• [Pour nous préparer à la lecture du chapitre 17 de l’Evangile de Luc, nous reprenons ce commentaire publié dans ce blog en 2016 et 2020]

    Déplacer nos montagnes (De Marc à Matthieu 21 – 3)

    « Tout homme qui dira à cette montagne : ‘Enlève-toi de là, et va te jeter dans la mer’, s’il ne doute pas dans son cœur, mais croit que ce qu’il dit va arriver, cela lui sera accordé ! » (Mc 11,23) (Cf. Mt 21,21 : « Si vous avez la foi et si vous ne doutez pas… vous pourrez même dire à cette montagne : ‘Enlève-toi de là et va te jeter dans la mer’ et cela se produira ; tout ce que vous demanderez dans votre prière avec foi, vous le recevrez. » et Lc 17,6 : « La foi, si vous en aviez gros comme une graine de moutarde, vous diriez au grand arbre que voici : ‘Déracine-toi et va te planter dans la mer’, et il vous obéirait. »)

    Décidément, on dirait que Jésus s’amuse dans ce chapitre. Il s’amuse avec la recherche de l’ânon qui va le porter à l’entrée de Jérusalem, il s’amuse avec le figuier qu’il maudit et dessèche. Et pourtant ce n’est pas le moment de s’amuser, avec le drame tout proche qui l’attend. Et maintenant il nous parle de déplacer des montagnes… !

    Derrière chaque acte, chaque provocation de Jésus, il y a une raison cachée, un enseignement qui va servir surtout dans les moments difficiles. Dans peu de temps, les disciples vont avoir l’impression que le monde s’écroule sous leurs pieds. Tout ce qu’ils avaient bâti avec Jésus n’aura apparemment plus de sens. L’avenir bouché, une catastrophe irréparable. Exactement comme une montagne à déplacer, à jeter dans la mer. Et Jésus va leur montrer que même la mort peut être vaincue !

    Quel obstacle peut être pire que la mort, quelle montagne plus écrasante qui semble nous boucher pour toujours le paysage et le chemin de l’avenir ? Dieu ne nous invite pas à faire des caprices comme dans un conte de fée. Non, mais il sait que notre vie est parfois complètement obscure, sans espoir à l’horizon. Et il nous demande de « croire ». Toujours cette question de foi. La foi est indépendante de la grandeur du problème. Il faut autant de foi pour déplacer un petit rocher qu’une grande montagne. La solution est en nous. Elle ne dépend pas des apparences extérieures. C’est cela que Jésus veut nous dire.

    Combien de fois faisons-nous des comparaisons entre nos problèmes. « Cette fois-ci, c’est pire que jamais, je ne pourrai plus m’en sortir ! » « J’ai eu bien des épreuves dans ma vie, mais d’un coup comme celui-là je ne pourrai plus me relever ! » C’est cela la montagne que Jésus nous présente. C’est celle de l’instant présent, unique comme toutes les autres épreuves qui ont constellé notre vie. A moi et à nous de croire qu’il y a toujours une solution, un moyen pour passer de la mort à la vie. A nous de ne pas perdre courage, et, si nous sommes tombés, de nous remettre en route une fois de plus : il est là qui nous attend et nous tend la main !

     


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  • [Pour nous préparer à la lecture du chapitre 17 de l’Evangile de Luc, nous reprenons ce commentaire publié dans ce blog en 2020]

    Se brancher à la source de la foi

    « C’est parce que vous avez trop peu de foi. Amen, je vous le dis : si vous avez de la foi gros comme une graine de moutarde, vous direz à cette montagne : ‘Transporte-toi d’ici jusque là-bas’, et elle se transportera ; rien ne vous sera impossible. » (Mt 17, 20) (cf. Lc 17,6 : « La foi, si vous en aviez gros comme une graine de moutarde, vous diriez au grand arbre que voici : ‘Déracine-toi et va te planter dans la mer’, et il vous obéirait. »)

    C’est un des plus grands défis du message du Christ. Nous laisser transporter par la foi en Dieu et son amour tout puissant. Mais comment faire ? Croire en Dieu est déjà tellement difficile pour certains, mais croire ensuite qu’il va trouver une solution à tous nos problèmes, cela pourrait sembler parfois une mauvaise plaisanterie, tellement la vie est souvent dure et angoissante. Mais alors toute la Bonne Nouvelle de Jésus serait seulement une illusion qui sonne faux ?

