• « De même vous aussi, quand vous aurez fait tout ce que Dieu vous a commandé, dites-vous : ‘Nous sommes des serviteurs inutiles : nous n’avons fait que notre devoir’. » [Une autre traduction dit : « Nous sommes des serviteurs quelconques. »] (Lc 17,10)

    Comment comprendre cette phrase ? Est-ce que Jésus veut soudain nous déprécier, nous convaincre que nous ne valons rien pour que nous l’adorions, Lui qui est le Tout-Puissant ? Quelle idée horrible nous aurions alors de notre Dieu, comme dans certaines religions primitives : un Dieu tyran ou dictateur qui prend plaisir à nous dominer ?

    Nous savons bien, nous chrétiens en particulier, que l’homme est la perle de l’univers, que nous avons été créés à l’image de Dieu. Et pourtant nous passons souvent le plus clair de notre vie au milieu d’une société d’autres hommes qui se moquent de nous, qui nous critiquent, qui nous ignorent, ou qui essayent même de nous écraser et de nous montrer que nous sommes des moins que rien. La confiance en nous-mêmes et le courage de vivre en prennent un drôle de coup. Est-ce pour cela que nous sommes venus au monde ?

    La tentation est alors bien forte de mendier cette reconnaissance de nous-mêmes et de notre importance, qui ne semble pas évidente du tout. Nous prétendons que les autres nous apprécient, nous remercient continuellement, nous mettent en valeur et ils font souvent le contraire. Alors que faire ? Passer notre temps, tout seuls, à nous regarder dans un miroir, pour nous convaincre que nous sommes merveilleux, beaux ou intelligents ?

    C’est là que Jésus veut nous aider à sortir de ce piège dans lequel le démon s’amuse continuellement à nous faire tomber : passer notre journée à nous regarder, au lieu de tourner notre attention vers les autres pour les aimer, sans rien attendre…

    Dans la Trinité, le Père ne se regarde jamais : il aime le Fils et lui donne sa vie divine dans l’Esprit Saint, et ainsi fait le Fils avec le Père. Nous regarder et vouloir obliger les autres à nous aimer et à nous considérer, est simplement une perte de temps inutile. Alors que, lorsqu’on passe son temps à se donner pour vivre l’amour de l’Evangile, voilà que les autres sont tellement touchés, bouleversés, qu’ils n’arrêtent plus de nous remercier et de nous aimer à notre tour, mais comme une belle surprise qui vient toute seule, sans qu’on l’ait cherchée.

    C’est ce qui est arrivé à Marie, au début de cet Evangile de Luc, lorsqu’elle est partie pour aider sa vieille cousine Elisabeth et pour la servir, simplement parce que son cœur était plein d’amour de Dieu. Et c’est là que s’est produit le miracle : Elisabeth, remplie de l’Esprit Saint a fait tout à coup découvrir à Marie l’immense richesse que Dieu avait mise dans son cœur et dans tout son être, et Marie a chanté son Magnificat. C’est ce qui nous arrive à nous aussi, lorsque nous prenons au sérieux l’amour de l’Evangile. Mais il faut le mettre en pratique pour y croire vraiment et définitivement.

     

     


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  • « Les apôtres dirent au Seigneur : ‘Augmente en nous la foi !’ » (Lc 17,5)

    Encore une demande bien maladroite de ces pauvres apôtres qui continuent à ne pas comprendre grand-chose à ce qui leur arrive. Comme si la foi était une question de quantité ou de volume, ou pire encore, comme quelque chose que l’on possède. Jésus se moque d’ailleurs d’eux bien gentiment : « La foi, si vous en aviez gros comme une graine de moutarde, vous diriez au grand arbre que voici : ‘Déracine-toi et va te planter dans la mer’, et il vous obéirait. »

    La foi n’est pas une conquête ou le fruit d’une recherche obstinée. Elle est un don de Dieu, une grâce que Dieu nous donne pour nous brancher à la source de sa vie. Cette foi nous arrive du ciel à chaque instant pour nous sauver : « Ta foi t’a sauvé ! » ne cesse de dire Jésus à ceux qu’il vient de guérir. Mais cette foi arrive-t-elle seulement à quelques privilégiés ? Bien sûr que non ! Dieu qui nous aime de tout son cœur ne va pas favoriser certains de ses enfants et d’autres non. Mais il a simplement besoin de notre amour pour laisser cette foi divine porter ses fruits en nous.

