• « Les nations païennes mettent leur espoir en son nom. » (Mt 12, 21) 

    Mais comment est-ce possible ? C’est peut-être le plus grand miracle de Jésus. Quand l’amour brise les frontières qui nous enferment, c’est là que nous nous mettons à aimer comme Dieu aime. Et ce miracle commence d’abord au cœur de chacun d’entre nous, lorsque finalement nous laissons le regard de Dieu voir en nous. Je ne dirais pas que Dieu voit soudain à notre place, car c’est bien nous qui regardons, mais nous avons désormais des yeux différents, des yeux qui ne sont plus conditionnés par les préjugés précédents de notre histoire, de nos blessures ou de notre éducation sectaire. A un certain moment, à travers la parole de l’Evangile, une véritable révolution se fait en nous, spirituelle mais aussi culturelle, psychologique, politique même. Et nous devenons capables d’entrer dans l’esprit et le cœur de l’autre sans que cela nous dérange ou nous fasse du mal.

    Et c’est lorsque des hommes parviennent à s’unir avec cet idéal d’un regard nouveau sur le monde qu’ils commencent à attirer les autres. Car nous sommes tous faits de la même matière. Nous avons tous été créés à l’image de Dieu. Et lorsque cette image, paralysée et emprisonnée derrière les frontières de la peur, de la différence, de l’obscurantisme et de tout ce qui nous empêche d’accueillir l’autre à longueur de journée, rencontre finalement le Christ en nous et au milieu de nous, voilà que l’autre commence à respirer. Et alors Jésus repasse par les chemins de ce monde comme il le faisait il y a 2000 ans et tous les païens de la terre, c’est-à-dire tous ceux qui en principe ne devraient pas pouvoir l’accueillir et le reconnaître, mettent eux aussi à leur tour « leur espoir en son nom » !

     


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  • « Voici mon serviteur que j’ai choisi, mon bien-aimé en qui j’ai mis toute ma joie. Je ferai reposer sur lui mon Esprit, aux nations il fera connaître le jugement. » (Mt 12,18)

    Encore une phrase tellement riche qu’elle nous fait rêver. La prophétie extraordinaire d’Isaïe est devenue réalité en Jésus descendu du ciel pour nous faire pénétrer avec lui dans la Trinité. Le paradis est là désormais, à portée de main et de cœur. La vision d’Isaïe est tellement belle qu’il faut en fait plusieurs mots qui se complètent les uns les autres pour la traduire dans toute sa profondeur. Le « jugement » apporté par Jésus est aussi le « droit » ou la « vraie foi » selon les traductions. La « joie » est aussi la « faveur ». Mais ce sont toujours des paroles qui nous élèvent et nous transportent. Dieu est là avec son secret de l’Amour Un et Trine. Le Fils, qui est aussi le serviteur de Dieu et de l’humanité, image du Père qui est en fait le premier serviteur de tous, est en même temps le « bien-aimé » du Père. Et voilà que nous nous retrouvons nous-mêmes au milieu de ce courant divin. Comment imaginer un dessein plus merveilleux sur l’humanité et chacun de nous et sur ce « nous » que nous avons découvert comme la synthèse de l’humanité à l’image de Dieu ?

    Je m’arrêterai ici surtout sur cet « Esprit » que le Père vient « mettre » sur le Fils, ou « répand » sur Lui, ou fait « reposer » sur Lui, selon les traductions. Cet Esprit est peut-être l’aspect le plus mystérieux et le plus fascinant de l’Amour trinitaire qui s’ouvre à nous. Car il est la garantie que l’amour divin n’est jamais un amour à deux. L’Esprit est l’ouverture éternelle et totale des deux en eux et en dehors d’eux en même temps, l’image d’un Amour qui ne peut jamais se replier sur soi et qui trouve dans la création une nouvelle invention trinitaire. Se laisser pénétrer à notre tour par l’Esprit qui est « mis » en nous, ou « répandu » sur nous, ou qui « repose » en nous et sur nous, c’est entrer dans une dimension nouvelle qui change toute la vie. Car l’Esprit est d’abord « être » plutôt qu’action. L’Esprit est là qui « repose »… Et il est en même temps relation sans fin, ouverture continuelle sur les deux qu’il unit en lui et à travers lui. Suivre l’Esprit sera apprendre à être simplement à notre tour cette relation à Dieu et aux autres et découvrir que Dieu en nous est à la fois toujours là, simplement là, et en même temps toujours en dehors de soi dans une dynamique continuelle d’amour et de service. Et découvrir en même temps que notre paradis, déjà sur cette terre, en attendant l’éternité, est d’être tour à tour chacun et tous ensemble à l’image du Père, du Fils et de l’Esprit dans une harmonie qui surprend et comble à chaque instant pour toujours…