    En quelques lignes d’un article de blog, je pourrai seulement lancer ici une ou deux pistes de réflexion, mais je vais essayer de dire ici tout de même ce que je sens au fond de mon cœur par rapport à la foi. Je crois que notre relation avec Jésus, le Père et l’Esprit est d’abord une relation d’amour avec Quelqu’un qui nous aime, qui nous le prouve en donnant sa vie pour nous et qui se laisse aimer à son tour par nous.

    Comme ce Dieu n’est tout de même pas aussi palpable qu’une pierre ou qu’un morceau de bois, l’aimer à notre tour et nous laisser aimer par lui, est déjà une question de foi dans le sens d’un abandon entre les mains de Quelqu’un en qui nous avons confiance, même si nous ne le voyons pas directement.

    Cet abandon à Dieu ou en Dieu n’est pas une question de réflexion ou de raisonnement. La foi n’est pas non plus une certitude que l’on possède. Nos langues occidentales qui utilisent trop le verbe « avoir » lorsqu’elles disent : cet homme « a » la foi et celui-là ne l’ « a » pas, risquent de faire une grande confusion. Dans la langue de Jésus le verbe « avoir » n’existe pas. La foi n’est donc pas quelque chose que j’ai maintenant et que je peux perdre demain. La foi est un mouvement d’amour confiant qui se branche à la source de cet amour de Dieu qui se penche vers nous, et qui se laisse porter par Lui, comme par les vagues de la mer.

    La foi, c’est comme une immense machine bien lourde et impossible à déplacer qui se branche soudain sur le courant électrique et qui se met à marcher, si l’on peut utiliser ici une comparaison qui peut donner une petite idée encore lointaine. La foi n’est pas une question de quantité de foi, mais simplement d’attitude de foi. Il s’agit de se laisser faire par la foi quand elle nous arrive à notre insu, simplement parce que nous avons commencé à aimer Dieu et notre prochain. Elle n’est pas un tour de prestidigitation qu’un magicien va nous apprendre. Mais elle est cet amour pour un frère souffrant qui nous fait demander tout à coup à Dieu pour ce frère un miracle impossible et voilà que ce miracle auquel nous n’avions pas pensé peut-être quelques minutes plus tôt, va se réaliser devant nous.

    La foi ne dépend pas de notre bravoure. Elle jaillit de Dieu au moment où bon lui semble quand elle lui sert pour propager son message et faire grandir son paradis sur terre. La foi n’est pas en dépôt chez nous ou dans notre banque. Elle nous arrive toute seule quand on s’y attend le moins. Mais elle nous arrive parce que nous avons commencé à aimer. Et voilà que nous désirons de tout notre cœur un petit miracle et que nous sommes exaucés sans savoir comment cela a été possible. C’est Dieu qui a tout fait, Dieu qui a mis cet amour et cette foi dans notre cœur et nous lui avons simplement ouvert la porte par ce que nous avons été attentifs à sa présence. Nous n’avons pas grand-chose d’autre à faire, sinon être là, à l’écoute de Dieu et de notre prochain, à chaque instant, sans trop nous regarder ou nous demander si notre foi est petite ou grande, car en Dieu elle est toujours grande, si nous nous laissons faire par lui. Et alors vraiment nous déplacerons des montagnes si Dieu en a besoin, ou un petit problème de rien du tout dont personne ne s’apercevra, car ce n’est pas d’abord aux yeux des hommes que tout se joue mais dans le cœur de Dieu.

     

     

     


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  • [Pour nous préparer à la lecture du chapitre 17 de l’Evangile de Luc, nous reprenons ce commentaire publié dans ce blog en 2020]

    Pardon impossible ?

    « ‘Seigneur, quand mon frère commettra des fautes contre moi, combien de fois dois-je lui pardonner ? Jusqu’à sept fois ?’ Jésus lui répondit :’ Je ne te dis pas jusqu’à sept fois, mais jusqu’à soixante-dix fois sept fois.’ » (Mt 18, 21-22) (cf. Lc 17,3-4 : « Si ton frère a commis une faute contre toi, fais-lui de vifs reproches, et, s’il se repend, pardonne-lui. Même si sept fois par jour il commet une faute contre toi, et que sept fois de suite il revienne à toi en disant : ‘Je me repends’, tu lui pardonneras. »)

    Plus clair que cela ? Combien de fois devons-nous pardonner ? « Jusqu’à soixante-dix fois sept fois », ce qui veut dire pratiquement toujours. Mais c’est la logique de l’Evangile. La même logique qui a fait dire à Jésus de laisser là notre offrande et d’aller d’abord nous réconcilier avec notre frère, si nous voulons parler à Dieu.