    Même si elle est un peu mal placée, cette demande est tout de même au fond une bonne demande, car elle est guidée par l’amour des apôtres qui veulent pénétrer chaque jour un peu plus dans cette vie mystérieuse que Jésus leur offre. Pour laisser cette foi merveilleuse nous envahir, il suffit donc de se brancher sur elle, même si on ne comprend pas bien encore de quoi il s’agit. Il suffit d’aimer Dieu, d’avoir soif de Lui et de nous tourner vers Lui, chaque fois que nous le pouvons. Il suffit de rester éveillés, attentifs, pour ne pas laisser passer le don de Dieu devant nous et en nous, sans que nous nous en rendions compte. La foi, c’est finalement faire confiance que Dieu nous fait confiance, même si on ne voit pas encore grand-chose : « Bienheureux ceux qui croient sans avoir vu », dira Jésus après sa résurrection ! Et l’on peut goûter alors à la foi comme à la plus belle des béatitudes…


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  • Voici encore un chapitre capable à lui seul de changer toute une vie, tellement il est riche d’esprit divin. On y retrouve des sujets déjà approfondis en Marc, Matthieu et Luc lui-même, tels que le pardon, la foi ou le salut, mais dans une nouvelle synthèse. Mais l’essentiel du chapitre y est tout de même vraiment original et ouvre de nouvelles perspectives étonnantes.

    Luc commence par revenir sur le problème du péché et du scandale qu’il provoque : « Jésus disait à ses disciples : ‘Il est inévitable qu’il arrive des scandales qui entraînent au péché, mais malheureux celui par qui ils arrivent. Si on lui attachait au cou une meule de moulin et qu’on le précipite à la mer, ce serait mieux pour lui que d’entraîner au péché un seul de ces petits. Tenez-vous sur vos gardes !’ » [En Mt 18,6, nous avions déjà trouvé à peu près la même affirmation terrible : « Celui qui entraînera la chute d’un seul de ces petits qui croient en moi, il est préférable pour lui qu’on lui accroche au cou une des ces meules que tournent les ânes, et qu’on l’engloutisse en pleine mer. »]

    Puis, en harmonie avec Matthieu, Luc nous parle ensuite du pardon : « Si ton frère a commis une faute contre toi, fais-lui de vifs reproches, et, s’il se repent, pardonne-lui. Même si sept fois par jour il commet une faute contre toi, et que sept fois de suite il revienne à toi en disant : ‘Je me repens’, tu lui pardonneras. »

    Et de là, Luc passe à la réalité de la foi avec ce cri original des apôtres qui devrait nous toucher tellement fort : « Les apôtres dirent au Seigneur : ‘Augmente en nous la foi !’ Le Seigneur répondit : ‘La foi, si vous en aviez gros comme une graine de moutarde, vous diriez au grand arbre que voici : ‘Déracine-toi et va te planter dans la mer’, et il vous obéirait.’ »

    Et ensuite un passage original qui donne vraiment à réfléchir : « Lequel d’entre vous, quand son serviteur vient de labourer ou de garder les bêtes, lui dira du retour des champs : ‘Viens vite à table’ ? Ne lui dira-t-il pas plutôt : ‘Prépare-moi à dîner, mets-toi en tenue pour me servir, le temps que je mange et que je boive. Ensuite tu pourras manger et boire à ton tour’. Sera-t-il reconnaissant envers ce serviteur d’avoir exécuté ses ordres ? De même vous aussi, quand vous aurez fait tout ce que Dieu vous a commandé, dites-vous : ‘Nous sommes des serviteurs inutiles : nous n’avons fait que notre devoir’. » [Une autre traduction dit : « Nous sommes des serviteurs quelconques. »]

