• Si nous avons trouvé déjà beaucoup de clés et de passepartouts pour ouvrir les portes et les barrières qui se ferment devant nous, il en est une assez radicale que l’on oublie trop souvent : apprendre à ne pas se défendre quand on nous critique. Je parle bien ici de critique verbale ou de la pensée. Ne pas vouloir se défendre quand on est attaqué physiquement est un autre sujet, celui de la non-violence, mais nous en parlerons une autre fois.

    Mais lorsqu’on nous juge, on nous critique, en face ou par derrière, en privé ou devant tout le monde, pourquoi notre premier réflexe est-il presque toujours de vouloir nous justifier et nous défendre, avant même peut-être d’avoir bien compris ce que l’autre nous reproche ?

    Le résultat est immédiat : le fossé va encore grandir avec celui qui nous attaque. Il va chercher et probablement trouver d’autres arguments pour nous montrer qu’il a raison. Nous allons faire de même à notre tour. Et tout ce que nous aurons gagné ce sera de hausser encore plus les murs qui nous séparent, sans plus aucun espoir de se comprendre.

    Pour reprendre comme exemple le sujet abordé il y a deux jours dans notre rubrique « Provocations », c’est-à-dire pourquoi les églises de France sont-elles vides, il y a bien des manières de réagir. La manière la plus spontanée sera de ne pas accepter cette critique, en disant que ce n’est pas vrai. Il y a beaucoup d’églises en France ou l’on voit des jeunes, des familles, des enfants. Et puis, dans beaucoup de paroisses, il y a un renouveau remarquable. Les gens ne sont peut-être pas très nombreux, mais la qualité de la vie chrétienne est désormais évidente et la qualité est tellement plus importante que la quantité ! Il y a un retour au spirituel dans les médias. Le journal La Croix est un quotidien qui se vend bien. Et puis regardez le Pape François. Et pensez à tous ces pays d’Amérique latine, d’Afrique ou d’Asie où les églises sont pleines ou il y a beaucoup de vocations à la vie sacerdotale ou religieuse…

    Tous ces arguments sont en partie valables, mais ils nous empêchent de regarder en face le problème, et notre interlocuteur, qui est peut-être bien disposé envers nous au départ, avec une intention de vrai dialogue, va vite s’en aller avec l’impression que nous sommes de mauvaise foi.

    C’est tellement plus beau d’accepter les critiques, pas pour se décourager, pour se déprimer et se sentir soudain tout misérables ou incapables. Là n’est pas la question. La critique des autres n’est pas forcément malveillante et méchante. Nos amis d’autres bords sont comme nous en recherche et quelle joie pour eux et pour nous lorsque nous acceptons le défi de regarder en face les questions telles qu’elles se posent. C’est une véritable libération pour eux et pour nous. C’est le départ d’un dialogue authentique qui nous fera du bien à nous en premier et d’une recherche ensemble de nouveaux points communs à développer, de nouvelles pistes à explorer.

     

    Lorsque nous restons figés sur nos positions, nous ne progressons pas, mais surtout les autres se détournent de nous pour toujours. Tandis que si nous écoutons sincèrement les questions et les critiques, nous découvrons de nouveaux éléments auxquels nous n’avions pas pensé auparavant, nous nous enrichissons et surtout nous nous faisons de nouveaux amis, touchés par notre humilité et notre franchise. Car eux aussi se posent des questions sur eux-mêmes, eux aussi ont toujours envie de se défendre, parce qu’ils n’ont peut-être jamais trouvé quelqu’un qui discute avec eux de manière ouverte et bienveillante. Nous pourrions peut-être être les premiers. Qu’avons-nous à perdre à écouter et comprendre les autres ?


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  • Oui, c’est encore une provocation, bien sûr, j’exagère, mais tout de même on ne peut pas continuer à penser que le christianisme se porte bien et à voir toutes ces églises qui se vident. Je parle ici pour la France, évidemment. Chaque pays peut essayer de regarder en face sa propre situation. Mais dans les églises où je suis passé récemment en France, la moyenne d’âge devait être d’environ 75 ans. C’est formidable, cela veut dire que la médecine a fait tellement de progrès qu’on ne meurt plus maintenant à 60 ans, 70 ans ou même 80 ans. Mais cela n’enlève rien à notre problème. Pourquoi le message chrétien attire actuellement si peu ?

    Certaines causes de cette crise remontent sans doute à plusieurs siècles, lorsque les chrétiens ont tellement oublié de vivre la liberté, l’égalité et la fraternité présentes dans l’Evangile que des gens sont venus proposer ce message dans une « révolution » qui s’est faite contre l’Eglise et le christianisme. C’est tout de même un comble !

