• Je suis tombé récemment sur une phrase de Marie Curie, la célèbre physicienne du début du XXe siècle, la première femme à avoir reçu un prix Nobel, qui affirmait un jour : “Vous ne pouvez pas espérer construire un monde meilleur sans améliorer les individus. » Et je vous avoue que cette phrase m’a beaucoup fait réfléchir.

    Ce que Marie Curie nous dit est bien évident, car ce monde qui peut aller bien ou aller mal, n’est au fond que cet ensemble extraordinaire de milliards d’individus qui essayent de construire un cadre dans lequel la vie soit la plus harmonieuse possible et qui semblent si souvent échouer dans leur bataille…

    Et si l’on veut que le monde change, il faut évidemment que les personnes changent. On ne peut pas améliorer les relations sociales par des décrets ou des lois, si le cœur de l’homme n’essaye pas chaque jour de s’ouvrir un peu plus…

    Le problème, c’est que finalement je ne peux réellement changer personne à part moi-même, car l’autre est libre de rester enfermé dans la prison qu’il s’est construite, libre de garder toujours les mêmes habitudes, les mêmes jugements négatifs, et de tourner en rond dans sa corruption ou dans son égoïsme.

    Alors que faire ? Me décourager, puisque je ne peux obliger personne à devenir meilleur ? Suis-je condamné à vivre malheureux dans un monde qui avance tout seul sans me demander mon avis ? Ce serait déjà le raisonnement de qui se croit au fond meilleur que tous les autres et n’est pas capable de découvrir combien il y a déjà de personnes merveilleuses autour de nous.

    Je crois que tout va changer le jour où chacun cesse de penser que le monde et lui sont deux réalités séparées qui ne parviendront jamais à s’entendre. Non, la plus belle et grande découverte que je peux faire dans ma vie, c’est que « moi, je suis le monde ». Oui, moi, je suis le monde, même si j’en suis une toute petite partie terriblement minuscule. Mais je ne suis pas en dehors du monde. Sinon, je n’existerais même pas.

    Alors, je peux déjà décider de m’améliorer moi-même. Qui m’en empêche ? Pourquoi ne pourrais-je pas faire chaque jour des pas positifs qui fassent du bien à l’humanité ? Et si moi, j’ai décidé un jour de prendre une direction plus cohérente avec les valeurs de l’homme, n’est-ce pas parce que j’en rencontré sur mon chemin des personnes qui m’ont aidé à sortir de mon trou et qui m’ont redonné envie de vivre véritablement ?

    Le jour où je cesse de me regarder et de m’analyser à chaque pas et où je décide pour toujours que le bonheur du monde dépend aussi de mon propre bonheur, alors je n’ai plus d’excuse, je n’ai plus le temps de me plaindre sans rien faire, je suis trop occupé à faire ma part que personne ne peut faire à ma place. Et celui qui se jette à l’eau dans la bataille de l’humanité ne peut plus jamais rester seul, il découvre vite tous ceux qui ont déjà pris le même chemin et le « moi » devient très rapidement un « nous » qui attire et qui entraîne. Et le monde « en nous » devient chaque jour plus beau, même si les problèmes, les obstacles continuent à se multiplier sur notre route, mais les solutions augmentent encore plus vite que les problèmes, car les solutions sont dynamiques comme la vie, tandis que les problèmes et les obstacles sont statiques comme la mort. Et la vie a toujours vaincu la mort, sinon nous ne serions pas là aujourd’hui. Alors pourquoi perdre l’espoir ?


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  • Oui, je le sais, « c’est difficile ». C’est ce que m’écrivent parfois certains lecteurs, contents de me lire, mais qui trouvent mes idées sur l’accueil de l’autre, la confiance, l’espoir, etc… bien difficiles à vivre.

    Eh bien, je leur donne entièrement raison. Oui, c’est difficile. C’est difficile d’aimer l’autre qui est différent, c’est difficile de ne pas juger, c’est difficile de ne pas répondre tout de suite quand on se sent attaqué, c’est difficile de continuer à accepter l’autre comme avant quand il nous a déçus…

    Mais alors que faire ? Je crois qu’il faut s’arrêter un instant, respirer un grand coup, arrêter de se regarder et se demander : « C’est difficile ? Et alors, qu’est-ce que ça change ? » Vous n’avez jamais pensé que vous pouviez vous poser cette question ? « C’est difficile ? Et alors, c’est une raison pour s’arrêter et renoncer ? » Qui a dit que la vie était facile ?

