• (Suite de l’article sur « la France et les pays musulmans »)

    Je voudrais revenir aujourd’hui sur mes paroles très fortes devant l’attitude inconsciente de nos dirigeants français dans la gestion récente du terrorisme. Essayons cette fois-ci de trouver des solutions positives…

    Je continue à dire qu’on ne gagne jamais une guerre, mais qu’il est cependant possible de « gagner la paix ». J’ai appris à l’école que la France avait gagné la première guerre mondiale. Quelle victoire ? Avec déjà des millions de morts et surtout la préparation immédiate d’une guerre de revanche qui allait être encore pire que la première.

    Mais que s’est-il passé après la seconde guerre mondiale ? S’est-on lancé tout de suite dans la spirale de la violence et de la vengeance ? Non, car il y a eu des hommes héroïques et courageux qui ont décidé de tourner la page et de « gagner la paix ». Et cette paix dure depuis maintenant 75 ans et les Européens s’en sentent tout de même beaucoup mieux. Dommage qu’ils n’aient pas complètement compris la leçon et qu’ils continuent à faire des guerres dans d’autres continents et par pays interposés… mais ce serait un autre sujet…

    Alors pourquoi n’essayons-nous pas de « gagner la paix » avec nos amis musulmans ? Que veut dire cette phrase qu’après la décapitation de ce pauvre enseignant plus rien ne sera comme avant ? Que désormais nous allons faire la guerre à tout ce qui nous dérange chez les musulmans, ou bien que nous n’allons plus laisser passer aucune occasion de construire la paix ? Alors, je comprendrais mieux cette phrase.

    Il y a dans le monde musulman une foule de personnes merveilleuses, sincères, honnêtes, que nous sommes en train de décourager par nos positions intransigeantes et extrémistes. Nous ne voyons pas qu’à cause de nos réactions inconscientes ces hommes positifs ne peuvent plus parler, ils ne peuvent plus faire le ménage chez eux, si l’on peut dire, parce qu’ils ne peuvent plus convaincre leurs confrères musulmans de prendre le chemin de la paix si tous les musulmans sentent que la France est en guerre contre eux.

    La France n’est pas en guerre contre les musulmans ou contre l’islam. Il faut absolument qu’elle corrige tout de suite cette image qu’elle est en train de donner. Elle doit simplement attraper les criminels et les mettre en prison, avec l’aide des musulmans de bonne volonté. Il ne s’agit pas de guerre, mais de travail de la police contre le crime, devant lequel tout homme sincère sera toujours d’accord.

    Alors qu’attendent nos dirigeants pour multiplier les rencontres positives, les gestes de paix avec les hommes sincères du monde musulman, comme l’a fait si bien le Pape François avec l’iman d’Al Azhar en Egypte ? C’est seulement de cette manière que nous pourrons vaincre la peur, dépasser nos sentiments ridicules de supériorité, apprendre de nouveau à respecter les autres dans leur sensibilité différente et ne plus considérer comme absolue cette liberté d’expression, qui voudrait dire que chaque individu va maintenant ériger en lois ses caprices égoïstes, alors que le seul absolu devrait être la paix et les relations harmonieuses entre les hommes : sinon nous n’avons rien compris à l’humanité.   


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  • Vous pensez que le coronavirus a gagné la bataille ? On pourrait se le demander sérieusement, mais quelle bataille ? Qu’il ait réussi à décimer l’humanité, certainement pas. Il n’y a même pas eu dans le monde un million de décès jusqu’à maintenant dus au coronavirus. Et si l’on pense que la plupart de ces décès, qui sont évidemment bien tristes, sont ceux de personnes âgées et déjà fatiguées qui auraient pu être emportées par une simple grippe, cela n’est tout de même pas encore une catastrophe mondiale.

    Ce qui est beaucoup plus grave, c’est qu’il a réussi à paralyser le monde entier en quelques mois et qu’on ne sait plus comment s’en débarrasser. Mais là où il a surtout gagné une première bataille c’est celle des fameux « gestes barrières » qui empoisonnent maintenant notre vie de tous les jours. Et c’est là que nous devons réfléchir et réagir. Je remarque d’ailleurs que ces « gestes barrières » ont été respectés beaucoup plus dans la civilisation individualiste de l’Europe occidentale que dans des pays comme ceux du Moyen Orient ou de l’Afrique.