    Mais nous ne sommes pas arrêtés là, nous avons continué, nous chrétiens, à nous sentir supérieurs aux « autres », à leur manquer de respect, à les juger au lieu d’essayer de les comprendre et de les attirer par notre mode de vie, et « les autres » se sont rebellés, ils nous ont inventé la « laïcité », comme un remède pour guérir la société de tous les abus de religion. La laïcité à la française a sans doute eu et a encore bien des côtés fanatiques, mais cela n’enlève rien à nos propres « abus » que nous devons bien reconnaître humblement.

    Nous avons transformé le message libérateur de l’Evangile en un mauvais moralisme par lequel nous nous sommes crus en devoir de juger le monde entier qui allait vers sa perdition et le monde entier a commencé à se moquer de nous.

    Nous nous sommes alors repliés encore plus sur nous-mêmes, sûrs de notre supériorité, et avons commencé à regarder ce monde hostile avec mépris. Tous ces gens qui se laissent prendre par le matérialisme, la société de consommation, qui ne pensent qu’à des idéaux futiles, culturels ou sportifs ou je ne sais quoi et qui oublient les vraies valeurs. Et le monde s’est détourné de nous encore plus.

    Notre monde moderne est certainement malade par bien des côtés par ses injustices, sa corruption, ses abus de pouvoir, sa violence, mais il est aussi très beau par toutes ses découvertes scientifiques, technologiques, tous ses progrès incalculables dans une foule de domaines, son foisonnement culturel et artistique, ses idéaux sportifs qui continuent à drainer les foules, sa vie associative étonnante…

     

    Heureusement que nous avons le Pape François qui commence à attirer même des gens qui se moquaient de l’Eglise. Mais le Pape François ne va pas résoudre, à lui tout seul, nos problèmes. Si nous croyons que le message du Christ est vraiment une chance, un remède, un trésor capable de renouveler de l’intérieur la vie de l’humanité entière, il faut certainement changer quelque chose à notre manière de penser, de vivre, de nous exprimer. Ces quelques lignes de blog, volontairement trop courtes, ne peuvent être que le début de notre recherche, mais cherchons, il n’y a pas de temps à perdre, si nous ne voulons pas continuer à perdre la bataille de l’humanité !  


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  • Bien chers lecteurs, depuis que nous avons lancé ce blog, vous avez bien noté qu’un de mes sujets préférés est sans aucun doute celui de « l’interdépendance » dont cette rubrique porte le nom.

    Oui, je suis vraiment tombé amoureux depuis quelques temps de l’interdépendance. Il me semble que c’est là l’avenir de l’humanité, sa libération, son accomplissement. Je suis d’une génération qui a été bercée continuellement par l’idée de l’indépendance. Nous en avons déjà parlé, c’est très beau l’indépendance, et puis après ? Nous allons rester bien tranquilles, indépendants les uns des autres chacun de son côté ?

    Il est trop évident désormais que tous les hommes, tous les peuples sont interdépendants, comme nous l’avons encore souligné récemment avec les accords internationaux sur le climat et l’environnement.

    Mais la question que je me pose aujourd’hui, à moi-même d’abord et à tous les gens que je connais : c’est bien beau cette interdépendance, mais est-ce que nous sommes tristes ou heureux d’accueillir cette réalité dans notre vie de tous les jours ?

    Ou, pour le dire avec d’autres mots, sommes-nous obligés d’être interdépendants, contre notre volonté, ou bien contents, agréablement surpris que l’humanité se dirige vers ce nouvel horizon à grande vitesse ?

    Si l’on veut être sincère, la réponse n’est pas aussi facile et immédiate qu’il peut y paraître à première vue. Je crois qu’il faut y penser un moment. Notre rubrique sera sans doute un outil pour éclairer un peu plus la question, mais on ne peut pas la traiter superficiellement, car il en va du sens même de notre présence sur cette terre.

    Il est évident qu’il ne sera jamais facile d’être interdépendants avec des fous, des gens prêts à tout pour prendre le pouvoir, des hommes sans scrupules qui pensent que la loi de l’humanité est la loi de la jungle qui permet au plus fort de s’en sortir. Alors que faire, car on ne peut pas être interdépendant seulement avec les gens qui nous plaisent et pas les autres ?