    Vous pensez que pour une maman, c’est facile de porter un enfant dans son sein pendant 9 mois, puis de le mettre au monde, puis de l’aider à grandir et de le préparer à affronter la vie ? Est-ce que c’est facile pour un artiste ou un sportif de passer des heures et des heures à se fatiguer pour arriver souvent à des échecs, pour passer par des moments de découragement avant de parvenir peut-être à un résultat intéressant ?

    Je crois qu’il y a là un malentendu à la base. La vie n’est pas facile. Elle n’est facile pour personne. Mais est-ce que cela empêche la vie d’être belle ? Est-ce qu’on préférerait n’avoir jamais existé quand on passe par des moments difficiles ? Ou bien on découvre peu à peu que ces épreuves qui nous atteignent sur la route sont seulement des portes qui s’ouvrent devant nous pour nous faire cadeau de nouvelles découvertes ?

    Je comprends bien que vivre des difficultés du matin au soir deviendrait à la longue insupportable. Personne n’a dit que nous devons rechercher les difficultés pour les difficultés. Mais quand ces difficultés arrivent, je crois qu’on doit se poser quelques questions bien simples. C’est difficile, mais est-ce que la difficulté rend la chose impossible ? Est-ce que je ne suis pas en train de chercher des excuses pour ne rien faire, pour rester bien tranquille dans mon coin, au risque de rater les beaux cadeaux que la vie était en train de me préparer ? Et quand on arrête de se regarder, quand on pense à l’autre qui a besoin de nous et qui attend, c’est tellement beau de donner du bonheur à l’autre qu’on oublie bien vite tout ce qui a été difficile en chemin.

    Et enfin, tout est surtout difficile quand on est seul, quand on veut résoudre tous les problèmes sans l’aide des autres, alors que tous ensemble on trouve des solutions tellement plus simples et plus rapides… Alors, si c’est difficile, essayons de nous demander pourquoi, regardons en face le problème, mais ne nous arrêtons jamais sur les difficultés, ce serait empêcher pour toujours le bonheur de nous visiter. Quand on découvre un magnifique panorama au sommet d’une montagne après des heures de marche exténuantes, on est tellement plus heureux que si on voyait le même panorama assis tranquillement dans un fauteuil, devant un écran de télévision…


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  • Je me trouvais l’autre jour dans la rue avec quelques personnes amies à qui je disais en passant combien je me sentais chanceux d’être revenu de nouveau vivre au Liban (pour la 4e fois de ma vie, il faut le dire, pour un total qui dépasse maintenant les 25 ans !) Et je me suis aperçu qu’un de mes interlocuteurs était presque scandalisé ou incrédule devant mon affirmation : il avait peut-être du mal à croire qu’un étranger qui pouvait théoriquement vivre à l’aise dans son pays prétende être heureux au milieu des épreuves que le Liban traverse depuis maintenant plus de 40 ans. Sa réaction m’a fait réfléchir et je voudrais de tout mon cœur vous dire ici ce que j’ai senti vraiment au fond de moi.

    Oui, je suis heureux, profondément heureux, d’être au Liban en ce moment. Je ne veux pas faire ici de comparaison avec les autres pays du Moyen Orient où j’ai vécu aussi beaucoup de bonheur pendant de si longues années, cela ne servirait à rien. J’ai toujours essayé de ne pas trop me poser de questions et d’accueillir les circonstances de la vie comme elles viennent. J’ai d’abord appris à être homme au Liban où je suis arrivé à l’âge de 22 ans pour la première fois. J’y ai fait des expériences fondamentales de joie, d’amitié et aussi de souffrance, en particulier quand la guerre a éclaté. J’y ai vécu la solidarité, l’enthousiasme, la peur, l’espoir, la compassion, la déception et le pardon. J’y ai connu l’échec, le découragement, mais aussi le courage, l’ardeur, des émotions de toutes sortes qui n’ont jamais laissé vides aucune de mes journées.

    J’ai d’ailleurs raconté déjà dans ce blog les premières années de mon aventure libanaise. Mais ce que je sens aujourd’hui, c’est qu’ici j’ai appris à aimer l’humanité comme elle est, avec sa grandeur et ses faiblesses, avec des gens capables de s’oublier complètement pour sauver la vie des autres ou d’autres qui se refermaient sur eux-mêmes pour se protéger contre trop de souffrance. J’ai appris à prendre ici les gens comme ils sont en essayant de ne jamais les juger, car juger est toujours du temps perdu et on ne sait jamais ce qu’on aurait fait si on avait été à la place de l’autre.