    Et le plus fort, c’est que Jésus ne se demande même pas si le frère qui est fâché contre nous l’a été par sa faute ou par la nôtre. Comme il ne nous dit pas de pardonner à l’autre si c’est nous qui avons commencé à le déranger et qu’il a peut-être mal réagi par la suite avec nous. « C’est lui qui a commencé. » « J’ai tout essayé, mais c’est lui qui y met toujours de la mauvaise volonté. » « Il dit une chose et il fait le contraire. » « Il n’est pas sincère. » « On ne peut pas lui faire confiance. » « Il ne changera jamais ! » Tous ces beaux raisonnements, apparemment justifiés, n’intéressent pas Jésus.

    C’est que lorsque Jésus parle avec nous, c’est à nous qu’il pense, à notre bien à nous. A l’autre qui nous a fait du mal, il y pensera quand viendra son tour. Mais maintenant il voudrait que nous ôtions de notre cœur toute cette rancune qui nous pèse, ce désir de rendre le mal pour le mal qui nous empoisonne, ces calculs pour nous défendre qui nous renferment sur nous-mêmes et combien d’autres raisonnements qui ne servent, pour Jésus, qu’à nous éloigner de lui. 

    Pour Jésus c’est tellement simple, il voudrait que nous laissions son cœur et son amour entrer jusqu’au fond de nous-mêmes et nous transformer, nous faire voir la vie et les hommes comme Dieu les voit. Et il sait bien que, si nous ne pardonnons pas, nous allons garder dans notre œil la poutre qui nous empêche de voir la beauté de son message.

    Il y a évidemment un grand problème à tout cela. C’est que souvent ce pardon que Jésus nous demande semble absolument au-dessus de nos forces. Aimer même nos ennemis, ceux qui nous persécutent sans que nous ne leur ayons jamais rien fait de mal ? C’est ce qu’il a fait lui-même sur la croix, mais nous, nous ne sommes pas Dieu. Alors que faire ? Nous décourager pour toujours ?

    C’est là que le message de tout le chapitre va nous aider à nouveau. Jésus sait bien que nous sommes faibles et que le pardon total ne va pas venir du jour en lendemain. Il veut seulement que tout soit bien clair pour nous. Le message de Jésus ne peut pas être entendu à moitié quand cela nous plait. Et si le mettre en pratique est tellement difficile, Jésus le sait, il n’y a rien d’anormal à cela. Nous devrons patiemment nous orienter sur le chemin du pardon, jour après jour, et changer peu à peu notre cœur de pierre en un cœur de chair, celui de Jésus.

    Nous devons apprendre à nous pardonner à nous-mêmes pour commencer, sans nous agiter chaque fois que nous échouons. N’avons-nous pas entendu que le Père et Jésus ne veulent pas qu’ « un seul de ces petits » se perde. Et quand nous ne parvenons pas à pardonner, ne sommes-nous pas à notre tour un de ces petits si fragiles qui ont besoin de la miséricorde du Père pour avancer ? Alors la vie va continuer à être difficile, mais elle va être tellement plus simple maintenant. Et nous allons surtout voir que quand nous nous aimons les uns les autres avec Jésus au milieu, nous ne passons plus notre journée à avoir peur des autres, nous nous exerçons du matin au soir à aimer nos prochains, au moins les plus faciles pour commencer… et nous serons bientôt étonnés de voir que les plus grands obstacles sont devenus tout à coup un petit problème naturel que nous aurions été incapables d’affronter quand nous restions seuls dans notre coin à regarder le monde en ayant perdu l’espoir.

     

     


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  • « Abraham lui dit : ‘ Ils ont Moïse et les Prophètes : qu’ils les écoutent ! – Non, père Abraham, dit le riche, mais si quelqu’un de chez les morts vient les trouver, ils se convertiront’. Abraham répondit : « S’ils n’écoutent pas Moïse ni les Prophètes, quelqu’un pourra bien ressusciter d’entre les morts : ils ne seront pas convaincus’. » (Lc 16,29-31)

    Quelle conclusion et quelle libération que cette dernière phrase de notre chapitre 16 de Luc ! Jésus veut nous expliquer définitivement que tous nos pauvres efforts pour convaincre les autres qu’ils se trompent et que nous avons raison, ne servent strictement à rien. La vérité n’est pas un concept qu’on peut enfermer en quelques mots soi-disant absolus. Accueillir la vérité n’est pas une question d’intelligence qu’on peut prouver. Même si quelqu’un ressuscitait des morts devant nous, nous ne serions pas convaincus ! C’est que vouloir convaincre quelqu’un est encore une autre manière d’essayer de le posséder.

