s’abaisser au service des hommes comme Jésus l’a fait avant eux. Et plus l’homme s’élève au ciel en pénétrant déjà dans le Royaume plus il a la force de s’abaisser à donner sa vie pour les autres hommes. Miracle de l’amour qui libère de toutes les tentations de pouvoir et de domination que le diable essaye chaque jour de mettre en nous… 

     


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  • [Pour nous préparer à la lecture du chapitre 14 de l’Evangile de Luc, nous reprenons ce commentaire publié dans ce blog en 2019] 

    Permis d’aimer

    « Il est donc permis de faire le bien le jour du sabbat. » (Mt 12,12) (cf Lc 14,3 : « Est-il permis, oui ou non, de faire une guérison le jour du sabbat ? » et cf. aussi Lc 6,9 et Lc 13,15-16)

    Mais notre monde est complètement fou ! Le monde du temps de Jésus et notre monde d’aujourd’hui, c’est à peu près la même chose ! L’homme est tellement désorienté que Dieu doit descendre du ciel pour lui dire que le bien est permis ? Comme si nous ne le savions pas…

    Mais que se passe-t-il alors dans notre monde malade ? On ne va pas parler ici du mal qui essaye de régner sur le monde et qui empêche le bien de se développer, c’est bien évident. Mais pensons simplement aux personnes « normales » que nous sommes la plupart d’entre nous, avec le désir de faire le bien, de le vivre et de le partager avec nos frères et sœurs en humanité.

    Voilà que Jésus vient nous réveiller et nous libérer en même temps. Car il veut nous faire découvrir que nous sommes tellement perdus, peut-être avec la meilleure volonté du monde, que nous ne savons plus où se trouve la boussole du bien. Nous sommes capables de passer des journées entières à faire beaucoup de choses, à nous agiter dans tous les sens sans réussir à faire vraiment « le bien ». Et ce sont par exemple les hommes de religion qui transforment le message de Dieu en lois morales qui nous paralysent ou les parents qui interdisent à leurs enfants de savoir vraiment vivre, sous le prétexte de les protéger de tous les dangers de la société, ou les éducateurs de tous genres qui transforment les études en une pénitence qui devient souvent le contraire de la joie et de l’aventure de la découverte que la culture devrait nous donner… Je sais que je fais là une caricature exagérée et un peu trop pessimiste, mais c’est pour nous aider à comprendre combien le message de Jésus devrait nous secouer complètement si nous savions l’écouter et le mettre en pratique.

    Et quand nous savons que le « bien » le plus grand est l’amour et surtout l’amour réciproque, nous ferions bien de nous rendre compte que nous passons une grande partie de notre journée à avoir peur d’aimer, peur d’être nous-mêmes, peur de dire simplement la vérité, peur de pardonner ou de donner notre vie… Parce que ce n’est pas prudent, parce que les gens vont nous regarder de travers, parce que les autres n’aiment pas et donc pourquoi nous sentir obligés de le faire… Alors que l’amour et le bien pourraient être notre respiration de chaque instant et que personne au monde ne devrait pouvoir nous empêcher de « faire le bien ». Mais pour « faire le bien » et vivre l’amour réciproque, il faut d’abord nous lier étroitement à d’autres personnes qui ont le même but, sinon la bataille devient impossible. Heureusement que Jésus est là et qu’il nous montre le chemin, un chemin qui change tout quand nous pensons réellement chaque matin : aujourd’hui j’ai le droit de « faire le bien », le droit avant même le devoir. Car le devoir est parfois lourd et vécu à contre cœur, tandis que le droit libère…

     

     


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  • « Je vous le déclare : vous ne me verrez plus jusqu’au jour où vous direz : béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! » (Lc 13,35)

    Nous voici arrivés à la dernière phrase de notre chapitre 13. Mais à qui s’adresse Jésus ? Il y a quelque chose d’un peu irréel dans son discours. Lorsqu’il dit : « vous ne me verrez plus », cela veut dire qu’il parle à ceux qui sont en train de l’écouter, ou qui au moins sont présents comme lui à Jérusalem : à la fois tous ces gens de Jérusalem qui ont trahi son amour et ses disciples. Jésus va s’en aller et plus personne de ces présents ne va le revoir…

    Mais qui va dire alors : « Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! » ? Ses disciples qui le reverront après la résurrection, pour quelques jours ? Ou bien l’humanité, à la fin des temps lorsque Jésus reviendra sur terre dans toute sa gloire ? Je crois que Jésus s’adresse en quelque sorte à tout le monde et à personne. Et cela n’a pas d’importance. Il s’adresse à l’humanité d’alors, d’aujourd’hui et de toujours, afin que quiconque entendra ses paroles comprenne son message.