    Mais d’autre part, nous avons déjà fait tellement de belles expériences de côtoyer des personnes différentes qui nous ont enrichis, de partager avec des amis de tous les coins du monde des moments de bonheur ou même de souffrance vécue ensemble, des moments où, avec les autres, peu ou beaucoup à la fois, nous nous sommes sentis plus hommes. Nous avons pu connaître la joie de nous sentir en quelque sorte au cœur de l’univers avec des horizons immenses qui s’ouvrent devant nous pour toujours et qu’il serait trop triste de goûter chacun tout seul dans son coin.

    Qu’en pensez-vous ? C’est là peut-être notre plus grand défi, notre plus grande chance et en même temps notre plus grand problème…

     

     

     


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  • Et voilà Noël ! Noël que nous avons attendu en quelque sorte toute l’année, Noël qui veut dire la paix, la joie, la chaleur de la famille. Mais je voudrais revenir ici sur l’origine du mot Noël que l’on connaît très bien, mais qu’on oublie quand même : Noël veut dire simplement « naissance ». Avant la naissance de Jésus qui est devenue une fête chrétienne, il y avait déjà, au temps de l’empire romain, la fête de la naissance de quelques dieux.

    La naissance a toujours été un symbole tellement fort : c’est le symbole de la vie-même. Quand il n’y a plus de naissance ou de naissances, cela veut dire qu’il n’y a plus d’avenir, plus de renouveau, tout va vieillir inexorablement et finalement disparaître. L’humanité a besoin de toujours renaître de ses cendres, de ses problèmes, de ses relents de mort.

    Parmi les quelques citations que j’ai rassemblées en bas de l’article, j’ai beaucoup aimé celle qui dit : « Qu’est-ce que tu souhaites pour Noël ? Avoir des souhaits. »

    La pire catastrophe qui peut arriver à un homme, à une femme, à un enfant, à une personne âgée ou malade, ce serait de ne plus avoir de souhait. Cela voudrait dire qu’il est mort ou qu’elle est morte dans son cœur, dans son esprit.

    C’est donc le vœu que je voudrais exprimer aujourd’hui de tout mon cœur, à tous les lecteurs, à toutes ces personnes chères que je vais rencontrer aujourd’hui et demain et durant toute cette belle période des fêtes : je voudrais souhaiter à chacun d’avoir des souhaits.

    Et je voudrais être particulièrement proche de tous ceux qui souffrent en ce moment, comme nos amis réfugiés, ceux qui ne pourront pas passer Noël en famille, ceux qui viennent de perdre un être cher : la vie est toujours là, tant que nous pouvons encore souhaiter pour nous-mêmes et pour toute l’humanité de vivre et de renaître, de retrouver la lumière si elle l’a peut-être perdue en route.

    Il ne suffit évidemment pas de formuler ces belles pensées comme des paroles vides ou impossibles, nous sommes tous là pour que ces paroles deviennent au plus tôt réalité, pour tous ceux que nous connaissons et qui en ont tellement besoin.

    Joyeux Noël à tous ! Joyeuse naissance ou renaissance, dans la joie d’avoir encore un cœur qui bat et qui peut s’ouvrir à la vie !

     

     

    Citations

     

    « J'ai entendu les cloches de Noël. J'ai écouté les vieux chants familiers et leurs mots puissants et doux qui rappellent : ‘Paix sur Terre aux hommes de bonne volonté !’ »
    Henry Wadsworth Longfellow

    « Quand on décore un sapin de Noël, on a toujours l'impression qu'il nous faudrait une guirlande de plus. »
    Loi de Murphy

    « L'enfance c'est de croire qu'avec le sapin de Noël et trois flocons de neige toute la terre est changée. »
    André Laurendeau

    « Noël est là, ce joyeux Noël, des cadeaux plein les bras, qui réchauffe nos cœurs et apporte la joie, jour des plus beaux souvenirs, plus beau jour de l'année. »
    Washington Irving

    « Quand on laisse mourir le feu de Noël, il n'y a plus qu'un moyen de le rallumer. C'est d'aller chercher le feu des étoiles. »
    Pierre Jakez Hélias

     « Qu'est-ce que tu souhaites pour Noël? Avoir des souhaits... »
    Philippe Geluck

    « Noël, c'est la veille, c'est l'attente. »
    Georges Dor

    « Noël n'est pas un jour ni une saison, c'est un état d'esprit.
    John Calvin Coolidge »

    « Bientôt Noël... Cette jolie période de l'année où l'on ne songe plus au passé ni au futur mais rien qu'aux présents ! »

    Antoine Chuquet

    « Sans les cadeaux, Noël ne serait pas Noël. »
    Louisa May Alcott 

     




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  • Le 5 juin dernier, dans cette même rubrique « Batailles », j’avais déjà écrit un article un peu fort sur la « peur de l’islam » qui grandit malheureusement en occident. Je voudrais revenir aujourd’hui sur le sujet, poussé par ma dernière visite en France d’il y a quelques jours, qui m’a vraiment choqué. Cette peur de l’islam ne cesse de grandir dans des proportions inquiétantes.