    Jésus n’est pas venu pour nous convaincre, mais pour nous aimer et nous toucher au fond du cœur. Il est venu pour nous donner sa vie et ceux qui se sont laissé toucher par son amour sont entrés avec Lui au cœur de Dieu. C’est tout simple et en même temps tellement difficile. Combien perdons-nous de temps chaque jour dans des discussions interminables dont nous sortons en général chacun sur ses positions avec même souvent de l’amertume, de la colère ou de la haine pour ceux que nous n’avons pas réussi à convaincre !

    Mais que voulons-nous ? Montrer aux autres que nous sommes plus intelligents qu’eux ? Ce n’est certainement pas très malin comme base de départ. Ce qui est le plus stupide, c’est ce désir d’avoir raison « contre » l’autre. A la rigueur ce serait bien d’avoir raison « avec » l’autre, dans le sens que nous aurions unifié nos raisons et que l’harmonie serait revenue entre nous. Mais prouver devant tout le monde que nous avons raison contre l’autre, c’est en général multiplier le nombre de nos ennemis et de ceux qui essayeront de se venger de nous. Où cela peut-il nous conduire ?

    Le chemin que Jésus nous montre, c’est de donner notre vie pour chaque frère ou sœur que nous rencontrons au cours de la journée. En commençant par accueillir chacun de tout notre cœur, à l’écouter, à vouloir son bien et à lui donner ensuite tout ce qui pourra justement lui faire du bien et en le laissant à son tour nous faire du bien à nous comme il le sentira. C’est cela utiliser son intelligence intelligemment. Car la seule vérité absolue, c’est l’amour et l’amour touche continuellement et fait des miracles, mais des miracles de l’intérieur, pas des miracles de l’extérieur qui ne portent que peu de fruits. Il faut croire aux miracles du regard et du cœur de Dieu qui changent le monde chaque jour devant nous et que nous oublions de contempler parce que nous sommes occupés ailleurs à vouloir nous imposer aux autres au lieu de les aimer !

    Ou bien, si nous voulons anticiper notre prochain voyage dans l’Evangile de Jean, ce qui va finalement convaincre l’humanité et la pousser à croire enfin au message du Christ, c’est le jour où nous serons unis entre nous et que nous nous aimerons entre nous réciproquement comme Jésus nous a aimés. C’est cela qui portera à la conviction du cœur. Nous en avons déjà souvent fait l’expérience…

     


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  • « Eh bien ! père, je te prie d’envoyer Lazare dans la maison de mon père. J’ai cinq frères : qu’il les avertisse pour qu’ils ne viennent pas, eux aussi, dans ce lieu de torture. » (Lc 16,27-28)

    L’Evangile est incroyable, même si dire cela pourrait sembler un mauvais jeu de mots ! Incroyable et pourtant l’unique source de la foi et de l’espérance véritables. Là où tout semblerait définitivement sans espoir ou sans solution, Jésus nous montre toujours une spirale de lumière au fond de notre tunnel et le chemin de la résurrection sur la croix la plus noire et la plus douloureuse…

    Après avoir dit sur tous les tons qu’il n’y a plus aucun espoir pour les riches qui s’enferment pour toujours dans leur richesse, après nous avoir fait penser que ce méchant riche insensible ne peut que finir en enfer pour toujours, voilà qu’il nous montre que ce riche a des frères et qu’il continue à les aimer et à vouloir leur faire du bien, même lorsque lui-même est au plus profond de l’abîme. Il est tout de même étonnant ce chapitre 16 de Luc qui est un hymne à la confiance et à la fidélité, au cœur même de la corruption et de la malhonnêteté, et maintenant un hymne à la fraternité au cœur de l’égoïsme et de la dureté humaine.

    C’est cela la vérité qui se cache au fond de chaque homme, au-delà des apparences les plus sombres. Mais Jésus ne nous a-t-il pas dit qu’il est présent en chacun et que chaque fois que nous accueillons un de nos prochains, c’est Lui que nous accueillons ? Alors pourquoi ces jugements et ces étiquettes que nous mettons sur les gens en les condamnant en nous-mêmes pour toujours, alors que Dieu n’arrête pas de nous dire que notre regard peut complètement changer. Car chaque fois que nous condamnons un de nos frères comme si nous étions un juge au tribunal, nous ne voyons pas que c’est nous-mêmes que nous condamnons : une condamnation à rester enfermés dans notre misérable petit esprit qui se croit le maître du monde et qui se coupe en même temps de tout le secret d’amour présent justement au cœur de ce monde…


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