    Et son message est bien clair. Jésus est venu pour nous rassembler dans l’unité qui règne au ciel. Il nous invite à entrer avec lui au paradis. Il nous laisse libres de le faire, mais il nous montre les conséquences désastreuses d’une liberté utilisée de travers. Et il veut nous convaincre que nous avons une chance incroyable d’avoir un Dieu qui nous a créés, qui nous pardonne toujours, qui va donner sa vie pour nous jusqu’à son dernier souffle sur cette terre, et que ce serait bien triste de refuser un tel amour… Les chapitres suivants, surtout ceux de la passion, de la mort et de la résurrection de Jésus nous donneront alors une lumière définitivement claire sur ce cadeau inouï que Dieu nous fait au prix de sa vie pour l’éternité…

     


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  • « Jérusalem, Jérusalem, toi qui tues les prophètes, toi qui lapides ceux qui te sont envoyés, combien de fois j’ai voulu rassembler tes enfants comme la poule rassemble ses poussins sous ses ailes, et vous n’avez pas voulu ! Maintenant, Dieu abandonne votre Temple entre vos mains. » (Lc 13,34-35)

    Il est impressionnant de voir comment l’Evangile réussit à synthétiser en deux phrases toute l’histoire du salut de l’humanité. Le dessein de Dieu sur l’humanité, c’est l’unité en Dieu du genre humain. C’est pour cela que Dieu nous a créés. Dieu n’a pas d’autre but que de rassembler ensemble tous ses enfants « comme la poule rassemble ses poussins sous ses ailes ». Le problème, c’est que Dieu nous a en même temps créés libres. Il ne veut pas que nous le suivions malgré nous, il voudrait que nous vivions cette unité divine en Lui, en pleine conscience et non pas comme des marionnettes entre ses mains. Et voilà que la cité sainte, Jérusalem, qui était le cœur de ce dessein de Dieu sur l’humanité, est en train de rejeter ce dessein. Jérusalem a lapidé et tué les prophètes et elle va maintenant tuer Jésus, le Fils de Dieu.

    Mais qui est Jérusalem ? Ses chefs, ses grands prêtres, la foule ? Bien intelligent celui qui saura répondre ? Qui va tuer Jésus ? Tout le monde et personne de précis. C’est en fait le mal, le diable lui-même qui est entré au fond du cœur de Jérusalem. Jérusalem est tombée dans le piège du mal et il est trop tard pour revenir en arrière. Dieu qui avait sauvé plusieurs fois des villes dans l’histoire de l’Ancien Testament, parce qu’il y avait trouvé au moins une poignée d’hommes justes, va enlever sa protection au Temple lui-même qui était le signe et le symbole de sa présence au milieu de son peuple. Et l’on sait que dans quelques années les soldats romains vont détruire ce Temple irrémédiablement.

    Mais n’oublions pas que l’Evangile est la Parole de Dieu adressée pour toujours à toute l’humanité et à chacun de nous en particulier qui vivons sur cette terre, 2000 ans après sa mort et sa résurrection. Dieu s’adresse à la Jérusalem d’alors, mais à travers son discours il veut donner une leçon à ses disciples de l’époque et à chacun de nous aujourd’hui C’est vrai que Dieu nous a créés libres, mais il est une manière d’utiliser notre liberté qui est une sorte de suicide collectif. Alors voilà qu’à peine tourné le dos à ceux qui ont refusé de le suivre, Jésus est en train de se préparer un nouveau peuple qui, cette fois-ci, pourra le suivre jusqu’au bout, surtout qu’avec sa mort, sa résurrection et l’envoi de l’Esprit Saint ce peuple aura une grâce toute nouvelle pour répondre pour de bon à l’appel de Dieu. La conclusion de notre chapitre, la dernière phrase que nous allons bientôt contempler, nous donnera la clé pour comprendre tout l’ensemble. (A suivre…)