    On trouve maintenant en France, un peu partout, toute une littérature qui prétend expliquer « la vérité » sur l’islam et ses projets malsains, voire diaboliques. Et le pire c’est que ceux qui écrivent de tels propos se présentent comme de grands experts de la question, d’anciens musulmans convertis qui « savent » de quoi il s’agit, ou des musulmans « ouverts » qui ont fui la persécution du monde islamique et se sont réfugiés en Europe, ou des penseurs « chrétiens » qui démontent scientifiquement toutes les « contradictions » de l’islam et du Coran qu’ils prétendent connaître mieux que les musulmans eux-mêmes.

    Je n’entrerai pas sur le terrain de ces discussions stériles et malsaines, car ce serait tomber dans le piège de confondre des bribes de vérités, prises en dehors de leur contexte, avec la vérité tout entière. Et qui peut prétendre posséder la vérité ? Mais ce qui est sûr, c’est que la vérité qui vient de la peur ne sera jamais une vérité. Ou bien alors que ce soit la peur « pour » quelqu’un, mais pas la peur « de » quelqu’un. Dans toute cette fausse littérature, je n’ai pratiquement pas trouvé une phrase ou une page qui me montrent que leurs auteurs aiment les musulmans et ont peur « pour eux ».

    Alors, bien sûr, si on n’est pas capable d’essayer de comprendre les musulmans, qui souffrent certainement encore plus que nous en ce moment de cette situation dramatique liée au terrorisme ou à l’Etat islamique, si on n’est pas capable d’ « aimer » les musulmans, c’est-à-dire d’entrer dans leur cœur, dans leurs souffrances et leurs peurs à eux, de vouloir leur bien de tout notre cœur, il n’y a évidemment aucune autre solution que de se fuir les uns les autres. Il n’y a plus d’autre solution que d’ériger de nouveaux murs pour nous isoler un peu plus, pour rester seulement avec des gens « en qui nous aurions confiance »…

    Il est normal d’avoir peur du « mal » qui travaille sournoisement dans le monde et pas seulement chez les autres, mais aussi en chacun de nous. Mais la peur ne doit être qu’une occasion de réfléchir, de s’entraider encore plus. La peur ne sera jamais une issue, elle ne peut être qu’un obstacle dont il faut sortir au plus vite. Il ne faut jamais cultiver la peur. Il faut chercher de toutes nos forces de nouveaux moyens de nous comprendre, de collaborer, et surtout de nous connaître dans nos différences et de nous aider à chasser ensemble nos mauvais esprits.

    S’il y a en ce moment des musulmans sincères qui nous semblent devenus fous (mais il y a aussi de faux musulmans qui se servent de ce terrorisme pour d’autres buts), n’oublions pas que notre civilisation chrétienne a produit des guerres de religions, a brûlé sur des bûchers des gens qui voulaient faire progresser l’humanité et a tué des millions de personnes il y a de cela seulement 70 ans, sous prétexte de purification ethnique. Nous avons tous nos démons. Et on ne peut pas oublier que, dans cette Syrie aujourd’hui martyrisée, les chrétiens et les musulmans étaient encore il y a 100 ans chacun 50% de la population du pays et vivaient ensemble en harmonie. Et ce sont les musulmans syriens d’il y a 100 ans qui ont ouvert tout grands leur bras, avec leurs frères chrétiens, pour accueillir en Syrie les centaines de milliers d’arméniens qui fuyaient le génocide perpétré par les Turcs d’alors…

     

    On ne peut pas tout confondre, on ne peut pas se laisser aller à la panique sans réfléchir. Il faut sortir de cette impasse et le plus vite possible, si l’on ne veut pas provoquer des incompréhensions et des conflits encore plus grands. Je vis personnellement au milieu de musulmans depuis 45 ans et jamais je n’ai eu peur « des musulmans ». J’ai peur des fous, comme tout le monde, et je les évite bien sûr. Mais je tiens à dire que si on entre dans cette logique de la méfiance universelle, ce serait presque mieux de se suicider tout de suite : n’est-ce pas mieux de croire en l’humanité présente au fond du cœur de chaque homme ?


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