    Mais je voudrais crier ici bien fort que, si j’ai le courage ou l’audace de dire que je suis heureux au milieu de tant d’épreuves et de souffrances qui ne finissent jamais, ce n’est pas de ma part de l’inconscience ou l’égoïsme de quelqu’un qui est tout content dans sa bulle sans se rendre compte des problèmes des gens qui l’entourent. Je pense et j’espère que ce n’est pas cela qui me rend heureux. Je suis heureux parce que c’est au fond dans ces circonstances extrêmes qu’on découvre les trésors cachés de chaque être humain. Chacun porte en lui-même un trésor ou des trésors, qui risquent parfois de rester voilés ou enterrés sous la poussière d’une vie médiocre et terre à terre. Mais quand les difficultés ne s’arrêtent plus, on est obligé de choisir : ou bien décider d’être triste jusqu’à la fin de ses jours, et c’est une option qui peut parfois soulager apparemment. Ou bien décider de prendre sur soi le fardeau des autres et de tracer devant eux ou avec eux des chemins de lumière.

    Et c’est au Liban que j’ai découvert en moi un optimisme que je n’avais pas du tout au départ, comme une mission qui a donné tout à coup un sens à ma vie. Et c’est dans cette bataille pour sortir tous ensemble du tunnel que je me suis mis à aimer vraiment les gens de tout mon cœur, comme je n’imaginais même pas en être capable. Je me suis trouvé ici des frères et des sœurs que j’aime et qui m’aiment plus que ma famille naturelle. Des gens à qui j’ai eu le courage de raconter mes faiblesses et mes angoisses, parce que je sentais confusément que je devenais ainsi plus crédible à leurs yeux, et ce partage a commencé à me lier à ces frères et sœurs pour toujours.

    Moi qui venais d’une expérience familiale douloureuse et qui n’avais pas beaucoup de confiance en moi quand je suis arrivé ici, j’ai trouvé la confiance en moi-même en la donnant aux autres. Moi qui avais manqué d’affection dans ma famille française blessée (aussi par les conséquences des guerres que l’Europe a subies en son temps), j’ai trouvé cette affection en la donnant à ceux que je rencontrais. Et c’est ici que les personnes que j’ai pu aider à être elles-mêmes, au-delà des circonstances de la vie extérieure, ont fini par me convaincre que moi aussi je pouvais être beau ou aimable, ce que j’avais beaucoup de mal à croire au départ. Et c’est ici que j’ai appris à être moi-même en aidant les autres à sentir combien ils étaient finalement chacun tellement important. Jamais je n’aurais imaginé qu’on pouvait connaître des joies aussi fortes et aussi pures, parfois au milieu de quelques larmes, que celles que j’ai eu la chance de vivre ici…


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  • C’est inévitable, c’est tellement beau d’aimer quelqu’un et de se sentir aimé qu’en même temps on a toujours peur de perdre cet amour et de le gâcher. Alors, comment faire ? Se contenter de rapports superficiels avec les gens pour ne pas risquer de trop souffrir dans la vie ? C’est malheureusement la conclusion de nombreuses personnes autour de nous…

    Je crois qu’en fait, il y a de nombreux remèdes à la crise de n’importe quel amour ou simplement amitié. Le premier remède est d’apprendre à aimer sans rien attendre en retour. L’autre se sent alors tellement libre avec nous que le retour arrive bien plus vite que prévu et avec toujours de belles surprises.

    Mais en fait l’amour porte en lui-même son propre remède. Car l’amour suit le temps ou parfois même le précède, mais il ne revient jamais sur le passé, sinon ce ne serait plus de l’amour, mais seulement un musée de beaux souvenirs auxquels on va essayer de s’accrocher quelques temps pour oublier que l’amour est mort et ce n’est certainement pas là la meilleure solution.

    Aimer quelqu’un c’est se donner à lui de tout son cœur. Or on ne pourra jamais se donner à quelqu’un dans le passé, ce serait une sorte d’illusion morbide. On ne peut se donner que dans l’instant présent, en inventant donc chaque jour un nouvel amour. Car l’amour est tellement beau qu’il porte en lui l’énergie de se renouveler sans cesse et cela est déjà une raison pour le rendre toujours attrayant et imprévisible comme la plus belle surprise du monde.