    A partir de là, et jusqu’à la fin du chapitre, tout est original chez Luc, à part deux petits passages sur le salut, sur lesquels nous avons déjà eu l’occasion de nous arrêter. Mais voici d’abord le fameux épisode de la guérison des dix lépreux : « Jésus, marchant vers Jérusalem, traversait la Samarie et la Galilée. Comme il entrait dans un village, dix lépreux vinrent à sa rencontre. Ils s’arrêtèrent à distance et lui crièrent : ‘Jésus, maître, prends pitié de nous.’ En les voyant, Jésus leur dit : ‘Allez vous montrer aux prêtres’. En cours de route, ils furent purifiés. L’un d’eux, voyant qu’il était guéri, revint sur ses pas, en glorifiant Dieu à pleine voix. Il se jeta la face contre terre aux pieds de Jésus en lui rendant grâce. Or c’était un Samaritain. Alors Jésus demanda : ‘Est-ce que tous les dix n’ont pas été purifiés ? Et les neuf autres, où sont-ils ? On ne les a pas vus revenir pour rendre gloire à Dieu ; il n’y a que cet étranger !’ Jésus lui dit : ‘Relève-toi et va : ta foi t’a sauvé’. »

    Ce qui suit est enfin un recueil des paroles de Jésus appelé « petite apocalypse », pour la distinguer du chapitre 21 où Luc reprendra le discours apocalyptique de Marc. C’est un passage terrifiant d’un côté, mais où Jésus nous explique que tout ce déchaînement du mal est en même temps le signe que le Fils de l’homme est là tout proche, en train d’arriver, comme est désormais toute proche la conclusion de notre Evangile.

    « Comme les pharisiens demandaient à Jésus quand viendrait le règne de Dieu, il leur répondit : ‘Le règne de Dieu ne vient pas d’une manière visible. On ne dira pas : ‘Le voilà, il est ici !’ ou bien : ‘Il est là !’ En effet, voilà que le règne de Dieu est au milieu de vous.’ Et il dit aux disciples : ‘Des jours viendront où vous désirerez voir un seul des jours du Fils de l’homme, et vous ne le verrez pas. On vous dira : ‘Le voilà, il est ici ! il est là !’ N’y allez pas, n’y courez pas. En effet, comme l’éclair qui jaillit illumine l’horizon d’un bout à l’autre, ainsi le Fils de l’homme, quand son jour sera là. Mais auparavant, il faut qu’il souffre beaucoup et qu’il soit rejeté par cette génération.

    Ce qui se passera dans les jours du Fils de l’homme ressemblera à ce qui est arrivé dans les jours de Noé. On mangeait, on buvait, on se mariait, jusqu’au jour où Noé entra dans l’arche. Puis le déluge arriva, qui les a tous fait mourir. Ce sera aussi comme dans les jours de Loth : on mangeait, on buvait, on achetait, on vendait, on plantait, on bâtissait ; mais le jour où Loth sortit de Sodome, Dieu fit tomber du ciel une pluie de feu et de soufre qui les a tous fait mourir ; il en sera de même le jour où le Fils de l’homme se révélera.

    Ce jour-là, celui qui sera sur sa terrasse, et qui aura des affaires dans sa maison, qu’il ne descende pas pour les emporter ; et de même celui qui sera dans son champ, qu’il ne retourne pas en arrière. Rappelez-vous la femme de Loth. Qui cherchera à conserver sa vie la perdra. Et qui la perdra la sauvegardera. Je vous le dis : Cette nuit-là, deux personnes seront dans le même lit : l’une sera prise, l’autre laissée. Deux femmes seront en train de moudre du grain : l’une sera prise, l’autre laissée.’ Les disciples lui demandèrent : ‘Où donc, Seigneur ?’ Il leur répondit : ‘Là où il y a un corps, là aussi se rassemblent les vautours.’ »

    Finie cette brève introduction, il est certainement bon de relire tout le chapitre d’un seul trait pour se laisser emporter par ce mouvement impressionnant. On sent déjà que l’heure de Jésus approche. Puis nous reviendrons sur les plus importantes « perles de la Parole » de ce passage qui ont encore tant à nous dire…

     


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  • Bien chers lecteurs,

    Vous avez dû vous sentir abandonnés pendant cette longue période, mais me revoilà de nouveau avec vous à partir de ce mois de mars, en espérant pouvoir continuer normalement à partager mes découvertes avec vous.

    Entre temps, le 10 février, nous avons pu fêter l’anniversaire de « L’Orient la Nuit » avec une grande joie : du 10 février 2015 à aujourd’hui, cela fait déjà 9 ans que nous avons commencé notre voyage commun à la recherche de nouveaux trésors.