    Pourquoi ? Parce que ces « gestes barrières » impliquent désormais la méfiance ou la peur de n’importe quelle personne rencontrée dans la rue ou dans un magasin, qui devient un ennemi potentiel, celui qui risque de nous contaminer et de nous donner son virus. Dans une société où la peur de l’autre est devenue un critère incontournable pour gagner les élections politiques, on se demande où va finir notre pauvre humanité.

    Alors, puisque maintenant nous ne pouvons plus faire grand-chose pour changer les décisions des gouvernements sur ce point, il nous reste à gagner la bataille au niveau personnel de chacun. Je peux déjà gagner la bataille de l’intention. Si je suis contraint de mettre mon masque, je peux y mettre l’intention de le faire pour le bien des autres, connus ou inconnus, pour ne pas risquer de leur donner ce virus dont je pourrais être porteur sans le savoir. Faire de ce geste un acte de bonté et de bienveillance vis-à-vis des autres, plutôt qu’un geste de peur des autres.

    Le coronavirus est donc au fond l’occasion de faire un excellent examen de conscience pour me rendre compte si c’est moi et mon pauvre égoïsme ou si c’est l’autre qui est le centre de ma vie. Et le reste de la bataille, ce sera de continuer à lutter pour une civilisation de la confiance et du don de soi, de l’accueil de l’autre et non pas de la méfiance, de la peur et de l’isolement. A chacun de choisir son camp, et là je crois que nous sommes tous libres au fond de nous de ne pas nous laisser impressionner par la propagande d’une civilisation de la catastrophe qui voudrait nous empêcher de vivre ce pour quoi nous sommes venus au monde : nous aimer les uns les autres de tout notre cœur…


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  • Oui, arrêtons-nous, si nous ne voulons pas que le Liban que nous aimons tant soit définitivement enterré, car c’est bien d’un enterrement qu’il s’agit aujourd’hui si nous continuons comme cela !

    Il est trois heures du matin et je ne parviens pas à dormir. Au milieu de toutes ces nouvelles qui n’en finissent pas d’être négatives, les unes après les autres, je vous avoue que ce qui m’a donné le coup de grâce, c’est cet article publié hier dans le journal qui disait : « Ils ont enterré la réconciliation. »

    Et c’est vraiment là qu’il faut s’arrêter. On a dit après l’explosion du port de Beyrouth que le Liban que nous avions connu jusqu’ici était mort. Mais, dans la culture de la résurrection à laquelle beaucoup d’entre nous croient encore, nous savons bien qu’un nouveau Liban peut toujours renaître de ses cendres. Il ne sera sans doute plus comme le Liban auquel nous étions attachés jusqu’à hier, mais si le peuple libanais vit encore ce sera tout de même le Liban et la vie peut toujours reprendre. Nous ne serions pas le seul pays dans l’histoire de l’humanité à être mort et ressuscité.

    Mais c’est ici qu’il faut s’arrêter, ne pas faire un pas de plus vers l’abîme. Et quand je dis « Arrêtons-nous » et non pas « Arrêtez-vous », c’est d’abord à moi que je le dis en premier. On ne peut plus vouloir construire le Liban et continuer à dénoncer la faute des autres sans regarder là où nous-mêmes devons encore tellement changer.

    Et pour cela je crois qu’il faut revenir à une véritable échelle des valeurs. Car ce qui a tué le Liban et qui pourrait maintenant l’empêcher de ressusciter, ce n’est pas d’abord la corruption, ni le mensonge, ni l’égoïsme personnel ou de groupe, ni l’avidité du pouvoir, ni tous les maux que nous connaissons bien et que chacun continue à longueur de journée à dénoncer chez les autres.

    Ce qui pourrait enterrer le Liban pour toujours c’est la haine, une haine tellement forte que la réconciliation devienne impossible. Quand nos deux partis ont failli l’autre jour en arriver à se battre, quand des armes ont resurgi avec les vieux démons de la guerre de 16 ans qui n’a pas encore fini de se cicatriser, imaginons ce qui serait arrivé s’il y avait eu un seul mort. Il y en aurait eu un autre le lendemain, puis deux, puis trois, et on n’aurait peut-être plus jamais arrêté cette nouvelle violence.