    Et cela veut donc dire aussi que l’amour est toujours devant nous et jamais derrière nous. On peut toujours regarder ensemble de belles photos souvenirs du passé, mais c’est l’émotion de les regarder maintenant ensemble qui va compter, car si l’amour est mort entre temps, ce ne sont pas de belles photos qui vont le ressusciter.

    L’amour qui meurt, c’est un amour qui a décidé un jour de s’arrêter, par manque de confiance, à cause d’un soupçon ou d’un désaccord profond, mais au départ il est toujours libre de continuer quand même le chemin, car si j’aime vraiment quelqu’un qui va me décevoir, la déception devrait me pousser à l’aimer encore plus, comme un bras en bonne santé fait son travail et celui de l’autre bras malade si c’est nécessaire.

    Je sais qu’il y a dans la vie des situations qui nous échappent, où la personne que nous aimons se découvre un jour comme une personne malade qui n’arrive plus à sortir de sa maladie. Ce sont tout de même des cas rares, mais ils existent. Eh bien, même dans ces cas-là, l’amour est capable de continuer à se déverser sur le reste de l’humanité et il ne va donc pas mourir. J’ai connu des personnes extraordinaires qui se sont mises à aimer vraiment tout le monde à partir des blessures qu’elles avaient reçues, car ces blessures étaient devenues comme une occasion de partage avec d’autres personnes qui souffraient et la chance de découvrir en soi un nouvel amour encore plus surprenant. Car l’amour n’est pas seulement un sentiment, mais c’est aussi une dynamique incroyable capable de renaître toujours de ses propres cendres. Et quand un amour blessé rencontre un autre amour blessé mais qui veut sortir de ses blessures, alors plus rien ne pourra les arrêter…

     


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  • Notre monde moderne est un monde de l’action, du travail et de la production. Il ne sait plus s’arrêter dans sa course au succès ou tout simplement dans son anxiété de pouvoir survivre face à tous les défis qui lui tombent dessus.

    A force de courir, on n’a plus le temps d’accueillir, de contempler ou d’écouter. On oublie que cette vie qui nous apporte la force de faire, d’agir, d’organiser, de projeter, de réaliser, de réparer, d’exécuter, dans un tourbillon qui nous donne de plus en plus le vertige, nous est arrivée un jour comme un cadeau du dehors que nous n’avions pas même demandé.

    Nous oublions que si nous sommes pleins de santé, de courage ou d’énergie, nous avons reçu gratuitement tous ces dons au départ, venus de la source de la vie. Et le résultat, c’est que nous finissons par perdre le sens de la beauté de cette vie elle-même. Nous n’en voyons plus que les difficultés ou les conditionnements qui nous dérangent. Nous ne savons plus goûter au bonheur de vivre tout simplement.

    C’est là que cette phrase extraordinaire de Socrate que nous avons publiée cette semaine dans la rubrique « Des mots pour de bon », va nous aider de manière extraordinaire : « La sagesse commence dans l’émerveillement. »

    Socrate nous propose de redevenir comme des enfants qui découvrent la vie au jour le jour comme une surprise incroyable, toujours nouvelle, et qui s’émerveillent, de tout et de rien…

    Si nous savions commencer notre journée, chaque matin, en nous émerveillant d’être encore en vie et de pouvoir aimer les personnes qui nous entourent… Si nous étions capables de nous émerveiller de voir que, sur 7 milliards d’êtres humains, aucun n’est semblable aux autres et que chacun de nous est donc unique. Si nous parvenions à nous arrêter quelques instants chaque jour pour goûter aux surprises de la nature. Si nous savions voir la beauté des inventions de l’homme, même si elles ont souvent créé tellement de confusion. Si nous prenions le temps d’être heureux, même au milieu de mille difficultés… alors nous aurions peut-être la sagesse. Car nous prendrions la vie par son bon côté et nos décisions partiraient de la source bienfaisante de la vie et non plus de la peur d’une catastrophe ou de l’angoisse de réussir demain des projets insensés. Nous serions heureux parce que s’accepter et s’aimer entre frères et sœurs en humanité, tels que nous sommes, peut être déjà un bonheur merveilleux. Certains sages y sont parvenus : pourquoi devrions-nous passer à côté de la vie sans la voir et sans profiter de toute la joie qu’elle a chaque jour à nous donner ?

     


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