     


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  • « Allez dire à ce renard : Aujourd’hui et demain, je chasse les démons et je fais des guérisons ; le troisième jour, je suis au but. » (Lc 13,32)

    Voilà un passage impressionnant. Bien sûr, nous savons que Jésus est Dieu, mais il n’en est pas moins homme, c’est le miracle de l’incarnation. Et voir un homme qui avance aussi consciemment vers l’épreuve qui l’attend et qui le fait apparemment sans hésiter, cela demande un tel héroïsme ! Cette phrase, c’est la réponse de Jésus aux pharisiens qui viennent de lui dire : « Va-t-en, pars d’ici : Hérode veut te faire mourir. » Et non seulement Jésus répond en toute simplicité qu’il sait où il va, mais il ajoute encore : « Il faut que je continue ma route aujourd’hui, demain et le jour suivant, car il n’est pas possible qu’un prophète meure en dehors de Jérusalem. »

    En Luc 9,22, Jésus avait déjà averti ses disciples, après la confession de foi de Pierre : « Il faut que le Fils de l’homme souffre beaucoup, qu’il soit rejeté par les anciens, les chefs des prêtres et les scribes, qu’il soit tué, et que, le troisième jour, il ressuscite. » Jésus sait bien qu’un tas de gens veulent sa mort. Il est sans doute le plus grand bouc émissaire de l’histoire, cette image d’une personne dont on veut se débarrasser à tout prix parce qu’il dérange trop de monde, parce qu’il dit la vérité. En même temps, Jésus semble tranquille qu’il pourra accomplir sa tâche jusqu’au bout, car le Père est avec Lui et ne laissera pas le diable et ceux qui se laissent entraîner par le diable l’empêcher de finir sa mission. Mais une fois cette mission parvenue à son but, tout va se précipiter et Jésus sait bien que ce sera terrible : il passera par l’épreuve de la nuit du Gethsémani avant la trahison de Judas et ce sera ensuite la montée au Calvaire.

    Je ne sais pas ce que vous ressentez devant ces quelques mots, mais ceux qui me frappent le plus sont les derniers de notre phrase : « Je suis au but. » Jésus est descendu du ciel, il est né, il a vécu discrètement parmi les hommes pendant 30 ans, puis il a dévoilé finalement sa mission pendant ses trois ans de vie publique, et dans tout cela il avait toujours son « but » devant lui. Je crois que, si nous voulons vraiment être disciples de Jésus, nous devons nous aussi comprendre quel est notre but durant notre voyage sur cette terre. Notre but ce sera notre appel, notre vocation, notre passion, tout ce qui peut donner un sens profond à notre vie. Ce but sera sans doute assez vague au début, mais il deviendra de plus en plus clair au fil du temps. Nous passerons certainement aussi de nombreuses épreuves pendant lesquelles ce but ne sera plus clair. Ou bien il nous semblera tout à coup trop utopique, impossible à réaliser. Mais ce but est au fond à la fois notre boussole, notre lumière et notre croix.

    Chercher passionnément toujours plus à comprendre vraiment quel est notre but et en même temps comment ce but peut s’harmoniser avec celui des personnes les plus proches qui nous accompagnent, c’est trouver un sens à tout. C’est pouvoir communiquer aux autres le pourquoi de notre existence. C’est être entraîné dans la plus belle des aventures, même si elle est loin d’être facile, mais c’est aussi avoir la joie de partager le plus beau trésor que Dieu a mis dans notre cœur quand il nous a créés et que peu à peu nous avons appris à découvrir, comme le cœur de notre vie. Rêve, contemplation, bonheur de la découverte, qui peut se transformer parfois en un terrible cauchemar, mais avec l’assurance qui grandit peu à peu que Dieu est là au fond de tout cela, qui nous attire, nous guide et nous porte sans cesse un peu plus en son paradis.

     


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