     


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  • « Il est donc permis de faire le bien le jour du sabbat. » (Mt 12,12)

    Mais notre monde est complètement fou ! Le monde du temps de Jésus et notre monde d’aujourd’hui, c’est à peu près la même chose ! L’homme est tellement désorienté que Dieu doit descendre du ciel pour lui dire que le bien est permis ? Comme si nous ne le savions pas…

    Mais que se passe-t-il alors dans notre monde malade ? On ne va pas parler ici du mal qui essaye de régner sur le monde et qui empêche le bien de se développer, c’est bien évident. Mais pensons simplement aux personnes « normales » que nous sommes la plupart d’entre nous, avec le désir de faire le bien, de le vivre et de le partager avec nos frères et sœurs en humanité.

    Voilà que Jésus vient nous réveiller et nous libérer en même temps. Car il veut nous faire découvrir que nous sommes tellement perdus, peut-être avec la meilleure volonté du monde, que nous ne savons plus où se trouve la boussole du bien. Nous sommes capables de passer des journées entières à faire beaucoup de choses, à nous agiter dans tous les sens sans réussir à faire vraiment « le bien ». Et ce sont par exemple les hommes de religion qui transforment le message de Dieu en lois morales qui nous paralysent ou les parents qui interdisent à leurs enfants de savoir vraiment vivre, sous le prétexte de les protéger de tous les dangers de la société, ou les éducateurs de tous genres qui transforment les études en une pénitence qui devient souvent le contraire de la joie et de l’aventure de la découverte que la culture devrait nous donner… Je sais que je fais là une caricature exagérée et un peu trop pessimiste, mais c’est pour nous aider à comprendre combien le message de Jésus devrait nous secouer complètement si nous savions l’écouter et le mettre en pratique.

    Et quand nous savons que le « bien » le plus grand est l’amour et surtout l’amour réciproque, nous ferions bien de nous rendre compte que nous passons une grande partie de notre journée à avoir peur d’aimer, peur d’être nous-mêmes, peur de dire simplement la vérité, peur de pardonner ou de donner notre vie… Parce que ce n’est pas prudent, parce que les gens vont nous regarder de travers, parce que les autres n’aiment pas et donc pourquoi nous sentir obligés de le faire… Alors que l’amour et le bien pourraient être notre respiration de chaque instant et que personne au monde ne devrait pouvoir nous empêcher de « faire le bien ». Mais pour « faire le bien » et vivre l’amour réciproque, il faut d’abord nous lier étroitement à d’autres personnes qui ont le même but, sinon la bataille devient impossible. Heureusement que Jésus est là et qu’il nous montre le chemin, un chemin qui change tout quand nous pensons réellement chaque matin : aujourd’hui j’ai le droit de « faire le bien », le droit avant même le devoir. Car le devoir est parfois lourd et vécu à contre cœur, tandis que le droit libère…

     


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  • Regardez avec moi cette citation rencontrée ces jours-ci par hasard et qui m’a scandalisé. Et pourtant elle est d’un grand écrivain, Georges Duhamel. « L’homme est incapable de vivre seul, et il est incapable aussi de vivre en société. »

    Je ne vais pas faire ici de procès à Georges Duhamel, surtout à partir d’une phrase prise en dehors de son contexte qui pourrait sans doute nous l’éclairer. Mais n’est-ce pas tellement négatif de faire circuler des phrases pareilles qui sont tristes ou même simplement ridicules ?

    L’homme serait donc condamné à échouer lamentablement tout au long de sa vie, puisque seul ou en société, il n’arriverait à rien de beau, de bon ou de bien ?

    Il y a ici encore un grand malentendu. Car c’est au fond comme si je prenais la main d’un homme et que je la détachais du reste de son corps. Ou ses jambes ou son cœur ou son cerveau. Tout semblerait absurde, puisque les membres de notre corps sont faits pour être pour toujours étroitement liés les uns aux autres, sous peine d’un grave handicap ou même de la mort du corps tout entier.

    Alors pourquoi cette insistance à vouloir toujours isoler l’homme, l’individu, chacun de nous ? Tandis que le sens de notre vie, ce pour quoi nous sommes venus au monde est justement d’être en relation continuelle avec d’autres hommes. Même quand je suis seul, je suis en relation, je pense aux autres en bien ou en mal. La nuit, je rêve des autres. Je me situe sans arrêt par rapport aux autres. Le problème n’est donc pas ce lien de moi aux autres, mais la façon avec laquelle je me rapporte à eux.