    Alors, ce matin, je me demande seulement à moi-même : si j’ai encore dans ma vie un problème ou un autre avec certaines personnes, quelle en est la véritable raison ? Ces personnes me font souffrir parce que je les aime et que je tiens de tout mon cœur à les aimer encore ? Ou bien j’ai quelque chose contre elles et je cherche à m’en débarrasser, à trouver des amis pour me convaincre que j’ai raison et que l’autre a tort, définitivement tort ?

    Alors, ce que je demande à mes amis libanais ce matin c’est une question de vie ou de mort. Si tu fais partie des Forces Libanaises, ou du CPL, ou de la « révolution », et si tu as encore des amis, de vrais amis, dans un autre bord, va, cours retrouver ces amis et jette-toi avec eux dans la bataille de la réconciliation. Ne pense pas que ce serait tellement plus simple si tes amis avaient tous les mêmes idées que toi. Remercie Dieu d’avoir encore des personnes que tu aimes de tout ton cœur et qui pensent autrement : cela va te faire souffrir mais c’est la seule chance de sauver encore la renaissance du Liban. Car s’il y a tout de même un mort ou deux ou trois dans quelques jours, toi et tes amis vous n’allez pas tomber dans le piège de la haine qui serait un suicide collectif pour toujours…


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  • (Après l’explosion de Beyrouth du 4 août dernier)

    C’est un cri de douleur qui s’élève ces jours-ci depuis déjà plus d’un mois sur les réseaux sociaux, à la télévision, dans les messages qui circulent à droite et à gauche, dans les conversations téléphoniques, les rencontres dans la rue, partout, un cri de désespoir de tout le peuple libanais (ou presque tout le peuple, parce qu’on dirait que certaines personnes inconscientes continuent à faire leurs affaires comme si de rien n’était).

    C’est un cri qui vous frappe avec violence quand vous le recevez comme ça de plein fouet et qui vient s’ajouter maintenant à tous ces sentiments négatifs qui nous envahissent de toutes parts depuis bientôt un an… depuis bientôt trente ans… depuis la guerre qui n’en finit pas de finir…

    Alors, comment réagir devant tout cela ? Et d’abord, est-ce qu’il faut réagir ou simplement se laisser pénétrer par toute cette souffrance à partager, en « pleurant avec ceux qui pleurent », comme on dit parfois, qui est aussi la plus grande preuve d’humanité dans certains moments où il ne reste plus rien d’autre à faire ?

    Vous savez que dans mon blog, j’essaye d’être toujours positif, c’est plus fort que moi, c’est comme une mission en moi qui me demande de ne jamais laisser personne tout seul, abandonné à son désespoir. Et la première chose est justement ce partage et cette écoute. Car la pire des choses c’est de souffrir et de sentir en même temps que le monde entier m’abandonne à ma détresse. Non, personne ne sera jamais complètement abandonné, car il y a encore beaucoup de monde au Liban qui vit avec un cœur rempli de compassion, d’humanité, de solidarité et de générosité.

    Ensuite, il faut aller jusqu’au fond de ce cri et en voir toutes les conséquences positives énormes qu’on peut en tirer pour l’avenir. Quand une injustice, une inhumanité est aussi forte, aussi criante qu’on aurait envie de penser seulement à se venger, c’est peut-être aussi le meilleur moment pour s’adresser à la conscience de chaque homme sur notre planète pour que des catastrophes pareilles ne pussent plus jamais se reproduire. Non, si nous le voulons, si nous le décidons ensemble, le monde ne sera plus jamais comme avant, parce que certaines situations où l’homme est un loup pour l’homme ne devraient plus jamais se reproduire.

    Mais je voudrais dire aussi simplement, pour ne pas être trop long, que de toute façon c’est la vie qui est faite de telle sorte qu’aucun évènement ne se répète jamais complètement, même les évènements joyeux. C’est à la fois terrible et consolant. Parce que les belles années du Liban que nous avons connu ne pourront plus se répéter comme avant, cette fois c’est bien sûr. Le Liban sera de toute façon différent de celui que nous avons aimé jusqu’à maintenant. Mais cela ne veut absolument pas dire que tout est noir devant nous. Car tant qu’il y a des Libanais vivants et décidés à recréer du nouveau, à inventer l’avenir, tout espoir est encore permis. D’autant plus que nous nous sommes aperçus comme jamais, ces jours-ci, que nous sommes tous interdépendants et que personne ne pourra se sortir tout seul dans son coin de la catastrophe dans laquelle nous sommes tombés…


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  • Je voudrais vous demander, ce matin, un grand service, un immense service. Je voudrais tout simplement vous demander de m’aider à sauver la vie. Pas ma vie, ni même la vôtre, ni même celle des gens que j’aime et que vous aimez. Nous nous rendons compte, ces temps-ci, combien nous sommes si souvent impuissants devant ce mystère de la vie et de la mort.