    Pour que vous ne vous sentiez tout de même pas trop perdus, je vous fais un rapide résumé de nos publications du mois d’août jusqu’à maintenant. Vous pouvez toujours y revenir…

    Du 2 au 30 août, nous avons continué à nous plonger, dans « Perles de la Parole », dans les merveilles du chapitre 15 de l’Evangile de Luc : « Partager la joie », « La magie du pardon », « La miséricorde qui couvre tout », « La hâte de la miséricorde », « Le mauvais et le bon amour de soi-même », « L’amour humble du père », « La comparaison qui tue », « La vie et la mort » et « Tout ce qui est à moi est à toi ! ».

    Du 4 au 27 septembre, nous nous sommes lancés dans le chapitre 16 de Luc : « De Matthieu à Luc 16 (1 et 2) », « Luc 16 », « L’habileté de Dieu », « Des amis qui conduisent au ciel », « La confiance de Dieu » et « De la Loi au royaume de Dieu ».

    Et en octobre un autre bon mois de publications, en commençant, les 2 et 4 du mois, par deux derniers commentaires à Luc 16 : « Faits pour être frères » et « La conviction du cœur ». Et à partir du 9 octobre jusqu’au 25, de nombreuses introductions au chapitre 17 du même Evangile : « De Matthieu à Luc 17 (1 et 2) », De Marc et Matthieu à Luc 17 (1) », « De Marc à Luc 17 » et « De Luc à Luc 17 (1 et 2) ». Le 29 octobre « C’est toi mon plus beau cadeau de Noël » dans « Découvertes », comme une anticipation à Noël que je n’allais pas pouvoir passer avec vous.

    Le 2 novembre dans « Accueil », je vous annonçais la période des vacances du blog. Le 29 novembre un seul petit article en retard : « De Marc et Matthieu à Luc 17 (2) ». Et nous voilà enfin prêts pour pénétrer maintenant dans tous les trésors du chapitre 17 de Luc qui nous attendent.

    Bonne lecture, en espérant que tous ces approfondissements puissent apporter un peu de lumière en cette période si sombre que traverse notre humanité malade…


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  • [Pour nous préparer à la lecture du chapitre 17 de l’Evangile de Luc, nous reprenons ce commentaire publié dans ce blog en 2015 et 2020]

    « Celui qui veut sauver sa vie la perdra ; mais celui qui perdra sa vie pour moi et pour l’Evangile la sauvera. » (Mc 8,35) (cf. Mt 16,25 : « Celui qui veut sauver sa vie la perdra, mais qui perd sa vie à cause de moi la gardera. » cf. aussi Lc 9,24 : « Celui qui veut sauver sa vie la perdra ; mais celui qui perdra sa vie pour moi la sauvera. » et cf. enfin Lc 17,33 : « Qui cherchera à conserver sa vie la perdra. Et qui la perdra la sauvegardera. »)

    Si difficile et si simple à la fois. On dirait presque un jeu de mots. Jésus veut-il se moquer de nous ? Certainement pas. Il veut nous convaincre que le chemin pour le suivre est d’une toute autre logique que celle où le monde nous entraîne. Là aussi on sent le parfum des béatitudes. Mais si l’on comprend vraiment Jésus, si l’on entre avec lui dans cette logique de l’amour trinitaire qui nous a suivis jusqu’ici à chaque pas, alors tout s’illumine. Dieu est le premier qui se donne, qui donne sa vie, qui ne pense qu’au bien de l’autre qu’il rencontre ou qu’il crée. Le Père n’a pas le temps de penser à lui, de se replier sur lui, de vouloir se sentir important (il pourrait le faire, il est Dieu au fond !), il est entièrement pris par ce mouvement de donation réciproque où seul ce qui est important pour Lui c’est de se donner et de donner sa vie au Fils dans l’Esprit. Alors si nous voulons le suivre, nous aurions une manière meilleure que de nous mettre à faire comme Dieu, nous voudrions arrêter ce mouvement de donation réciproque pour le détourner sur nous-mêmes et je ne sais quel caprice ? Nous voudrions penser à être importants, là où Dieu lui-même pense que l’autre est important ? Là est sa grandeur et l’exemple qu’il nous demande de suivre. Il n’est certainement pas facile pour nous d’être Dieu, nous allons échouer mille fois par jour et nous relever. Mais il est là avec tout son amour pour nous aider. Alors l’important c’est d’avoir au moins les idées claires sur la direction à suivre et le reste viendra peu à peu avec l’aide de son immense miséricorde.

     

     

     


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