    « Vivre seul » pour toujours n’aurait évidemment aucun sens, mais vivre seul par moment, par nécessité provisoire, peut être un moment bénéfique comme celui d’une retraite momentanée pour se reposer et réfléchir. Mais ce doit être bien sûr pour avoir ensuite une harmonie encore plus grande dans mon lien avec les autres.

    Mais « vivre en société », devrait être la source de notre bonheur, si nous avons compris le secret de la vie. Car la vie vaut la peine d’être vécue lorsque nous sommes en pleine réciprocité avec les autres, lorsque nous sommes heureux de les rencontrer parce qu’ils nous aiment, nous enrichissent et nous font du bien. Quand on a l’impression du contraire, c’est seulement parce que nous nous y sommes mal pris, ce n’est pas « la faute aux autres ». Sinon ce serait comme si un homme qui a eu le malheur d’avoir un accident rangeait pour toujours sa voiture au garage, ce n’est évidemment pas une bonne solution. Alors pourquoi nous mettre nous-mêmes au garage chaque fois que nous avons des difficultés ou des conflits avec les autres ? On peut trouver tellement de solutions positives. C’est le sens de tout ce blog qui se bat comme beaucoup d’autres pour qu’enfin l’homme finisse par se convaincre que nous avons tellement de chance de pouvoir exister, vivre, respirer et nous aimer les uns les autres…


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  • « Or, je vous le dis : il y a ici plus grand que le Temple. » « Mais si c’est par l’Esprit de Dieu que moi j’expulse les démons, c’est donc que le règne de Dieu est survenu pour vous. » « … et il y a ici bien plus que Jonas. » « … et il y a ici bien plus que Salomon. » (Mt 12, 6.28.41.42)

    « Ici », « ici », « ici » : comme elle est étonnante cette insistance de Jésus sur ce petit mot apparemment tellement insignifiant et qui va être tout d’un coup le centre de notre attention ! « Ici », cela veut bien dire « ici », en cet endroit précis, devant nous et pas ailleurs. « Ici », cela veut dire que tout le reste est devenu secondaire. Le Temple de Salomon, le roi Salomon lui-même et tous les prophètes comme Jonas, ce qu’il y avait jusqu’ici de plus prestigieux, de plus important, de plus riche, de plus puissant au monde, va entrer dans l’ombre. Car « le règne de Dieu est survenu » pour nous. Toute l’histoire du monde va désormais prendre une autre direction, un autre sens physique, mais aussi spirituel.

    Il y a là tout simplement le secret de la vie. L’homme peut courir de sa naissance à sa mort à la recherche d’un but à atteindre, d’un bonheur à réaliser, d’un projet à construire. Il peut s’occuper du matin au soir dans des travaux et des activités les plus variées. Il peut rencontrer des gens et se lier à eux, s’attacher ou se détacher, s’entendre ou se disputer. La vie peut être belle ou difficile, voire même terriblement pénible. Et l’on peut dans tout cela passer à côté de l’essentiel, parce qu’on n’a pas pris la peine de s’arrêter « ici » et de contempler enfin le secret qui va donner un sens au tourbillon dans lequel nous étions perdus jusque-là.

    Jésus est venu parmi nous pour nous faire entrer avec lui dans le paradis de sa relation avec le Père et avec l’Esprit. Mais il ne peut pas et ne veut pas s’imposer contre notre volonté et notre liberté. Il nous donne tout de même les éléments pour comprendre et son message est tellement clair si on sait l’écouter. Toute notre vie peut se passer dans la confusion la plus totale alors que la clé pour ouvrir la porte du trésor est « ici » devant nous, près de nous, et même en nous, si nous sommes un peu attentifs. Quand on a commencé à comprendre enfin ce qui se passe, il ne nous reste plus qu’à « le » chercher du matin au soir, pour nous et pour les autres. Car cet « ici » n’est pas seulement un cadeau que Dieu donne à chacun personnellement pour le combler de bonheur, mais cet « ici » se trouve dans la relation même entre les personnes qui s’aiment, comme au paradis l’ « ici » de Dieu est la relation de réciprocité qui brûle de toute éternité entre les trois Personnes de la Trinité. La vie devient alors comme un immense jeu d’amour sans fin, avec ses moments de joie et ses épreuves. Mais « il est ici » dans la joie et les épreuves, « il est ici » dans la prière et l’action, dans la recherche ou la solution, dans la fatigue et le repos, dans la peine et la récompense, dans la croix et la résurrection. Il est toujours « ici » qui nous aime et voudrait tellement que nous n’allions plus chercher ailleurs autre chose qui ne pourra plus jamais nous combler…

     

     


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