    Non, c’est bien de « la vie » que je parle, car je m’aperçois de plus en plus que c’est elle qui est en danger, qui est calomniée, jugée, décriée à longueur de journée par tous ces gens qui souffrent (et nous-mêmes avec eux) et qui se retournent contre elle, comme si c’était elle la source de tous nos maux.

    Mais voyez vous-mêmes ce que de grands amis à moi m’écrivent sur les réseaux sociaux. J’ai publié récemment de nouveau une de mes vieilles citations qui disait : « La vie est belle parce qu’elle change et se renouvelle à chaque instant. » Et voilà les réactions de mes amis : « Pour se renouveler, elle se renouvelle, et pas toujours de la belle façon. » « Vers le bien comme vers le mal. » « Si le renouvellement, mon ami, c’est pour le bien, ça va, mais qu’il ne soit pas pour le malheur ! »

    Alors vous allez m’excuser si je vais dire bien fort à ces amis qui me sont chers, qu’il y a ici un grand malentendu. Quand je parle du renouvellement de la vie, je ne parle jamais du mal ou du malheur. Le malheur n’est pas un renouvellement de la vie, c’est une déchéance de la vie, une déformation de la vie.

    Mais qu’est-ce que la vie pour chacun de nous ? N’est-ce pas ce mystère de force, de souffle et d’énergie qui nous a été donné gratuitement à notre naissance ? La vie n’est-ce pas cette joie immense de me rendre compte que j’existe et que je suis « moi » et que les autres sont « toi » et qu’ensemble nous pouvons être un « nous » et nous aimer les uns les autres ? La vie, n’est-ce pas ce sang qui circule dans mes veines, cet esprit en moi qui bouillonne d’idées, de rêves et d’imagination et ce cœur qui vibre de sentiments qui le portent vers mille passions, souvent difficiles à assumer mais qui sont le sel de notre existence,

    Alors, je sais, il y a au milieu de tout cela les difficultés, les problèmes et les malheurs justement. La vie est une immense chasse au trésor pour trouver ensemble le bonheur et un sens à tout cela. Et ces obstacles qui se dressent sur notre chemin deviennent parfois des murs infranchissables sur lesquels on risque de s’écraser. Mais, encore une fois, je voudrais vous prier de ne pas confondre la vie avec les circonstances de la vie. Nos joies et nos malheurs sont les circonstances de nos journées, le cadre dans lequel nous grandissons et nous mûrissons au fil des ans et qui nous poussent à faire toujours de nouvelles découvertes, mais ce ne sont pas la vie.

    La vie, c’est ce courage en moi qui me pousse à me relever après chaque chute ou chaque échec, c’est cet espoir qui jaillit en moi au milieu de l’obscurité, ce rayon de lumière au bout du tunnel, cet arc en ciel après l’orage, et parfois même au milieu de l’orage. C’est là que je dis que la vie « change et se renouvelle à chaque instant ». Car la vie ne s’arrête jamais, sinon nous serions déjà tous morts depuis longtemps. La vie commence déjà à prévoir quelle route je vais prendre demain alors que je suis encore au lit malade ou blessé. La vie, c’est l’énergie de croire qu’il y a encore des gens qui m’aiment quand je me sens abandonné. La vie, c’est l’espoir que demain il y aura une bonne nouvelle.

    C’est pour cela que je dis que la vie « se renouvelle », parce qu’elle ne reste jamais bloquée sur le passé. Mais peut-être suffit-il de nous mettre d’accord sur les mots. Je suis le premier à me rendre compte combien le mal est déchaîné au cœur de notre monde, mais les guerres, les catastrophes, la haine entre les hommes, les injustices, la corruption, ce n’est pas la vie, c’est un cancer qui voudrait tuer cette vie. Alors, arrêtons de nous plaindre de la vie et sauvons la vie. Je crois que nous n’avons pas le choix si nous ne voulons pas nous détruire nous-mêmes définitivement…


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